Paragraphe II : L’emploi, une finalité contemporaine du droit du travail

La mise en perspective de l’émergence de la notion d’emploi dans les sciences qui traitent du travail a montré le rôle décisif de l’Etat. Effectivement, si la tutelle de l’Etat s’est exercée pour faire respecter le principe fondateur de la liberté du travail, la régulation du marché du travail s’est aussi accompagnée d’une garantie d’existence au profit du travailleur afin de lui procurer l’assurance de disposer, par son travail, de ressources suffisantes.39 En retrait avec une certaine conception idéaliste de la finalité du droit du travail (droit de protection du salarié), il s’avère qu’il est donc de sa nature tout autant de favoriser l’exploitation du travail que de la limiter.40 On peut alors se demander quelle part la logique juridique est susceptible d’accorder à la logique économique dans la production de règles applicables à une situation de travail dans l’entreprise, entendons désormais une situation d’emploi ? Tout en conservant un point d’équilibre entre les intérêts en cause, la fonction régulatrice du droit du travail semble s’être déplacée de la stabilité du travail à la protection de l’emploi du salarié dans l’entreprise. En effet, on peut supposer que le besoin de sécurité économique n’était pas moindre pour le salarié au début du XXème siècle qu’à la fin. Cependant et, non sans paradoxe, la sécurité économique aujourd’hui acquise sollicite une protection accrue conséquence de la mutation du travail.

Notes
39.

J. LE GOFF, ouvrage précité, spéc., p. 83 et suiv. ; F. EWALD, ouvrage précité.

40.

C’est la thèse défendue in Le droit capitaliste du travail, P.U.G. 1980, A. JEAMMAUD et alii. Voir cependant, l’ouvrage de M. Ollier. Les règles du droit du travail intéressant la relation individuelle de travail sont systématiquement présentées comme des règles de protection, cf., table des matières, p. 577 et suiv. P.D. OLLIER, Le Droit du travail, Collection U, A. Colin, 1972.