Soutenue par le principe d’autonomie contractuelle, cependant relatif, qui gouverne l’alternative à l’emploi, on sait qu’il n’y a juridiquement de situation d’emploi dans l’entreprise que si la qualification « contrat de travail » peut être donnée à la relation juridique établie, mais surtout qu’il n’y a d’emploi dans l’entreprise que si ce contrat de travail est, à l’exception de tout autre, un contrat à durée indéterminée. En effet, la permanence de la relation de travail étroitement liée à l’organisation de l’entreprise rend opératoire l’opposition légale entre l’emploi et le contrat à durée indéterminée, d’une part, et la tâche et le contrat à durée déterminée, d’autre part. C’est donc, à juste titre, que la mise au travail n’est pas légalement réductible à la notion d’emploi, elle ouvre la voie à d’autres situations juridiques de travail subordonné. Cependant, le droit du travail n’a envisagé que de façon contingente le recours aux situations atypiques « d’emploi » c’estàdire qui ne concrétisent pas un emploi. Ces situations ont d’ailleurs fait l’objet d’un encadrement affirmant leur caractère dérogatoire par opposition à l’emploi comme situation de droit commun de mise au travail. Mais au fond, ces situations apparaissaient être une réponse satisfaisante aux ajustements conjoncturels du marché du travail, voire un choix pour le travailleur. L’idée de la spirale vertueuse de l’emploi, qui n’envisage la relation atypique de travail que comme une étape est encore manifeste dans notre droit légiféré. Elle semble en ce sens avoir guidé les politiques d’emploi. Un auteur a ainsi fait ressortir que le but ultime des politiques d’emploi est l’accès au contrat de travail, la référence au droit commun du contrat à durée indéterminée étant essentielle.1801
Cette observation marque aussi, et plus substantiellement, un renversement dans l’approche de ces situations atypiques de travail parce que ces situations semblent désormais structurer le marché du travail. Dès lors que le phare de l’emploi ne rayonne plus si loin, sa portée réduite fait sortir de l’ombre des états de mise au travail qui sont autant d’atteintes à la compréhension de la notion d’emploi. Aussi si l’on accepte le postulat selon lequel l’emploi est un objet juridiquement construit dans l’entreprise autour du contrat de travail, il est patent que toute variation autour de l’entreprise et du contrat de travail porte atteinte à l’emploi. Il en est ainsi de situations juridiques particulières dans l’entreprise qui sans prendre l’emploi en référence se sont néanmoins construites à sa périphérie (Section 1) ; tel est encore le cas lorsque la mise au travail n’emporte plus d’intégration à l’entreprise (Section 2).
F. GAUDU, « Du statut de l’’emploi au statut de l’’actif », Dr. Soc. 1995, 535.