Pouvoir éprouver du désir et du plaisir à découvrir une énigme.

Parmi les "compétences transversales" supposées acquises par un enfant à la fin du cycle I, ou "moyenne section d'école maternelle", il ‘ "s'intéresse aux questions concernant les hommes, les animaux, le cycle de la vie..." ’ (CNDP, 1991, p. 32).

Si la connaissance est essentiellement un effort pour répondre à des questions que l'on se pose, pour résoudre des contradictions, si le savoir prend sens pour l'apprenant à partir du moment où il cherche, invente, crée, dans une exploration qui se traduit par une action et une transformation sur les choses et le monde, la curiosité est un des "moteurs" du désir de savoir. La naissance d'un petit frère, les "cachotteries" des parents, aiguisent la curiosité de l'enfant qui voudrait bien savoir ce que les parents font lorsqu'ils sont seuls, par exemple. "Je voudrais être une mouche, pour voir", me dit un jour Elisabeth , huit ans, au cours de nos rencontres en rééducation. La pulsion qui nous pousse à "voir", à regarder, que Jacques LACAN désigne par le terme de "scopique", semble bien être ce moteur qui nous pousse à regarder "pour savoir", à prendre des informations sur le monde. Regarder, mais aussi écouter, pour en savoir plus, pour enfin dévoiler ces secrets des adultes. La réponse des parents d'une manière qui satisfasse vraiment la curiosité de l'enfant, est impossible. C'est même cette inadéquation entre la demande et la réponse, brèche par laquelle peut s'engouffrer le désir, qui va permettre à l'enfant de s'emparer de la question, d'en faire son affaire et de continuer à chercher ailleurs, d'exercer sa "pulsion d'investigation", condition de tout apprentissage. Sans énigme, pas de recherche. ‘ "L'enfant cherche pour lui-même le secret des choses" ’, disait Maurice MOULAY à Grenoble (1992).

L'Oedipe en tant que moment décisif de l'ouverture à la culture, permet que se déplacent les intérêts de l'enfant. La théorie psychanalytique avance que, l'enfant renonçant à connaître la mère, comme à savoir ce qui se passe entre les parents, peut déplacer sa curiosité vers d'autres objets, dont ceux du monde culturel. Lire, c'est pénétrer et s'approprier le sens d'un texte écrit. Ivan DARRAULT (1992, p. 16) lie l'acte de lire au voyeurisme, celui d'écrire à l'exhibitionnisme. Cette énigme à résoudre, fait suite et remplace les énigmes concernant la vie et la mort, l'amour, la différence des sexes et la naissance, que l'enfant posait inlassablement et pour lesquelles il est nécessaire qu'il ait, pour l'instant du moins, trouvé des réponses qui le satisfassent. Cependant, il est nécessaire également que ces questions de l'enfant n'aient pas été trop refoulées, afin qu'il ait acquis et conservé le plaisir de la recherche. ‘ "Le parcours que fait l'enfant dans sa genèse d'enfant est un parcours non pas de l'énigme à sa résolution, mais de l'énigme bouleversante et mal assurée, à l'énigme, peut-être, dans le meilleur des cas, acceptée comme énigme." ’ (DARRAULT, 1992).