1-4- Grâce au rappel du cadre dans ses fonctions limitatives, et à son intériorisation, Ismène "répare" la relation et son image de soi, puis elle se tourne vers l'imaginaire culturel.

Fonction symbolique du cadre: interdits et permissions. Limites entre le jeu et le non-jeu, le "faire-semblant" et le passage à l'acte, le jeu et la réalité.

Depuis quelques séances, Ismène, sept ans 571 , joue en rééducation des scènes familiales qui mettent en scène ses relations, souvent conflictuelles, avec sa mère,. Les thèmes oscillent entre une demande d'amour, de sa part, le conflit, et le rejet. (Elle est la mère, par exemple, et elle met sa fille (que je joue) à la porte). Les jeux s'organisent autour de la dînette, et les rôles changent, de sa propre initiative. Elle est, soit la mère, soit la fille.

Nous nous rencontrons deux fois par semaine.

Ce jour-là (30 ème séance), elle est une fille de quatre ans, et me demande de tenir le rôle d'une "mère gentille". Selon le scénario qu'elle construit par anticipation, à ma demande, le père serait au travail, la mère préparerait le repas, puis nous mangerions.

Dans le jeu, après le repas, "ma fille" ne veut pas aller à l'école. La maîtresse est méchante, et la punit. D'autres enfants la frappent. Elle demande à "sa mère" de l'accompagner à l'école, pour "le dire à la maîtresse". En tant que "mère", j'accepte de l'accompagner, mais exige que ce soit elle qui dise à la maîtresse ce qu'elle a à dire. Elle se prête au jeu, parle à "une maîtresse" fictive, définie par la place vide derrière le bureau, mais refuse catégoriquement de rester "à l'école", faisant un tel caprice que je dois me fâcher, la menacer d'une fessée. Je choisis cette solution, parce que c'est ce dont elle me menace lorsqu'elle joue la mère, et j'espère que nous pourrons en parler ensuite).

Je fais semblant de lui donner la fessée, tout en lui annonçant que j'en informerai "son père" le soir. Elle, par contre, m'attrape, m'entoure de ses bras pour s'accrocher à moi, se roule par terre, court dans la pièce,. Elle n'est plus dans le "faire-semblant". J'ai quelque peine à arrêter le jeu, à en poser les limites temporelles, à marquer la scansion du retour à la réalité.

Fonction contenante et fonction conteneur de la rééducatrice.

Après un jeu, je prévois toujours un moment pour en parler, ce qui peut se faire également par le dessin. Mon objectif est de mettre des mots sur ce qui vient de se jouer. Il m'apparaît important également de faire rupture, et nécessaire de proposer une activité plus calme, avant de retourner à la réalité sociale de la classe. Le rangement de la salle est une autre manière de ramener au principe de réalité.

Ismène a quelque peine à sortir du pulsionnel et de l'émotion qui l'ont envahie au moment du jeu. Lorsque je lui demande, d'une manière rituelle, "Quelle était l'histoire que nous avons jouée aujourd'hui?", elle ne veut (ou ne peut) rien en dire Je propose mon propre résumé de cette histoire, lui prêtant mes mots, et j'exprime ma difficulté de "mère" face à cette petite fille.

Elle me dira simplement, après un moment de silence: "Je voulais rester jouer à la maison..."Je croyais que tu allais vraiment me taper!"

Notes
571.

Il s'agit de la fillette dont nous avons analysé les séances préliminaires, en vue de la recherche d'éléments pertinents pour une indication d'aide rééducative (Conclusion de la deuxième partie). Nous avions parlé d'Ismène auparavant. Comme pour tous les autres enfants évoqués dans cette recherche, nous rappelons les points spécifiques au cours desquels nous avons été amenée à les nommer, dans les deux index: Index 2: cas d'enfants par ordre de présentation; Index 3: Cas d'enfants classés par ordre alphabétique.