4-4- Bref aperçu sur d'autres apprentissages...

4-4-1- Etre capable d'apprendre à écrire.

Il est nécessaire qu'un certain détachement s'effectue, un décollement entre soi, le support, la médiation du geste d'écrire ou de dessiner, pour que la trace graphique puisse traduire quelque chose de la pensée du sujet. Quelque chose d'une séparation se joue dans l'acte d'écrire. Il y a écart irrémédiable entre ce que j'ai voulu dire et ce que le mot écrit dit à l'autre, interlocuteur absent. Il y a perte, castration symbolique, et acceptation de cette perte. On ne peut traduire le Tout. Je dois avoir quitté l'illusion d'un monde où tout peut se dire dans l'immédiateté, pour accéder à l'écrit. Etre capable d'écrire revient à avoir commencé à intégrer sa propre division de sujet, entre désir et réalité, entre vouloir et pouvoir, entre conscient et inconscient, même si cette compréhension n'est jamais achevée.

Pour écrire un texte, il y a un ordre des lettres à respecter, non aléatoire: dans "la", le "l" se met avant le "a"...On ne peut apprendre à écrire si on n'a pas travaillé autour de la génération et intégré la loi symbolique de l'inscription dans une filiation . Les rapports sont étroits entre la loi et l'écriture. Les signes lus laborieusement se transcrivent avec des règles de graphie précises, indépendantes de la phonétique. D'où la nécessité souvent soulignée d'un nécessaire rapport de l'enfant à la loi et aux règles pour pouvoir aborder l'écrit.

Quand il s'agit d'écrire, des liaisons sont à effectuer entre l'entendu et le vu, mobilisant à la fois les capacités d'analyse et de synthèse auditives et visuelles, régies chacune par des codes différents. L'enfant doit être capable de certaines opérations mentales , il doit avoir intégré le principe de réalité et le fonctionnement des processus secondaires, il doit avoir accédé à l'ordre du symbolique.

Lorsque l'enfant écrit, dessine, ou réalise une construction, son image du corps intervient autant que la qualité des gestesoula valeur symbolique de sa réalisation.L'acte d'écrire consiste en une projection sur une feuille. La possibilité d'écriture est articulée à la constitution d'une image du corps cohérente, suffisamment unifiée . . ‘ "Il est persécutoire pour un enfant de vouloir lui faire réaliser l'apprentissage de l'écriture avant qu'il ne se soit approprié symboliquement ses objets, constitué une image du corps lui permettant de projeter sur un papier des images donc de dessiner de manière spontanée, c'est-à-dire qu'il soit en possession de son corps face à l'autre et assume ce qu'il a à dire, c'est-à-dire qu'il le dise..." ’ (COLLAUDIN, 1987, p. 50).