2- Frédéric: d'une parole interdite à une parole "inter-dite".

Lorsque je le rencontre, en septembre , Frédéric a dix ans, et il fréquente la classe de Cours moyen première année. Il est dans une situation d'échec scolaire important. Ses difficultés se manifestent surtout en français. "Bloqué" devant l'écrit, sa lecture reste laborieuse, son orthographe est à peine phonétique. La lecture reste pour lui un exercice purement scolaire. Frédéric lit souvent sans comprendre, et ne s'interroge pas sur le sens de ce qui est lu, manifestant un manque de curiosité intellectuelle important. Il se contente de ce qu'il a fait, sans s'inquiéter de la justesse de ses productions. Très instable, il ne reste pas en place.

Son père s'est suicidé lorsque Frédéric était au Cours Préparatoire. Deux mois après, sa mère était hospitalisée pendant cinq mois, suite à un accident de voiture. "Frédéric n'en parle jamais", dit sa mère, lors d'un premier entretien. Celle-ci précise cependant qu'il est toujours inquiet pour elle, et qu'il a un besoin constant de se rassurer sur sa présence, vite angoissé lorsqu'elle n'est pas rentrée à la maison.

La mère reconnaît qu'elle a "surprotégé" son fils, l'habillant encore, le couchant. Frédéric désire reprendre la ferme, plus tard, et il se débrouille bien, conduit le tracteur. "Il est dégourdi", dit la mère, en ce qui concerne les travaux de l'exploitation. La mère vient de se remarier, et les relations sont bonnes entre son nouveau compagnon et Frédéric, dit-elle. Le garçon accepte l'autorité de cet homme, qui apporte, selon la mère, un nouvel équilibre à la famille.

Frédéric a une sœur d'un an plus âgée que lui, qui obtient de meilleurs résultats scolaires. La mère parle de la rivalité entre les deux enfants. La sœur, "un peu chipie" , dit-elle, se moque souvent de Frédéric.