Paragraphe II : Le temps partiel, atteinte quantitative à l’emploi

Conformément à la définition légale de l’emploi, on a pu affirmer que la permanence est le critère objectif de la qualification « emploi ». D’autres auteurs ont remarqué que la catégorie « contrat atypique » repose sur la durée limitée du contrat.1874 Tel n’est pas spécifiquement le cas du temps partiel même si le contrat à durée déterminée peut supporter une quantité réduite de temps de travail. En effet, si le travail à temps partiel est classé parmi les contrats atypiques c’est parce que le temps de travail dans le contrat est limité.1875

Ainsi, si l’on admet que la permanence est un attribut de l’emploi (caractère qualitatif), il apparaît que le temps complet de travail serait un élément de la construction du paradigme de l’emploi (caractère quantitatif).1876 Cette remarque ne précise cependant pas en quoi l’idée de temps partiel remet en cause l’emploi, en tout cas du statut qu’il porte, et donc en quoi il altère l’idée de protection de l’emploi. Ainsi, Monsieur Gaudu fait remarquer que si l’idée d’atteinte à l’emploi peut se justifier par la précarité économique liée à une rémunération nécessairement moins importante ou bien par une moindre intégration à la collectivité de travail, il observe que sur le terrain où la notion de précarité de l’emploi trouve un sens juridique, celui du droit à la poursuite de l’exécution d’un contrat successif, cette situation de temps partiel n’est pas plus précaire que celle du salarié à temps plein.1877 La précarité ne trouve pas, non plus, d’expression directe dans une approche plus étroite de l’emploi au regard des conséquences de droit induites. Le temps partiel ne révèle pas, a priori, d’atteinte au statut de l’emploi. En effet, le régime juridique du temps partiel semble fondé sur un principe de strict proportionnalité des droits, n’évinçant pas, de surcroît, le régime protecteur né de la remise en cause de l’emploi. Pourtant, une étude attentive du dispositif tend à mettre en évidence quelques brèches confirmant l’idée de précarité attachée à cette forme de travail et révélant surtout des obligations plus contraignantes, marques d’une flexibilité accrue.1878 Liminairement, un rapide aperçu de la situation du temps partiel se montre d’un intérêt particulier pour mesurer la portée de cette forme de dégradation de l’emploi.

Notes
1874.

J. PELISSIER, « La relation de travail atypique », Dr. Soc. 1985, 531.

1875.

La notion d’’horaire à temps partiel ou de salarié à temps partiel doit s’’apprécier soit par rapport à l’’horaire hebdomadaire de travail dans l’’entreprise (pour la qualification horaire à temps partiel), la qualité de salarié à temps partiel s’’appréciant, quant à elle, sur un cadre plus large, le mois ou bien l’’année.

Le Code du travail donne en effet deux définitions ; l’’une concerne les horaires à temps partiel, l’’autre les salariés à temps partiel. Aux termes de l’’article L. 21242 « sont considérés comme horaires à temps partiel les horaires inférieurs d’ ' au moins un cinquième à la durée légale du travail ou à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’ ' entreprise.

Sont considérés comme salariés à temps partiel les salariés dont la durée de travail mensuelle est inférieure d’'au moins un cinquième à celle qui résulte de l’'application, sur cette même période, de la durée légale du travail ou de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’'entreprise.

Sont également considérés comme salariés à temps partiel les salariés occupés selon une alternance de périodes travaillées et non travaillées dont la durée de travail annuelle est inférieure d’'au moins un cinquième à celle qui résulte de l’'application sur cette même période de la durée légale du travail ou de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’'entreprise diminuée des heures correspondant aux jours de congés légaux ou conventionnels. »

1876.

Notamment H. PUEL, « Il y a emploi et emploi », Travail et Emploi n°44, p. 17 ; supra n°64 et suiv.

1877.

F. GAUDU, L’ ' emploi dans l’ ' entreprise privée, essai d’ ' une théorie juridique, Thèse 1986, n°174 et suiv.

1878.

La loi n°98461 du 13 juin 1998, relative à la réduction du temps de travail tente d’en réduire les effets. Spécialement articles 10 et suiv.