5- L'aide specialisée à dominante pédagogique. Le "maître E".

5-1- Cette aide s'adresse à un enfant en difficulté, qui désire apprendre, mais que son maître ne parvient plus à aider.

Certains enfants sont pleins de bonne volonté , leur maître l'affirme, mais leurs tentatives et leurs efforts se soldent la plupart du temps par un échec . Ils s'intéressent à la classe, à ce qui s'y passe, mais semblent ne pas comprendre les consignes, par exemple, ou d'une manière générale, ce qui leur est demandé. Le maître "a pourtant tout essayé, mais ne sait plus comment faire avec cet enfant." C'est ce qu'il en dit souvent, lors de la demande qu'il formule. Les difficultés de l'enfant renvoient moins à la maîtrise de processus cognitifs, qu'il conviendrait d'acquérir, qu'à leur mise en oeuvre .

L'enfant maîtrise les processus symboliques, il le montre dans les activités de la classe; son imaginaire lui est accessible, il est capable d'inventer des histoires; les difficultés affectives et relationnelles, souvent présentes, ne sont pas premières ou trop massives. Mais, du fait de sa difficulté, il projette sur l'école et ses exigences, une angoisse qui le piège, l'enferme. Des doutes sur lui-même, sur ses capacités, un système relationnel et des méthodes de travail non ajustées, qui l'empêchent d'être réellement élève. Les difficultés comportementales ou relationnelles de l'enfant: agitation, rêverie, etc..., sont considérées comme des symptômes, mais ceux-ci ne touchent pas le désir d'apprendre lui-même.

Quelquefois, l'enfant semble avoir "des trous", "il manque de bases". Même si des lacunes se sont produites à différentes étapes du parcours, sa principale difficulté est peut-être de ne pas parvenir à donner un sens, à créer des liens cohérents entre des éléments de savoir disparates. Il croit ne pas savoir, et en réalité il sait beaucoup plus de choses qu'il le pense. Nombre d'enfants, et d'adolescents, sont dans ce cas.

L'enfant n'a pas coupé ses liens avec l'objet d'apprentissage, mais il ne parvient plus, avec la seule aide du maître, à dépasser ses difficultés. Il gère difficilement ses processus de pensée , ses techniques et ses méthodes de travail . Il ne parvient pas à construire ceux-ci ni à les ajuster dans une démarche d'apprentissage cohérente. Il ne comprend pas toujours ce que lui demandent le maître ou l'institution scolaire. Il ne comprend pas toujours le système scolaire lui-même. C'est le cas fréquent des enfants dont "l'habitus" familial est très éloigné de celui de l'école; (enfants de migrants, enfants de milieux socio-culturels très défavorisés, pour lesquels l'école est objet d'incompréhension, de souvenirs d'échec des parents, de refus, de rejet...) 279 .

Notes
279.

On peut contester, semble-t-il, une position prise à ce sujet par Jacques LEVINE (1993-1). Celui-ci" "catégorise" les enfants dont la difficulté relève d'une rééducation. Il y situe les enfants que nous venons d'évoquer, en caractérisant leur fonctionnement cognitif "d'intelligence concrète, pragmatique". L'aide pédagogique spécialisée du maître "E", ne convient-elle pas tout à fait, lorsque l'aide du maître ne suffit pas? Leurs problèmes sont de toutes façons très différents de ceux des enfants pour lesquels nous serons amenés à proposer une rééducation.