Sous-section 2 : La police des “banlieues”864

La traduction en France du ”Community policing” est la police de proximité. La mise en place d’une sécurité urbaine emprunte ici la démarche anglo-saxonne de “discrimination positive“ : il s’agit d’une sécurité publique territorialisée, c’est-à-dire adaptée à une population différenciée selon l’origine sociale voire implicitement ethnique des individus. La tentative de transposition du modèle anglais est plus connu sous le nom d’ “îlotage”, ou encore plus récemment, de “police de proximité”, modèle inscrit dans la loi du 21 janvier 1995 relative à la sécurité.

La police de proximité rencontre certaines limites car elle heurte la tradition républicaine de citoyenneté affirmée et protégée par certains principes et textes constitutionnels865. La gravité du problème de sécurité urbaine conduit toutefois à un assouplissement de ces principes. Il nous semble, sans doute de par la formation historique de la police française, que la problématique de la sécurité urbaine demeure, pour l’essentiel, saisie à travers les termes d’ “ordre public” et de “criminalité urbaine”, ce qui limite d’autant, comme nous allons le voir, la transposition en France du modèle de police anglais.

Cette appréhension de la spécificité de l’ordre urbain et de la criminalité urbaine866 s’opère en recourant aux notions d’ “ordre public” et de “criminalité”, notions qui attribuent aux services de l’Etat une compétence quasi-exclusive867. Ce schéma de l’action policière emprunte davantage ici une démarche consistant, selon un auteur, à contrôler les “classes dangereuses”868.

Le maintien de l’ordre stricto sensu se réfère à des cadres juridiques précis : les attroupements, les manifestations869, les réunions publiques. Ce n’est pas à ces cadres d’intervention du maintien de l’ordre870 que nous nous référons ici. Notre réflexion porte davantage sur la saisine juridique du phénomène dit de “violences urbaines”, qui s’exprime notamment par la mise en place ou la création d’unités ou de services de police spécialisés pour prévenir ces atteintes à l’ordre public urbain. C’est davantage l’institutionnalisation, qui trouve parfois une traduction dans des textes, de certains phénomènes liés, de près ou de loin, à ces territoires de relégation qu’il s’agit d’évoquer ici.

En France, l’échec partiel des politiques de prévention de la délinquance871 a conduit à une nouvelle centralisation de la politique de sécurité, au sein d’un cadre général qui est la politique de la ville. La politique de la ville traduit à l’heure actuelle une modalité de compréhension des violences ou désordres urbains.

La politique de sécurité urbaine s’inscrit dans ce cadre dont les dispositifs réglementaires sont placés sous l’autorité des préfets et des procureurs de la République. La loi d’orientation et de programmation du 21 janvier 1995, qui place le partenariat872 des acteurs locaux sous l’autorité des représentants de l’Etat, renforce l’administration centralisée des politiques de sécurité urbaine. Mais surtout l’article 3 de la loi de 1995 dispose : “Constituent des orientations permanentes de la politique de sécurité : l’extension à l’ensemble du territoire d’une police de proximité répondant aux attentes et aux besoins des personnes en matière de sécurité“. La police de proximité873 s’impose désormais, et la spécificité des territoires en question va imprimer une réorganisation des services de police dont l’objectif est de concilier l’impératif de sécurité avec la nécessité d’intégration des populations à protéger à travers une politique volontariste de la ville874. La sécurité-intégration doit dans ce schéma supplanter la sécurité-exclusion.

Au plan institutionnel, la police de proximité apparaît à travers la restructuration de la plupart des services de police spécialisés ayant en charge ce domaine de compétence. Tous les services de police nationale sont concernés par le phénomène dit de “violences urbaines”875. Nous voyons ainsi intervenir, à côté de la Sécurité Publique, des services de police non généralistes qui n’ont pas, en principe, vocation à intervenir en matière de prévention des “violences urbaines”. Ce sont les Compagnies Républicaines de Sécurité ou CRS, et les récentes Brigades Régionales d’Enquêtes et de Coordination ou BREC, et enfin dans une moindre mesure, le service des R.G, tous services qui opèrent respectivement dans le cadre de la dissuasion, de la répression, et enfin dans la collecte d’informations ou renseignements relatifs au phénomène actuel des violences urbaines876.

La Sécurité Publique, service généraliste de la Police Nationale, est le premier concerné par cette évolution de la délinquance urbaine. Les incidents violents qu’ont connus certaines villes ont modifié les modalités d’intervention des autorités publiques en charge de la sécurité. Dans ces “banlieues chaudes” note un rapport sénatorial, “un petit groupe de jeunes, d’ethnies différentes et diverses, recherchent le premier prétexte venu pour narguer puis provoquer de manière insistante les quelques effectifs de police, peu nombreux sur place“877

Cet état préoccupant de la situation de ces “zones de non droit” a conduit à renforcer le dispositif policier présent dans ces quartiers. Le directeur central de la sécurité publique a ainsi annoncé un plan de renforcement de l’équipement de la police des “quartiers sensibles”. Cela s’est notamment traduit par l’édiction de la circulaire du 31 octobre 1995 du ministre de l’Intérieur relative au renforcement de l’action de la police nationale dans la lutte contre les violences urbaines878. Ce texte vise à augmenter l’effectif policier et à doter les policiers qui interviennent dans ces quartiers sensibles d’armes et de moyens matériels spécifiques.

La Sécurité publique, confrontée au problème dit des “quartiers sensibles”, a ainsi vu son équipement renforcé, notamment par le port de gilets pare-balles plus légers que les gilets classiques, des véhicules plus puissants et les agents de police sont désormais dotés d’un armement nouveau, le fusil “flash balls”, tirant des projectiles en caoutchouc, mais dont l’usage toutefois est strictement limité à la légitime défense.

La Sécurité Publique a institué, au niveau local, un bureau de coordination de la lutte contre les violences urbaines, placé auprès du directeur départemental, qui réunit les représentants de la P.J, des R.G, de la DICCILEC et du groupement des CRS. La police urbaine a de plus développé, dans le cadre de certaines zones dites “sensibles“ c’est-à-dire marquées par un risque de violences urbaines879, des sûretés départementales. Ces sûretés sont venues renforcer le pôle répressif des polices urbaines, une mission “répressive” instituée pour lutter plus efficacement contre ce phénomène jugé préoccupant880. Il nous semble toutefois que la question des “violences urbaines” a conduit à établir une relation positive entre la population et sa police ainsi qu’entre les différents services de police. 

Pour ce qui est de la relation avec la population, à l’image des “officiers de liaison” anglais ont ainsi été institués des “Officiers de prévention”. Cette nouvelle structure est apparue en 1994 au sein des Directions Départementales de Sécurité Publique des Hauts de Seine881 et par la suite de la Moselle.

Ces fonctionnaires ont pour tâche de resserrer les liens avec les jeunes en difficulté tant dans leur quartier qu’au sein des établissements scolaires. Ce sont des agents spécialisés qui ont reçu une formation particulière pour acquérir des compétences professionnelles en matière de prévention. Leur implantation est répartie sur des quartiers ou cités jugés difficiles, elle est établie en fonction du taux de délinquance et du sentiment d’insécurité de la population882. L’Officier de prévention, représentant du chef de circonscription de police au plan local, peut orienter et coordonner l’activité des îlotiers bien qu’il ne possède pas juridiquement d’un pouvoir de commandement. Enfin, en tant que représentant de la Police Nationale, il participe aux actions multipartenariales de prévention de la délinquance au sein des instances locales que sont par exemple les CCPD883.

Plus généralement, la relation de la police avec le public s’inscrit dans la Circulaire du Premier ministre du 26 juillet 1995 sur la réforme de l’Etat et des services publics884. Dans ce cadre, le rapport Genthial de l’IGPN885 de juillet 1995 a ainsi conclu à la nécessité d’améliorer les relations du public avec les services de police. Selon ce rapport, l’action policière à l’égard du public doit retrouver une certaine crédibilité. La légitimité de la police doit s’établir sur une amélioration de son action auprès des usagers ainsi que par une aide et une protection efficace des victimes d’infractions, notamment en zones dites d’insécurité886 .

Pour ce qui est maintenant de la relation étroite qui s’est nouée entre les différents services de police, elle s’exprime à travers un assouplissement de l’action, tant horizontale que verticale, de ces services. Face au problème de la violence urbaine, un rapprochement entre les différents services de police s’est peu à peu révélé nécessaire. Nous pouvons l’observer à travers l’intervention des services de police plus spécialisés, notamment en matière de dissuasion et de répression887.

Pour ce qui est de la dissuasion, les Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS)888, ou forces civiles de l’ordre selon certains auteurs889, ont peu à peu investi l’espace urbain dans un cadre de mission qui est la prévention de la criminalité et de la délinquance. Cette mission est encore appelée, au terme de l’article 281-1 alinéa 2 de l’Arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d’emploi de la police nationale, une mission de sécurisation890

Une circulaire ministérielle définit les modalités d’emploi des CRS en missions de sécurisation effectuées conjointement avec les polices urbaines territorialement compétentes, en particulier dans les villes concernées par la délinquance et les violences urbaines891. La stratégie consiste à sécuriser la population résidente, selon un rapport d’étude892, par un déploiement visible et rassurant des forces de l’ordre. Parfois, les forces mobiles de gendarmerie sont présentes pour venir renforcer ce dispositif de sécurité, qui vise, dans son ensemble, selon les termes mêmes d’une circulaire ministérielle, à “sécuriser ces quartiers”893.

En ce qui concerne la “répression”, le phénomène dénommé “violences urbaines” a conduit, semble-t-il, à instituer des Brigades Régionales d’Enquêtes et de Coordination ou BREC. Si les Brigades de Recherche et d’Intervention (BRI) s’intéressent pour l’essentiel à la “petite et moyenne délinquance”, les BREC ont pour mission de combattre avec efficacité le phénomène de “violences urbaines”894.

Unités opérationnelles créées en 1991 au sein des SRPJ, les BREC adaptent les moyens et les méthodes de lutte contre le grand banditisme à ces territoires urbains. Cette nouvelle approche consiste à lutter contre la petite et moyenne délinquance par un recours aux méthodes qui ont fait leur preuve dans la lutte contre le grand banditisme. De ce fait, il s’agit d’identifier et de surveiller, au moyen par exemple de filatures, les “bandes” ou groupes organisés895, dans le but de réunir les preuves judiciaires d’activités criminelles. La célérité dans la recherche de preuves criminelles est facilité par la création, dans chaque département, d’une “police technique de proximité“896.

Ces activités délictuelles sont “réprimées” car elles prospèrent souvent à l’ombre ou tirent profit de la “pauvreté urbaine“ ou des problèmes sociaux des “cités”. La tâche essentielle de la BREC va donc être de repérer en amont les individus connus pour leur potentiel dangereux. Cela nécessite un recueil de renseignements et d’investigations relatives à certains individus, conditions préalables à toute action “répressive”. Elle intervient a priori, c’est-à-dire avant la consommation de l’infraction. La mission de prévention de la criminalité et de surveillance de certains groupes ou “bandes” assignée à la BREC apparaît ici essentielle. Elle est davantage mise en avant dans la pratique quotidienne de cette unité opérationnelle. 

Nous voyons dès lors l’importance de la diffusion du renseignement à travers tous les niveaux des services de police nationale mais également de la gendarmerie, également destinataire de ces informations recueillies par la BREC. Le problème de la violence urbaine fait aussi intervenir un service spécialisé dans le recueil de renseignement, à savoir le service des Renseignements Généraux ou RG.

Dans une circulaire du ministre de l’Intérieur en date de février 1991897, période au cours de laquelle se met progressivement en place une politique de la ville, le phénomène des “violences urbaines” mobilise les services des RG898. Ici la violence urbaine est définie et le plus souvent saisie comme le rejet des institutions, violence également qui semble mue par un esprit de représailles collectives.

La violence urbaine, terme nouveau selon les RG, signifie toute violence spécifique des jeunes qui agissent en groupe : vol en bande, affrontement interbandes ou encore attaques contre les policiers. Dans le cadre de la lutte contre ce phénomène, a été instituée au niveau du service central des RG, une section “violence urbaine” devenue par la suite “villes et banlieues”899. Se met ainsi en place, comme dans le cas anglais, une “cellule de veille”900, une “intelligence sociale” dans l’analyse et la connaissance de ce phénomène de “violences urbaines”, phénomène souvent difficile à prévoir et donc à en comprendre les vrais contours et la réalité. Pour cela, une échelle de gravité de la violence au quotidien dans les quartiers a été définie par les services des RG901. La mission “Villes et banlieues“ instituée en 1991 a pour but de prévenir les émeutes à travers une information par domaine : drogue, vie associative, vie religieuse, développement social des quartiers. Le critère de violence retenu, et sur lequel il faut ici insister, est l’atteinte à l’ordre public902. Six niveaux de violence ont ainsi été définis pour une police bien informée donc efficace903. La limite rencontrée ici par l’action policière, outre les difficultés majeures d’intervention policière dans ces “zones urbaines sensibles”904, semble s’expliquer par la compréhension et la qualification juridique de ce phénomène.

Les catégories habituelles d’ ”ordre public” et d’ “infraction criminelle”, qui jusque là ont plus ou moins fait leur preuve, ne trouvent ici pas à s’appliquer de manière adéquate et satisfaisante. Cette difficulté ne conduit certes pas à affirmer la désuétude de ces catégories juridiques, mais elle met davantage en lumière l’application défectueuse qui est souvent faite de ces catégories à ces territoires spécifiques. C’est davantage la demande sociale de sécurité qui n’est pas prise en considération, et d’ailleurs peut-elle l’être à travers de telles catégories juridiques. La traduction juridique du phénomène de violence des “banlieues” ou des “inner-cities” permet un rapprochement des situations française et anglaise.

Aujourd’hui, il semble exister une police des territoires urbains, qui utilise, selon la tradition juridique propre à chacun de ces pays, le recours à des pouvoirs de maintien de l’ordre. 

En Angleterre le choix est fait en faveur d’unités de maintien de l’ordre composées d’agents non spécialisés, mais ces policiers ordinaires reçoivent une formation et un équipement “ anti-émeutes ” adéquat pour faire face aux événements.

En France, ce sont deux forces spécialisées et permanentes de maintien de l’ordre, l’une à statut militaire (gendarmerie mobile) et l’autre statut civil (CRS). Dans les deux pays, la priorité accordée à l’ordre public renforce la centralisation de l’usage des forces de police dans le cadre du maintien de l’ordre urbain.

Cette police des zones urbaines de relégation fonde davantage son action sur une institutionnalisation de la recherche d’informations relatives à ces territoires qu’à une compréhension réelle de ce phénomène dénommé “violences urbaines”. Ainsi, quelle que soit l’organisation territoriale des polices, la demande sociale de sécurité ne semble pas trouver un réel écho institutionnel : la solution actuelle semble une maîtrise et une prévention de ces phénomènes urbains. Il s’agit au fond de contenir ce phénomène pour éviter sa propagation à d’autres territoires jusque là épargnés.

Cette réponse aux violences urbaines, de par le recours fréquent à la force, ne peut que renforcer les forces de l’ordre au sens général du terme. L’action policière emprunte en effet ici un vocabulaire juridique qui globalement renforce les services de police marqués par la priorité étatique absolue et unilatérale de maintien de l’ordre public et de lutte contre la grande criminalité. Mais l’usage de la force est délicat en situation de tension ou de crise urbaine. De plus, et l’exemple anglais est à cet égard assez instructif, concilier la prévention dans un cadre de rapprochement avec les jeunes issus des minorités, et mener à la fois une action répressive, parfois à l’encontre des mêmes groupes de personnes, conduit à se demander si la fonction policière, dans ces territoires urbains, n’est pas quelque peu devenue “schizophrénique”905. Ce ne sont donc pas, nous semble-t-il, la loi et l’ordre, pour reprendre les principes d’action de la police anglaise, qui sont en soi à critiquer et encore moins à rejeter, mais davantage leur application inadéquate à ces territoires urbains spécifiques voire même, selon le terme d’un auteur criminologue, à ces “ghettos”906. A l’analyse, ces territoires semblent davantage des zones “sur-administrées” que plutôt, selon le terme consacré de “zones de non-droit”. 

Ce discours ne se reflète pas dans la réalité qui laisse plutôt entrevoir une présence renforcée des services de l’Etat907, notamment des forces de sécurité, et l’évolution actuelle ne semble pas démentir un tel constat, en particulier par un renforcement des effectifs de la police et la mise en place, comme en France, de services urbains, en particulier de gendarmerie, spécialisés en matière de délinquance juvénile908

La qualification juridique de ces “violences urbaines” a des conséquences importantes sur l’étendue des compétences policières. Le choix des catégories juridiques pour appréhender un tel phénomène semble ainsi déterminant.

Nous pouvons établir un constat assez proche quant à la difficulté d’exercer certains pouvoirs de police, en particulier celui concernant le pouvoir de contrôle des personnes.

Notes
864.

Ces termes de “police des banlieues” sont repris d’un rapport du Syndicat des commissaires, SCHFPN, “La police face à la crise des banlieues“, Supplément à la Tribune du commissaire de police, n° 52,  mai 1991, p. 37, qui souhaite “un plan d’urgence pour la police des banlieues“.

865.

La finalité du pouvoir républicain est en effet, depuis 1789, la protection de l’individu, V. à ce sujet Ch. Vimbert, La tradition républicaine en droit public français, Préf. E. Picard, Biblio. const. et de sc. pol., tome 72, PUR- LGDJ, Paris-Rouen, 1992, p. 137.

866.

La spécificité de ces territoires apparaît dans l’avantage octroyé aux fonctionnaires de l’Etat, et en particulier ici aux fonctionnaires de police, V Décret n. 95-313 du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l’avantage spécifique d’ancienneté accordés à certains agents de l’Etat affectés dans des quartiers urbains particulièrement difficiles, JO du 23 mars 1995, p. 4643.

867.

Cette hypothèse générale se dégage à la lecture du Rapport de la commission de contrôle Sénat, n°347, 153 p, Rapport précité et sur lequel nous nous appuyons ici pour notre analyse.

868.

J.C. Monet, op. cit. Ce qui relativise le choix des cibles de l’action de la police française selon les époques historiques : du contrôle des “vagabonds”, des “filles de mauvaise vie”, à la “classe ouvrière”, à, de nos jours, les “communautés immigrées ou étrangères” ou jeunes d’apparence non-européenne, au sens très large.

869.

V. par ex. Art.16 de la loi du 21 janv. 1995 relative à la sécurité qui insère un article 2 bis dans le Décret du 23 octobre 1935 permettant au préfet d’interdire le port ou le transport sans motif légitime d’objets pouvant constituer une arme au sens de l’article 132-75 du Code pénal dans les cas où les circonstances font craindre des troubles graves à l’ordre public. D’autres moyens préventifs existent pour éviter une atteinte à l’ordre public provoquée par une manifestation : contrôle d’identité (art. 78-2 al 3 CPP), et l’utilisation des appareils photographiques et de vidéo (art. 10 de la loi du 21 janvier 1995) qui peuvent constituer des preuves versées aux dossiers (art. 353, 427 et 536 CPP).

870.

En ce sens V. A. Decocq et alii, op. cit., p. 377 et s.

871.

En ce sens, V. G. di Marino, “La nouvelle politique française de prévention de la criminalité”, Rapport de synthèse, XXVII ème Congrès de l’Association française de criminologie, JCP, 13 nov.1991, ed. G, n°46, I, 3535, pp 343-350.

872.

Pour le sens attribué à ce terme, Voir V. Hémery, art. cit., p. 355.

873.

Pour l’évolution de cette notion, V. J. P. Espinas, La police de proximité, Mémoire DESS Droit et politique de la sécurité, ENSP-Université Lyon III, 1996, pp 3-10.

874.

La politique actuelle de la sécurité urbaine est à inclure dans les lois successives relatives à la ville : la loi Besson de 1990 sur le logement, la loi d’orientation sur la ville de 1991 ou LOV sur la mixité de l’espace urbain et enfin récemment la loi de 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville. V. en ce sens E. Deschamps, op. cit.

875.

Cette question des “violences urbaines” est d’actualité : l’année 1991, a connu des violences à Sartrouville, Vaulx-en-Velin, Argenteuil, Les Ulis, Saint-Etienne, Mantes, Marseille et Toulouse. La violence urbaine a ainsi augmenté de 87, 65 % en 40 mois, les départements d’Ile de France sont les plus exposés : 22 d’entre eux concentrent 92 % des incidents. V. à ce sujet le rapport SCHFPN précité.

876.

A l’heure actuelle, cette politique est précisée dans la Circulaire du ministre de l’Intérieur du 11 mars 1998 adressée aux préfets et relative à la lutte contre les violences urbaines, circulaire dont la lecture est accessible sur le site Internet du Ministère de l’Intérieur.

877.

Rapport du Sénat n° 347 précité, p. 53.

878.

Circulaire du 31 oct. 1995 relative au renforcement de l’action de la police nationale dans la lutte contre les violences urbaines, BOMI, 4ème trim. 1995, pp 71-74. Au niveau central existe une cellule de centralisation et d’évaluation du renseignement relatif au phénomène urbain, cellule qui est placée auprès du Directeur général de la police nationale.

879.

En ce sens, V. L. Rudolph, “Sécurité publique et violences urbaines“, Rev. adm., n ° 302, mars-avril 1998, pp 340-343

880.

La Sécurité Publique connaît des restructurations importantes : Arrêté interministériel du 23 déc. 1993 relatif à l’organisation et aux missions de la direction centrale de la Sécurité publique, JO du 29 déc. 1994, p. 18333. Ce service a vu sa mission “répressive” renforcée dans les départements où le phénomène des “violences urbaines” est jugé préoccupant (Alpes-Maritimes, Bouches du Rhône, Nord, Rhône, Seine et Marne et Réunion), V. Décret n. 96-48 du 22 janv. 1996 portant création de sûretés départementales au sein des directions départementales de la sécurité publique, JO du 24 janv. 1996, p. 1163

881.

V. Note de service de DDSP / DPS n° 94 -7038 du 22 septembre 1994 et 94/ 9420 du 16 décembre 1994 citées par O. Haussaire, Les dispositifs institutionnels et les mesures partenariales de prévention à l’égard des jeunes des cités et quartiers sensibles, Mémoire DESS Droit et politique de la sécurité, ENSP- Université Lyon III, 1996, p. 31. C’est ainsi que 22 emplois de gradés ont à cet effet été créés .

882.

“Caractérisée par un suivi personnalisé de certains publics, écrit un auteur, la tâche de l’officier de prévention est essentiellement axée vers les jeunes en difficulté. Il doit jouer un rôle fédérateur et médiateur et son objectif est de tenter de débloquer des situations qui n’ont pas encore un caractère pénal“. Ibid., p. 31.

883.

Le régime des Conseils Communaux de Prévention de la Délinquance a été précisé par le Décret n° 92-343 du 1er avril 1992. Il faut noter que la suppression au niveau national du CNPD a été remplacé par la Délégation Interministérielle à la Ville ou DIV, sans mettre fin à l’existence des CCPD, et au niveau départemental, des CDPD.

884.

JO du 28 juillet 1995.

885.

Rapport intitulé de manière significative “La qualité des relations entre la police et la population”, Ministère de l’Intérieur, IGPN, juin 1995, 35 p.

886.

V. Instruction ministérielle du 22 décembre 1995 pour une action plus soutenue de la Police Nationale auprès des usagers et des victimes d’infractions .V. J. P. Espinas, op. cit., p. 6 et p. 30.

887.

Cette nécessaire réforme institutionnelle face à ces violences urbaines est une question centrale soulevée dans le rapport sénatorial n° 347 précité.

888.

V. pour un historique de leur statut général, V. D.G. Lavroff, “Les compagnies républicaines de sécurité”, S. 1959, Chr. 53.

889.

A. de Laubadère et alii, op. cit., p. 193, n. 207.

890.

JO du 4 septembre 1996.

891.

Circulaire n°94-283 du 28 octobre 1994 du ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et de l’aménagement du territoire relative aux modalités d’emploi des Compagnies Républicaines de Sécurité dans le cadre de la lutte contre la délinquance et les violences urbaines, complétée par la Circulaire n°95-03 du 3 janv.1995 relative aux modalités d’emploi de CRS en mission de sécurisation, BOMI, 1er trim.1995, pp 586-587

892.

S. Tiévant, J.P. Robert, La mission de sécurisation des CRS, IHESI, 1991.

893.

V. Circulaire du 30 janv. 1990 relative aux relations entre les services de police et de gendarmerie, BOMI, janv.-fév. 1990, p. 357 qui institue une fiche de “répartition territoriale des tâches de sécurité publique” ; V. égal. Circulaire du 6 juil.1992 relative à l’ Instruction commune d’emploi des forces mobiles de la police nationales et de la gendarmerie nationale, BOMI, 3ème trim., 1992, p. 241. L’Art. 27 de ladite Instruction dispose : “il convient de privilégier, autant que possible, l’emploi des Compagnies républicaines de sécurité dans les zones où le régime de la police d’Etat est institué, et celui des escadrons de gendarmerie mobile en dehors de ces zones”. L’Art. 42 a institué un Bureau “Ordre public“ commun à la DGPN et à la DGGN. Certes l’emploi de la gendarmerie mobile exige une procédure de réquisition, mais notons toutefois cette remarque pertinente de M. Le Colonel Y. Barde, “Le maintien de l’ordre”, Rev. d’ét. info. gend. nat, n°174, juil.-sept. 1994, p. 39, “La procédure de réquisition contraignante dans son application (sommations, présence de l’OPJ) est mal adaptée aux interventions dans les milieux urbains”. Nous voyons que la gendarmerie mobile voit à terme sa mission de maintien de l’ordre urbain repréciser, en des règles adaptées à ce phénomène dit de “violences urbaines”.

894.

F. Jaspart, “La Brigade Régionale d’Enquêtes et de coordination (BREC)”, Rev. d’ét. info. gend. nat., 4ème Trim., n°179, 1995, pp 41-43. Pour éviter un double emploi, l’unification des statuts des BRI et BREC semblent en cours. Notons enfin que des Brigades anticriminalité ou BAC de jour (sur une plage horaire s’étendant de 13h15 à 4h40) ont été récemment créées. Leur objectif, précise une réponse ministérielle, est “l’intensification de la lutte contre la délinquance urbaine aussi bien dans le centre des villes que dans les banlieues ou quartiers les plus exposés”, JO Questions / Réponses Sénat, JO du 20 juin 1996, p. 1531.

895.

“L’élément rassembleur de ces bandes est constitué par le “bain culturel” de leur quartier, de leur grand ensemble“, ou “au sein de ces bandes souvent composées d’individus de race noire avec une forte minorité de maghrébins mais qui en tout état de cause ont une cohésion ethnique et une identité de quartier“, ou encore “les bandes qui se sont constituées depuis quelques années (comparées aux anciens “blousons noirs“ ) sont plus violentes et ont une base ethnique“, note le rapport SCHFPN, resp. p. 23 A, et p. 14.

896.

V. à ce sujet V. l’Instruction ministérielle du 13 octobre 1995 relative à la police technique de proximité. V. J.P. Espinas, op. cit., p. 31.

897.

Circulaire du 28 fév.1991 relative à la direction centrale des renseignements généraux: missions, méthodes et déontologie, BOMI, 1er trim.1991.Circulaire où est souligné l’effort qui reste à accomplir par la direction en matière de problème de la violence urbaine. Cette dernière notion s’applique en fait à une population bien particulière. Ainsi la cellule “Violence politique” a été remplacée par “Contestation et violence” et celle des “Etrangers” par “Etrangers et minorités”. A ce sujet voir le rapport sénatorial n° 347 de 1990-1991 précité, p. 72.Il est également assez significatif que la CNIL ait autorisé, dans son rapport annuel du 7 juillet 1997, les RG de la Préfecture de Police de Paris à inscrire dans leur fichier sur les violences urbaines, baptisé Gestion des violences ou GEVI, la couleur de peau des individus impliqués dans ce type de violence.

898.

Cette priorité des R.G est davantage réaffirmée par la Circulaire du 11 mars 1998 précitée: “les services de renseignements généraux développeront leurs activités sur les villes et les quartiers objets de violences urbaines“. En effet, note la Circulaire, dans les quartiers sensibles recensés par la DCRG, (les violences urbaines) ont plus que quadruplé de 1993 à 1997”.

899.

V. Circulaire du 3 janvier 1995 relative aux missions des renseignements généraux précitée.

900.

Une étude conclut ainsi à la mise en place d’une “cellule de veille” pour gérer au mieux et prévoir les flambées de violence, V. J.P. Gremy, Les violences urbaines : comment prévoir et gérer les crises dans les quartiers sensibles ?, IHESI, février 1995, 32 p.

901.

Pour la mise en place d’une échelle de la violence urbaine, V. L. Bui-Trong, “L’insécurité des quartiers sensibles : une échelle d’évaluation“, Les Cahiers de la sécurité intérieure, n° 14, août-septembre 1993, IHESI, pp 235-247.

902.

V. à ce sujet, Forum européen pour la sécurité urbaine, Polices d’Europe et sécurité urbaine, Saragosse 8-9 février 1996, Paris, 1996.

903.

Niveau 1 : bandes informelles, pas de connotation anti-institutionnelle ; niveau 2 : violence à connotation anti-institutionnelle (matériels ou biens publics...) ; niveau 3 : violence visant les personnes ; niveau 4 : attaque contre la police ; niveau 5 : attroupement, violence des jeunes contre la police ; enfin niveau 6 : violence programmée contre la police (provocation, guet-apens...). Ces différents niveaux de violence sont le plus souvent cumulatifs .

904.

Nous empruntons ici les termes contenus dans la Circulaire Crim. 96-05 ES/ 190396 du ministre de la Justice et relative à la politique judiciaire de la ville, BOMJ, n°61, 1996, p. 120.

905.

R. Ottenhof, “L’intifada des banlieues”, RSC, n°3, juil.sept.1991, p. 646. Le titre de cette chronique criminologique est tiré du rapport du SCHFPN précité. Déjà un rapport sénatorial évoquait à ce propos une “crise de la police“ V. Rapport fait au nom de la Commission de contrôle des services de l’ Etat chargés du maintien de la sécurité publique, créée en vertu de la résolution adoptée par le Sénat le 6 mai 1982, n° 85, 1ère Session ordinaire 1982-1983, Sénat, pp 25- 30. Plus récemment V. J.J. Gleizal, “Chronique de police“, RSC 1996, n° 10 -12, p. 954.

906.

R. Ottenhof, art. cit., p. 646. Ce terme ne semble pas exagéré car l’idée fondamentale qui sous-tend la construction du concept opérationnel de “police de proximité” est de mettre un frein à une évolution jugée préoccupante ou du moins de maîtriser une tendance lourde de conséquence : la “ghettoïsation” de certains territoires d’action policière. V. à ce sujet le rapport de 1991 du SCHFPN précité.

907.

Pour preuve, la Circulaire CRIM 96-14 E1 du 26 juin 1996 de la Chancellerie et relative à la gestion des crises urbaine, BOMJ, n° 62, p. 92 qui observe que “Les quartiers dans lesquels surviennent des crises graves font généralement l’objet de contrats de ville, relèvent de la compétence de CCPD et l’intervention de l’Etat y est le plus souvent importante” et de conclure “il est pourtant trop rare que ce maillage permet d’anticiper sur une crise à venir“. Souligné par nous.

908.

Pour une présentation de ces brigades de prévention de la délinquance juvénile, Rev. gend. nat., n° 186, 4ème trimestre 1997, p. 11 et pp 13-15 .