Des liens rompus.

Les familles désunies, disloquées, recomposées, réduites à un seul parent, les familles en crise, n'apportent souvent plus à l'enfant la stabilité et la sécurité, les repères nécessaires à la construction d'une identité inscrite dans le temps, dans une généalogie structurante.

Les parents d' Alex sont divorcés et s'entre-déchirent. Le garçon ne voit plus son père actuellement. La mère de Kevin rejette et dévalorise ouvertement ce mari qui l'a déçue, non sans remarquer à tout propos combien Kevin ressemble à son père...

Le dépassement de l'Oedipe, par exemple, est rendu difficile pour les enfants dont le père est trop absent ou inexistant, ou rejeté par la mère, ou encore victime d'une exclusion sociale...Il est difficile alors pour l'enfant d'entrer dans la triangulation nécessaire à son entrée dans les apprentissages, tout occupé qu'il est à conserver désespérément l'amour d'une mère débordée, seule, insatisfaite...ou qui demeure dans une jouissance d'avoir son enfant comme objet phallique. L'enfant se pose immanquablement la question de sa propre responsabilité dans la séparation de ses parents: "C'est parce que je n'ai pas été gentil, peut-être, que papa est parti?"

Alex dira un jour, lors d'une séance rééducative: "Mon père est parti parce qu'un jour j'ai cassé un objet auquel il tenait beaucoup". Une autre fois, il avancera: "C'est à cause de moi que mon père est parti. C'est mon frère (Il s'agit de son frère aîné). qui me l'a dit. Un bébé, ça coûte trop cher." . Quelque temps après, il donnera une autre explication: "Mon père, il voulait une fille, alors, comme j'étais un garçon, il est parti".Autant de réponses qui butent sur l'impasse de la séparation des parents, mais aussi sur celle de la rivalité fraternelle, sur les questions de sa propre identité sexuelle, et du désir des parents....

Lorsque cette séparation survient juste au moment du conflit oedipien, lorsque l'enfant souhaitait la disparition de ce parent, cette "réalisation du désir", relevant de la pensée magique, peut l'obséder...

Qu'en était-il du désir d' Ismène au moment de la maladie de sa mère? Qu'est-ce qui n'a pas pu se transformer, se nouer, s'articuler, s'élaborer? Elle avait tout juste cinq ans...

Tant que les mots appropriés ne sont pas prononcés sur cette question génératrice d'angoisse, une fixation risque de se produire, entravant tous les processus de pensée de l'enfant... Lorsque la culpabilité qui est engendrée par de telles pensées s'installe, seules des paroles peuvent dénouer les instances psychiques, la pensée... Il devient nécessaire de "re-jouer", "re-présenter" la situation conflictuelle, puis de l'élaborer autrement, différemment, d'une façon plus satisfaisante. On conçoit alors que l'aide apportée à ces enfants, ne peut pas être d'ordre pédagogique. Elle devrait se centrer autour de la parole de cet enfant, organiser les conditions favorables pour délier celle-ci, pour que des mots de l'enfant puissent se dire, pour que ces conflits, ces préoccupations, puissent s'élaborer. Une des directions, d'importance, se dessine, pour notre recherche, quant à l'aide à proposer à l'enfant, en réponse à: A quels besoins de l'enfant cette aide devrait-elle pouvoir répondre?