1-11- Rencontre avec l'enseignante. Proposition d'un dispositif favorisant des "conflits socio-symbolico-imaginatifs".

Le point sur l'évolution de Nicolas, évaluation externe et interne, de son processus rééducatif. Conjugaison d'une rééducation individuelle et du travail dans un petit groupe d'enfants. Au sein du petit groupe, Nicolas choisit des rôles de "petit", de "faible".

Nicolas a beaucoup évolué depuis le début de l'année et d'après ce qu'en disait la maîtresse des moyens. En classe, ses histoires sont bien construites. Il fait preuve de bonne volonté, même si parfois il répond "à côté". Il manque de logique dans son travail parfois. Il reste beaucoup de choses non comprises dans certains exercices, lorsque des consignes sont données, donc extérieures à lui. Le graphisme s'améliore. Le comportement se stabilise. Mais Nicolas a tendance à s'affoler lorsqu'il ne sait pas faire, ou bien quand il se rend compte qu'il n'a pas fait quelque chose: "Je n'ai pas fait ça!". Il paraît angoissé, paniqué, "comme s'il était au fond d'un trou et ne parvenait plus à sortir." La maîtresse ajoute qu'il a un grand besoin d'être rassuré.

Cette évolution décrite par son enseignante correspond à celle que l'on peut constater en rééducation. Le langage "bouillie", incompréhensible parfois, de Nicolas, a été remplacé par une parole claire faisant place à des jeux sur les mots (mots nouveaux entendus qu'il expérimente...). Sa "panique" devant la difficulté semble bien correspondre à son organisation psychique actuelle, dans laquelle domine le registre phallique et l'angoisse de castration: il ne peut supporter d'être en échec, sans se sentir impuissant, misérable, sans existence.

Nicolas semble en pleine recherche de sa place dans la famille. Je lui propose de participer, parallèlement à la rééducation individuelle, à un groupe d'enfants qui se constitue actuellement autour d'une médiation: les contes. Dans le groupe, qui sera constitué de quatre, puis cinq garçons, les scénarios des histoires issues du domaine culturel, scénarios remaniés éventuellement par le groupe, ne seront plus uniquement les siens, issus de son imaginaire. Il devra donc trouver sa place dans un petit groupe mais aussi intégrer dans l'échange, des pensées extérieures aux siennes. Celles-ci, j'en pose l'hypothèse, peuvent stimuler son propre fonctionnement psychique. C'est cette hypothèse que nous avons formulée sous la forme d'un néologisme, proposition à Nicolas d'un dispositif favorisant des "conflits socio-symbolico-imaginatifs", nous inspirant des dispositifs didactiques favorisant chez l'enfant des "conflits socio-cognitifs", comme aide à la construction de la pensée.

Dans les premières mises en scène, en groupe, faisant suite aux histoires que la rééducatrice raconte, Nicolas choisira, dans un premier temps et d'une manière systématique, le rôle du plus petit, du plus fragile. Il sera "le petit cochon qui a construit la maison de paille", il sera "le biquet qui se cache dans le lit et qui est mangé par le loup", de "La chèvre et ses biquets", puis un des "petits Poucets" (deux enfants avaient tenu à être "le Petit Poucet").