Même si les enseignants rêvent souvent "d'élèves sages, appliqués, attentifs...", beaucoup constatent qu'avec une classe "trop sage", ils s'ennuient... Un enfant "sur-adapté" au système scolaire, sera, la plupart du temps, considéré dans un premier temps comme un "bon" élève, un "élève appliqué", "consciencieux", "gentil", de la même manière qu'un enfant "sur-adapté" au milieu familial et au désir de ses parents présente toutes les caractéristiques pour être considéré comme un enfant "gentil", "obéissant", "sage"...Que cet environnement auquel l'enfant est complètement "adapté", soit le milieu familial ou l'école, les conséquences, si elles s'avèrent être, à terme, une menace pour l'identité et l'autonomie du sujet, ne s'expriment pas de la même manière sur le vécu de l'enfant ou de l'élève. Les difficultés peuvent apparaître dès l'entrée à l'école, l'enfant ne pouvant pas quitter son milieu familial, ou bien apparaître plus tard, lorsqu'on lui demandera de faire preuve d'initiative, d'autonomie, de responsabilité, d'imagination, de créativité...Les enfants "sur-adaptés", dont la "normalité" est apparente, n'inquiètent pas l'école, à moins qu'un maître, un jour, s'interroge sur cet enfant "trop sage", que l'on n'entend pas; à moins que la "sagesse", un jour, ne bascule tout à coup en révolte, en violence désordonnée‘ ..."...si d'aventure ’ ‘ (l'enfant) ’ ‘ obtempère à leur voeu préalable ’ ‘ (celui des éducateurs) ’ ‘ , s'il s'incline et suit docilement leur route, il survient un moment où le pas se dérègle, où le symptôme apparaît. L'obéissance trop étroite a ses ruses: le vivant est objectivé, brisé dans sa singularité, empêché d'accéder à sa position de sujet inaliénable." ’ (CIFALI, 1994, p. 35).
Nous pouvons facilement concevoir qu'un individu "sur-adapté" à son environnement semble avoir méconnu ou renoncé totalement à son désir pour adopter celui de son environnement. Est-ce par besoin éperdu d'être accepté, d'être aimé 323 ? Est-ce parce que le premier milieu familial a été trop "comblant", "trop plein", "trop adapté" à ses besoins, et qu'il n'a pu trouver pour lui-même les voies de son désir? Le sujet "sur-adapté" n'a pas à sa disposition la souplesse d'adaptation, d'ajustement nécessaires, pour évoluer en même temps que le milieu l'exige. Il ne parvient pas à trouver les réponses nouvelles et inventives nécessaires lors des passages obligatoires d'un monde à l'autre. La pathologie, la souffrance, la mort psychique peuvent menacer. La "sur-adaptation" ne correspond-elle pas à une forme d'inadaptation?
Alice MILLER (1983) apporte un éclairage sur les processus qui amènent un enfant à toujours tenter de "deviner" le désir de l'autre.