Nécessité d'aller, d'un réel dans lequel l'enfant est englué, vers une construction signifiante.

L'enfant préoccupé, trop souvent submergé par le "réel" qui déborde en comportements agressifs, en agitation, ou qui, au contraire, le sidère, doit pouvoir transformer ce réel insupportable. Cette métabolisation passe par la représentation, et la parole.

L'opération de séparation est une cause de souffrance pour l'enfant. Des sentiments hostiles à l'égard des parents s'intriquent avec l'amour qui leur est porté, et se teintent de la nostalgie des temps de complétude. ‘ "Que l'individu au cours de sa croissance se détache de l'autorité de ses parents, c'est un des effets les plus nécessaires mais aussi les plus douloureux du développement. Il est tout à fait nécessaire que ce détachement s'accomplisse..."(FREUD, 1924, p. 157) 436 .

La construction de petites histoires, de "petits mythes" sont autant de mises en forme, de réponses, même provisoires, à ce qui préoccupe l'enfant, et permet à celui-ci d'élaborer ce réel, sur le mode d'une fiction(De HALLEUX, 1996). L'enfant remplace ‘ "la réalité indésirable, par une réalité plus conforme au désir. La possibilité en est donnée par l'existence d'un monde fantasmatique, d'un domaine qui (...) lors de l'instauration du principe de réalité, a été séparé du monde extérieur réel, depuis quoi, à la façon d'une "réserve", il a été laissé libre par rapport aux exigences des nécessités de la vie."(FREUD, 1924,p. 302-303).En s'étayant sur des fragments de la réalité, autres que ceux dont le sujet veut se défendre, ces constructions visent à élaborer"un substitut de la réalité " ’ (id. p. 303). Ces "petites histoires", à la limite de l'imaginaire et du symbolique, constituent "le roman familial" (FREUD, 1924) ou encore "le mythe individuel" (LACAN, 1953). ‘ " Bien que le mythe individuel ne puisse d'aucune façon être restitué à une identité avec la mythologie, un caractère leur est pourtant commun: la fonction de solution dans une situation fermée en impasse...Il consiste en somme à faire face à une situation impossible par l'articulation successive de toutes les formes d'impossibilité de la solution." ’ (LACAN, 1956-1957, p. 330).

Pouvoir élaborer une fiction, pouvoir mettre un sens sur ses émotions, sur sa vie, sur les apprentissages, est possible grâce à l'intervention de "la réserve fantasmatique" constituée par l'imaginaire.

Notes
436.

Le roman familial des névrosés. (1909), In Névrose, psychose et perversion. (157-160).