3-3- Des carences éducatives font subir à l'enfant, le manque d'étayage et d'accompagnement, dans son travail de construction de lui-même.

On ne peut pas fermer les yeux sur ces enfants de plus en plus nombreux qui arrivent à l'école sous-alimentés ou sur ceux qui, dès leur plus jeune âge, tombent de sommeil, parce qu'ils ont regardé la télévision jusqu'à la fin des programmes, ou du moins systématiquement jusqu'à la fin du film... Incapacité des parents à faire face à une situation trop difficile pour eux? Démission des fonctions parentales? Carences éducatives?... L'école ne peut pas résoudre tous les problèmes. Les services sociaux non plus, mais certaines situations sont de leur ressort. Quant aux enfants, ils sont à l'école, et ils sont supposés apprendre...

De nombreux parents n'osent plus, - ou ne savent plus? - exercer leur autorité, donner à leur enfant des limites structurantes, sécurisantes, des repères qui lui sont indispensables pour pouvoir se construire, mais aussi des autorisations, des incitations à aller de l'avant, et en particulier à s'inscrire dans la culture. L'absence réelle du père, ou l'absence de l'exercice de sa fonction d'autorité, de sa fonction introductive de l'enfant au monde social et à la culture, se font ressentir d'une manière répétée. D'autres parents sont constamment "hors-la-loi", et ne remplissent pas leur mission de parents, qui consiste à transmettre à leurs enfants le sens de la règle sociale, le sens de la Loi. L'école ne représente plus pour certains le seul moyen de "réussir" socialement, et la débrouillardise, le gain facile ou les moyens illicites, remplacent parfois dans la famille les valeurs que prône l'école, plaçant l'enfant dans un conflit de valeurs entre sa famille et l'école, et dans un choix impossible.

Certains enfants sont "laissés pour compte" (CLERGET, 1993), livrés à eux mêmes par des parents débordés, préoccupés par autre chose, absents. Enfants non écoutés, non entendus dans leur famille, non reconnus dans leur individualité, dans leur existence et dans ce qu'ils pourraient en dire, et de ce fait, non séparés, non inscrits dans des relations humaines intersubjectives symbolisées. Ils s'accrochent à des modes imaginaires de penser, à l'immédiateté du fantasme, à celle des illusions.

On peut s'interroger sur l'acuité des difficultés rencontrées par un enfant dans le contexte familial et social actuel, dans lequel les vécus de déliaisons sont multiples, massifs, envahissants, et dans lequel l'école est souvent le seul lieu un peu "protégé" du tumulte des "grands"...L'importance accrue de la nécessité de la réussite, de "l'adaptation" de l'enfant au milieu scolaire, ne fait que rendre cette situation plus complexe encore, pour l'enfant. Jacques LEVINE (1993-2) souligne le fait que le parcours de l'enfant est devenu considérablement plus mouvementé, accidenté, depuis quelques décennies. Trois crises se surajoutent: la déstabilisation massive des familles, celle de l'école et celle de la société.