6.3.2.2.1. Mécanismes de transfert

1. Importation :

1.1. Régionalismes lexicaux :

Le corpus fourni par Dauzat laisse apparaître quelques correspondances phonétiques et morphologiques :

R1a. Saintongeais [wé] = fr. [wa] : ex. sain-boué n. m. “garou (arbrisseau = daphne gnidium)” > sain-bois.

R2a. Suffixe saintongeais [-jo] = fr. [-o] : ex. sauteriau n. m. “sauterelle” > sautereau.

R3a. Suffixe saintongeais [-â] = fr. [-o] : ex. sétâ n. m. “petite sole” > sétot (“la finale -a [...] est l’ancienne forme dialectale de la région pour le suffixe -ellum”, Dauzat 1946b, 153).

Le corpus est cependant trop limité pour fournir plus de renseignements sur d’autres correspondances (voir cependant les renseignements que fournit Dauzat 1946b, 146-149 à ce sujet dans ses considérations générales). En fait, le mécanisme de transfert privilégié par la majorité des emprunts consiste en notre type 1, c’est-à-dire que le mot se retrouve sous forme invariante en patois et en français régional : ex. basse n. f. “cuvier de bois” > basse ; bassiot n. m. “panier de bois” > bassiau 228; grippet n. m. “ratière en fil de fer” > gripet ; amieller v. tr. “amadouer” > amieller ; loubier n. m. “vasistas” > loubier ; etc.

En ce qui concerne le corpus normand, on trouve également quelques règles de correspondances phonétiques et morphologiques, qui touchent plus d’éléments que dans le corpus saintongeais, ce qui suggère une plus grande originalité des parlers normands :

R1b. Normand [+] = fr. [s] : ex. adrèche n. f. “raccourci” > adresse, bachin n. m. “petite poèle” > bassin.

R2b. Norm. [k] = fr. [+] : ex. cat = chat, , pouque “sac” = fr. poche, vaque = vache.

R3b. Norm. [è] = fr. [wa] : ex. bère n. m. “cidre” > boire.

R4. Suffixe d’infinitif normand -ié(i) = fr. -er : ex. calengié v. “débattre le prix de quelque chose, marchander” > calenger ; décachie, décachiei v. tr. “expulser (quelqu’un)” > décacher.

Etc.

Cependant, comme en Saintonge, l’importation sous forme invariante est un procédé commun : ex. déchiboler v. tr. “porter d’un endroit à un autre”, étrain n. m. “paille”, gouspin n. m. “petit polisson”, écocher v. tr. “écraser”, etc.

Notes
228.

Les différences graphiques entre patois et français correspondent à des traditions différentes chez Musset et Dauzat, ce dernier conformant sa graphie à l’étymologie.