2-1-2- De la spécificité du projet rééducatif, à des démarches singulières.

La diversité des obstacles auxquels peut se heurter un enfant "ordinaire" au cours de son histoire "ordinaire", permet de mieux comprendre qu'il ne peut y avoir UNE réponse rééducative, mais nécessité de s'ajuster au plus près des besoins de l'enfant. Celui-ci semble avoir besoin d'être accueilli avec ses difficultés, rencontré "là où il est", au sein d’une rencontre singulière , afin d'être accompagné dans son cheminement.

“Rencontrer”, est issu, selon l’étymologie, du latin in contra, “au devant de”. Aller au devant de quelqu'un, c'est effectuer un mouvement vers lui, c'est prendre la peine de faire un bout de chemin à son devant, là où il est. Nous avons vu que le “besoin de transitionnalité”, décrit par Jacques LEVINE comme besoin d’être rencontré là où on est, dans son existence, dans ses besoins, est un des besoins fondamentaux du sujet. De telles conceptions, sont directement issues d’un contexte pédagogique, PESTALOZZI, DON BOSCO, ou encore MAKARENKO, FREINET, les pédagogues de l’Ecole Nouvelle avaient souligné la nécessité de redonner au mot “pédagogue” son sens premier.

Que préconisaient-ils? 511 Il s'agissait, pour le pédagogue:

En rééducation, si l'on admet que le savoir à découvrir est celui que l’enfant doit découvrir sur lui-même, on peut considérer que l'adulte n'a pas à devancer l'enfant. La situation est renversée par rapport à la relation pédagogique, et la route et ses repères, fondamentalement différents par rapport au maître spécialisé à dominante pédagogique.

En référence aux théorisations de WINNICOTT, ou de KAËS 512 , nous pouvons avancer que proposition est faite à l'enfant d'une “aire de transitionnalité”, d'une aire d'expression, d'élaboration, de symbolisation, de sublimation, dans une rencontre médiatisée. Une relation sans cesse référée à un tiers symbolique, objet ou personne, permet d’éviter les enfermements duels imaginaires et mortifères 513 .

Entre l’enfant et le rééducateur, l’objet tiers peut être variable. Ce peut être:

L'expression de l'imaginaire semble devoir être privilégiée en premier lieu, afin d'aider l'enfant à se dégager de ce qui l'encombre, de ce qui lui fait peur et de ce qu'il évite, mais aussi afin de l'aider à "se dire" et à retrouver ce que peut lui apporter comme ressource créative son imaginaire, afin qu'il le reconnaisse comme une richesse qui lui appartient. Les processus de symbolisation , de métabolisation des émotions, des affects, mais aussi de son imaginaire et des expériences diverses réalisées par l'enfant, devraient être, de la même manière, suscités, favorisés 514 .

Notes
511.

Notre première partie, et la synthèse qui en a été faite sous le titre: Le fil d’Ariane de la pédagogie de “la marge”, de la pédagogie des limites”...Chapitre III, point 4.

512.

KAES (1979, p 63).

513.

A ce sujet, les analyses de Francis IMBERT (1994). Yves de LA MONNERAYE (1991) insiste sur l'absolue nécessité de toujours référer la relation rééducative, au symbolique.

514.

Dans tous les écrits théoriques actuels concernant la rééducation, l'accent est mis sur la nécessité de favoriser chez l'enfant la mise en oeuvre de la fonction symbolique, sous toutes ses formes.