1-3-La mort est parfois au bout du nourrissage. Un signifiant énigmatique: "Il est coincé".

Il faut éliminer le concurrent dans l'amour de la mère. Des morts "provisoires" et des "vrais" morts. "En avoir ou pas". Recherche phallique. Les signifiants "trompe de l'éléphant", "queue du crocodile". Une mise en scène de l'angoisse de castration?

Des thèmes de dévoration se répètent. La demande d'amour à la mère ne supporte pas de concurrence. Ce dernier doit être éliminé. Le tigre est le justicier, ou bien le gardien du trésor qui interdit à quiconque de s'approprier le sein maternel.

C'est notre cinquième rencontre (23-05).

"Le singe noir il est mort. on le met à l'hôpital, non, au cimetière."

Nicolas couche les deux singes, les entoure d'une barrière. Ils seront rejoints par deux tigres tués par un "oiseau" (un ibis). Cet ibis symbolisera à partir de ce moment le sauveur, il devient l'animal privilégié de Nicolas, et lors de séances suivantes, il sera Nicolas.

Mais la mort n'est pas définitive: "Ils sont plus morts, ils seront plus au cimetière".

(S'adressant à moi): "Tu vois, c'est ici le cimetière, c'est ceux-là qui sont morts. On peut plus les soigner".

Il y aurait donc des morts "définitifs" et des morts "provisoires". Nicolas pose ainsi des limites entre le monde de la réalité et celui de la fiction, à partir du thème de la mort.

L'oiseau libère "le néléphant...non, le zéléphant (ad litt.)" dont la trompe est coïncée (par une manoeuvre de Nicolas) dans la barrière.

Lors de la séance suivante (31-05) :

"Un papa" part au travail avec son camion. Deux crocodiles dialoguent. Il annonce être l'un deux. Les crocodiles "mangent les filles".

"On est coïncés, tous les deux, la queue. Ce sont les filles, elles sont pénibles!...

...Les éléphants sont accrochés dans la barrière." (avec leur trompe).

Puis, il change de personnage:

"C'est moi l'oiseau. Je suis avec mon bec moi. Je mange la boîte de croquettes d'oiseau moi, parce que j'ai faim...Je suis un·gros oiseau, j'ai un gros bec."

Nicolas est tellement "dans" le jeu à ce moment là, que je dois scander la fin de séance, marquer la rupture, afin que la fiction cède le pas à la réalité avant le retour en classe, qu'il prenne une certaine distance par rapport au personnage de l'oiseau, par rapport à son imaginaire.

On peut penser que Nicolas cherche à régler son problème avec "les filles" de la section des grands. Peut-être, avec les filles en général, et cette intruse en particulier qu'est cette petite soeur, puisque "il n'y aura plus de filles"? Ce règlement de comptes se fait sur le mode de l'oralité, de la dévoration.

Mais les garçons peuvent "se faire coïncer", on peut leur accrocher la queue (image et angoisse de castration? angoisse liée à la peur des représailles en réponse aux désirs de mort envers les filles?). On peut remarquer que le père, éventuel agent castrateur, part avec son camion au début de l'histoire, (comme le père de la réalité de Nicolas), il est éloigné du lieu de vengeance. De toutes façons c'est "à cause des filles". L'éléphant, avec sa trompe, le crocodile, et "l'oiseau avec son gros bec", semblent être utilisés par Nicolas comme des images phalliques et d'affirmation virile, mais également comme des représentations de l'angoisse de castration.

C'est l'existence d'un sexe castré, "sans pénis" qui concrétise la menace de castration pour le petit garçon. Nicolas a pu constater ou vérifier de ses propres yeux avec sa petite soeur, qu'il existe des êtres humains sans pénis et il peut dès lors se sentir menacé de perdre le sien. D'autre part, et encore une fois, "c'est à cause des filles" que Nicolas voit moins son père et partage sa mère avec une intruse, sa soeur. Aussi, "il a de bonnes raisons" d'en vouloir aux filles. Nicolas est-il "coincé" entre sa mère et sa sœur?