Introduction de la troisième partie. La rééducation convoquée à "s’auto-définir". Des propositions rééducatives, à leurs "effets".

Les textes fondateurs avaient mis les rééducateurs à une place qu’ils devaient eux-mêmes définir dans l’école, en même temps qu’ils devaient élaborer leurs stratégies rééducatives. Si le texte de 1970 488 assignait au groupe d’aide psycho-pédagogique un objectif de "prévention des inadaptations", "d’adaptation et d’observation continue" (p. 689) des élèves, il évoquait fort peu de choses quant aux stratégies à utiliser. Celles-ci se pratiquaient "individuellement ou par petits groupes" (p. 690). "L’aide reçue" devait permettre aux élèves de "mieux s’adapter" à leur classe (id). Nous avons analysé comment cette absence manifeste d’indications avait été source d’errances, d’inquiétudes, de remise en question, mais aussi de créativité de la part des praticiens, dans la construction de leur identité professionnelle.

Le texte de 1990, s’il énonce d’une manière plus claire les objectifs de l’intervention rééducative, laisse lui aussi une grande latitude aux professionnels pour définir eux-mêmes leurs stratégies. ‘ "Pour atteindre ’ ‘ (les) ’ ‘ objectifs" de ces "interventions spécifiques" ’, y est-il dit, ‘ "les intervenants spécialisés compétents du réseau d’aides choisissent et mettent en oeuvre, dans chaque cas, les stratégies, les méthodes et les supports les mieux adaptés à leur démarche professionnelle." ’(p. 1042) 489 .

Le "référentiel" recensant "les compétences" attendues des candidats aux différentes options du CAPSAIS, ou "Certificat d’Aptitude aux Actions Pédagogiques Spécialisées d’Adaptation et d’Intégration Scolaires" 490 ,précise que "l’enseignant spécialisé chargé de rééducations", doit être "capable de définir et d’argumenter sa spécificité professionnelle (auto-définition, rôle, fonctions) auprès des différents partenaires du système" (p. 36, point 1-3-1-1).

Se définir n’est pas chose facile, et ce, d’autant moins que l’action se situe dans ces marges floues des “entre-deux”. Nous avons pu avancer, que l'école devait pouvoir offrir à un enfant en difficulté scolaire "un temps et un lieu d'aide intermédiaire". 491 Les analyses de notre deuxième partie nous ont permis d'affirmer que "cette rééducation devra se situer en amont de l'intervention pédagogique, dans un lieu et un temps symboliques, intermédiaires entre le temps et l'espace de la famille, et le temps et l'espace de la classe. Elle devra permettre à l'enfant de poursuivre la construction, ou de récupérer la disponibilité du substrat nécessaire aux apprentissages" (id.). La raison d'être de la rééducation à l'école est d'éviter autant que faire se peut, la médicalisation des difficultés d'un enfant. C'est la nature "normale" de ces difficultés, qui a conduit à lui proposer une rééducation. Il s'agit donc de situer la rééducation "entre pédagogie et soin".

De la même manière que pour un sujet singulier, on peut considérer qu’il est nécessaire d’affirmer sa différence pour assurer son identité professionnelle, et pour être reconnu. En ce qui concerne une pratique professionnelle, définir une troisième voie implique de bien connaître les deux autres. Nous avons analysé la différence fondamentale qui spécifie thérapie et rééducation. La première s'adresse à des enfants considérés comme malades, la seconde envisage, dans la mesure du possible, la difficulté comme normale. La première relève du soin, la deuxième est une aide, l'accompagnement d'un enfant dans ses processus "d'auto-réparation". La première est extérieure à l'école, la seconde est dans l'école. Nous nous réservons de relever éventuellement d'autres différences qui pourraient paraître pertinentes, lors de l'analyse des rencontres avec l'enfant.

Notes
488.

Circulaire n° IV 70-83 du 9 février 1970. Prévention des inadaptations. Groupes d'aide psycho-pédagogique. Sections et classes d'adaptation. Bulletin officiel du ministère de l'Education Nationale. n° 8 du 19-2-70. 689-695.

489.

Circulaire n° 90-082 du 9 avril 1990. Mise en place et organisation des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté. Bulletin Officiel de l'Education Nationale, 19 avril 1990, n° 16, 1040-1045.

490.

Rénovation du CAPSAIS. Certificat d'aptitude aux actions pédagogiques spécialisées d'adaptation et d'intégration scolaires. Bulletin Officiel de l'Education Nationale, n° 3, 8 mai 1997, Hors série, Annexe: Référentiel de compétences.

491.

Conclusion de la deuxième partie.