Sous-section 2 : Le dispositif institutionnel

La préoccupation policière actuelle de lutte contre le racisme n’est pas nouvelle, c’est davantage la gravité de actes racistes et la situation, sans grand changement, des victimes qui semble expliquer une réaffirmation de cette nécessaire protection des minorités. Toutefois, le problème latent d’une faible confiance dans la protection qui leur est apportée par la police demeure.

Le rapport ministériel de 1981 précité a suggéré la création d’unités spéciales de lutte contre les attaques racistes (Special police squads)1437 pour mieux répondre aux demandes de protection policière émanant pour l’essentiel des minorités. La création d’officiers de police spécialisés dans la recherche et la poursuite de telles infractions est également soulignée, quoiqu’avec une certaine réticence, par les auteurs du rapport. Cette spécialisation de certains emplois de police risque à terme de se traduire par la nécessité de définir une incrimination spécifique dont l’objet est en fait de protéger les personnes issues des minorités ethniques1438.

En 1986, la commission parlementaire des relations raciales et de l’immigration recommande une coordination nationale des forces et autorités de police ainsi qu’une approche globale par des organes spécialement institués pour combattre les attaques et harcèlements à caractère raciste1439. Cette volonté des pouvoirs publics va se traduire par la mise en place d’un groupe d’étude et de réflexion dont la fonction consiste à centraliser toutes les données et informations relatives à ce phénomène jugé préoccupant, il s’agit de l’Inter-Departmental Racial Attacks Group 1440. Dans son rapport de 1991, ce groupe constate que la réponse policière face aux attaques racistes s’opère désormais, dans la plupart des forces de police, sous la direction et la responsabilité d’officiers supérieurs de la police1441.

Ces attaques sont devenues fort préoccupantes, en particulier dans l’Est londonien1442. En 1990, un document de la police métropolitaine, intitulé “Working together for Racial Harmony ”, fait la recommandation suivante : “tous incidents à connotation raciste doivent faire l’objet d’une enquête sérieuse et profonde afin d’obtenir le maximum d’information pour prévenir efficacement de tels actes“1443. La recherche de ces infractions, dont les victimes sont pour l’essentiel les Asiatiques et les Afro-antillais, est ici adaptée aux différents lieux de commission de celles-ci : domicile, arrêt de bus, sur la voie publique, voire sur les lieux de travail.

La police se saisit de ce phénomène d’actes ou d’attaques à connotation raciste en distinguant plusieurs catégories d’infractions, pour la plupart déjà prévues dans la loi de 1986 sur l’Ordre Public, loi que nous allons voir plus en détail par la suite.

Les actes à caractère raciste (Racial incidents) sont enregistrés par la police dans sept catégories, relève une étude soumise à la Commission des affaires intérieures du Parlement1444 : la violence ou l’atteinte physique sur la personne d’autrui (Violence against the person), qui comprend une blessure corporelle simple ou grave (Wounding or inflicting grievous bodily harm), l’attaque qui occasionne sur le moment une blessure corporelle (assault occasioning actual bodily harm) ; un dommage qualifié de criminel ou d’écrits qui prennent la forme de slogan à connotation raciale (criminal damage or slogan-writing) ; incitation à la haine raciale ; comportement ou langage extrêmes ou abusifs (abusive language or behaviour) ; atteintes sans gravité à la personne d’autrui (less serious forms of assaults) ; conflits simples (infractions qui souvent relèvent du droit civil telles le refus de fournir un bien ou un service et plus généralement les pratiques discriminatoires)1445. La majorité des actes racistes relevés par la police sont des dommages à caractère criminel (Criminal damage), ensuite viennent les langages ou propos racistes (Abusive language ) et les violences contre la personne (Violence against the person)1446.

La police métropolitaine a, en avril 1997, mis en place un système de traitement des atteintes à caractère raciste (Crime Report Information System), pour consolider l’enregistrement et les plaintes relatives à ces actes. Une relation particulière s’est également nouée entre la police et le CPS pour suivre l’évolution et améliorer la lutte contre le racisme considéré comme une atteinte à la société1447.

La section 95 de la loi de 1991 sur la Justice Criminelle (Criminal Justice Act 1991) exige du ministre de l’Intérieur la publication de certaines informations qui permettent aux autorités compétentes en matière criminelle de lutter plus efficacement contre la discrimination. Cette exigence légale va conduire le ministère de l’Intérieur à mettre en place des organes dont la tâche consiste à remplir une telle fonction au profit du système de justice criminelle.

En juillet 1991, a été instituée une unité spécialisée au sein du ministère de l’Intérieur, l’Unité d’enquête contre les actes à connotation raciale (Racial Incidents Investigations Unit ou RIIU), dans le but de réorganiser la réponse policière face aux attaques racistes1448.

Plus généralement, le débat récurrent portant sur une justice criminelle jugée discriminatoire (debate on race and crime), et une police qui prend pour cible prioritaire une certaine frange de la population, a fait naître un souci de protection des minorités, notamment dans leur relation avec l’institution policière. Le concept de sur-représentation (the concept of ‘over-representation’) des minorités au sein du système pénal et la nécessité actuelle d’un traitement policier équitable et non-discriminatoire, fondent pour l’essentiel la mise en place de données statistiques policières qui intègrent le critère ethnique et / ou racial. C’est davantage une protection contre des allégations de racisme qui est alors recherchée, et ce en particulier dans le cadre de l’exercice de certains pouvoirs de police considérés comme sensibles (Stop and Search, Arrest without warrant).

En mars 1995, le ministère de l’Intérieur annonce aux responsables de police, par instruction interne des services, la création prochaine d’un système national d’information et de suivi des données relatives à l’origine ethnique ou raciale des suspects et des auteurs présumés d’infraction.  Le ministre enjoint aux forces de police de mettre en place, au niveau local, un tel système d’information qui prenne en considération l’origine raciale ou ethnique des personnes soumises au pouvoir de la police. Ce système d’information est censé couvrir les faits survenus à compter d’avril 1996. En 1997, cette volonté ministérielle se traduit par l’institution du National system of ethnic monitoring 1449. Ce système vise à dissuader toute allégation d’un comportement raciste de la part de la police lorsqu’elle agit à l’égard des minorités ethniques.

Par ces deux organes, le Racial Incidents Investigations Unit et le National system of ethnic monitoring, nous voyons l’importance accordée par la police aux atteintes à la personne motivées par le racisme et, par conséquent, la protection accordée aux victimes issues en majorité des minorités ethniques.

Tout l’intérêt et l’efficacité que peuvent apporter ces qualifications policières pour appréhender certains actes racistes, ainsi que le système d’information sophistiqué pour saisir au mieux ce phénomène inquiétant, les atteintes à l’intégrité physique ne peuvent toutefois se limiter à ce seul cadre de réflexion.

Des auteurs soulignent fort justement que, “les injures et les violences à connotation raciale ne se limitent pas à la seule atteinte à l’intégrité physique et à la dignité de la personne victime ; non plus au seul fait que ces actes tendent à créer un climat d’angoisse et d’intimidation ; ils expriment davantage et diffusent le message suivant à savoir que les distinctions raciales sont en fait des distinctions fondées sur la dignité, le respect et la citoyenneté. Les victimes potentielles de ces actes et les auteurs présumés de ces infractions raciales comprennent en tout cas qu’un tel message est véhiculé implicitement à travers les attaques racistes, et que dès lors, de la nature et de la qualité des réponses institutionnelles face à ce phénomène social, va dépendre la cohésion de la communauté nationale“1450

Une telle approche est notamment présente dans les différents rapports de la Commission pour l’égalité raciale, dont il faut à présent évoquer le contenu. Ces rapports ont en effet une incidence sur les projets gouvernementaux ou les propositions parlementaires de lutte contre la violence raciale.

La Commission pour l’égalité raciale (Commission for Racial Equality ou CRE) a été créée par la loi de 1976 sur les relations raciales. Dans son programme 1995-1999, la CRE continue à considérer l’importance et l’effectivité des politiques menées par les autorités et forces de police, ainsi que les procédures et les pratiques qui doivent s’attacher à lutter contre les attaques à caractère racial et les organisations qui prônent la discrimination et la haine raciales1451. Il s’agit de présenter, de manière succincte, le statut de la Commission pour saisir son rôle en matière de protection contre toute forme de discrimination et de lutte contre le racisme, c’est-à-dire en pratique des minorités raciales ou ethniques1452.

Le statut de la Commission pour l’égalité raciale (CRE) prévoit que son financement provient pour une large part du ministère de l’Intérieur, tout en précisant cependant que la Commission exerce les fonctions qui lui sont dévolues en toute indépendance, en particulier à l’égard du gouvernement. Les commissaires, qui la composent, sont nommés par le ministre de l’Intérieur ; ils représentent et ont le soutien de tout l’échiquier politique du pays.

La CRE remplit trois fonctions : éliminer la discrimination raciale et promouvoir l’égalité des chances ou l’équité ; encourager et maintenir de bonnes relations entre des populations de différentes origines ethniques ou raciales ; et enfin évaluer l’application de la loi de 1976 sur les relations entre les races (Race Relations Act 1976 ) et proposer, si nécessaire, des modifications voire des réformes profondes de la législation.

Pour ce faire, lui sont attribuées des compétences pour conduire et mener à bien ses investigations au sein d’entreprises ou d’organisations économiques et industrielles, ainsi que pour l’exercice de son pouvoir d’engager des actions en justice dans certaines affaires au nom de la Commission. Elle assiste aussi les personnes qui désirent porter plainte pour discrimination raciale devant les cours et les tribunaux du travail (industrial tribunals) ou encore devant les tribunaux répressifs. 

Il faut relever que la Commission n’est pas compétente à l’égard des services qui exercent des pouvoirs de puissance publique, tels que le fisc ou les services d’immigration. La Chambre des Lords a, dans un arrêt rendu en 1983, l’arrêt R. v. Entry Clearance Officer ex parte Amin 1453, jugé que la loi de 1976 s’applique aux seuls services publics qui exercent des fonctions identiques ou entrant dans le cadre des fonctions attribuées à des organes privés : les services ou organes auxquels sont attribuées des prérogatives de puissance publique se voient exclus du champ d’application du Race Relations Act 1976. Dans le domaine du droit des étrangers, il semble qu’il y ait un risque qu’une contradiction avec les droits de l’homme en droit international ou conventionnel apparaisse. En ce sens, des réformes profondes de la loi de 1976 sont à prévoir 1454.

Les dispositions relatives aux compétences de la Commission sont contenues dans un Code qui vient définir les principes et les standards qui gouvernent les relations entre la Commission et les individus ou les entreprises. Ces derniers peuvent être l’objet d’enquêtes ou d’investigations, ou faire aussi l’objet de procédures engagées par la Commission. Ce Code recouvre deux types de pouvoirs importants : celui de conduire des enquêtes formelles, visant une personne nommée (named person investigation prévue à la s. 48 et 49 (4) de la loi de 1976) ou visant une activité ou encore un domaine d’activité général (general investigation prévue à la s. 48 et 49 (3) )1455.

Ce Code assure que la Commission ne doit dépenser son temps et n’utiliser ses ressources que dans la stricte nécessité et dans le seul objectif de remplir les obligations prévues par la loi ; elle ne doit pas user de ses pouvoirs exorbitants dans l’intention de nuire ou de manière vexatoire.

La Commission exerce également ses pouvoirs de contrôle de la législation antiraciste assez étroitement avec ceux de la police1456. La Commission, qui apparaît comme le porte-parole des groupes ethniques minoritaires1457, souligne, notamment dans un de ses documents, l’insuffisance de la législation et en définitive la faible protection qui leur est effectivement apportée1458

Dans un rapport établi en 19921459, la CRE souligne les disparités des législations européennes en matière de protection contre la discrimination raciale, lois qui ont une incidence sur l’action policière en matière de lutte contre le racisme.

Le Traité de Rome ne recouvre expressément pas la discrimination raciale mais la seule discrimination sexuelle, c’est-à-dire celle qui s’établit entre les hommes et les femmes  ; de plus la notion européenne de discrimination indirecte reçoit une interprétation quelque peu différente de celle de la loi de 1976 sur les relations entre les races. Dans ce domaine, la législation européenne anti-discriminatoire semble avoir une portée assez faible1460

La Convention européenne des droits de l’homme n’interdit pas, quant à elle, la discrimination raciale, mais prohibe l’exercice et la jouissance des droits proclamés sur des bases ou sur des considérations tenant par exemple à l’origine ethnique ou raciale des personnes. En ce sens, souligne le rapport, la loi anglaise de 1976 est dotée de moyens importants de protection, et sa mise en oeuvre par la Commission pour l’Egalité Raciale en fait une législation efficace incomparable, à ce jour, au niveau européen. Il paraît essentiel qu’aux membres des minorités ethniques établis en Grande-Bretagne, il ne leur soit pas dénié un traitement équitable lorsqu’ils désirent se déplacer sur le territoire de l’Union européenne. La liberté de circulation en Europe a peu de sens si elle n’est pas liée ou rattachée à la liberté et à la protection contre toute forme de discrimination raciale1461. Ce d’autant plus que la discrimination raciale ne s’exerce pas de manière ouverte mais tend, dans la pratique, à prendre des visages ou des apparences des plus subtiles1462.

Ainsi, il ne semble pas exister un cadre juridique communautaire de protection contre la discrimination raciale, si l’on compare cette protection avec celle affichée à travers l’affirmation et la reconnaissance par le droit européen d’une égalité entre les hommes et les femmes ; quant à la protection offerte par la Convention européenne des droits de l’homme, elle paraît avoir une portée limitée1463 .

La Commission pour l’Egalité Raciale est également à l’origine de certains projets de réforme des instruments juridiques de protection contre les violences raciales et détient à ce titre un pouvoir non négligeable en matière de lutte contre le racisme et la xénophobie, comme nous allons le voir par la suite.

A présent, voyons le rôle joué par la police française dans la lutte contre les attaques à caractère racial.

Notes
1437.

Report of a Home Office Study, “Racial Attacks“, 1981, op. cit., p. 20, n. 47.

1438.

“the suggestion that the police service should set up special squads, either in police forces themselves, or regionally, to deal with racial attacks, was not supported, either in general by the minority communities or by the police. Both sides were more concerned to see a generally improved response to the problems of racial violence and not to see them tricked away to be dealt with exclusively by specialists. However, it was suggested by some police officers that the investigation of alleged offences with racial connotations, and the follow up to those investigations, was best kept up to groups of officers within a force who could build up some experience of dealing with problems“, Ibid., p. 33, n. 78. (L’idée d’instituer au sein du Service de police, et également au sein des forces de police locales, ou encore à l’échelon régional, des unités spéciales de lutte contre les attaques racistes, ne trouve pas de soutien parmi les minorités ethniques en général et la police. Ils estiment tous deux que le problème de la violence raciale doit être appréhendé à travers une réponse globale et non sur la base d’un traitement opéré exclusivement par des spécialistes de la question. Toutefois, certains policiers relèvent, pour leur part, que l’enquête qui fait suite à la commission d’infractions à caractère racial et le déroulement de l’enquête, serait mieux assuréé par un groupe d’agents spécialisés et ayant acquis une certaine expérience pour traiter de ces problèmes).

1439.

Home Affairs Select committee on Race Relations and Immigration, V. B. Bowling, W. Saulsbury, “A multi-agency approach to racial harassment”, Research Bulletin, n° 32, Home Office, 1992, p. 34.

1440.

V. l’Inter-Departmental Racial Attacks Group a été crée suite au rapport parlementaire Third report from the Home Affairs Committee, “Racial attacks and harassment”, juillet 1986, précité.

1441.

“senior officers, in many cases of ACPO rank, have specific responsability for overseeing racial incidents and policies“, in The second Report of the Inter-Departmental Racial Attacks Group, Home Office, 1991, op. cit., p. 4. (Les officiers de rang supérieur, notamment ceux appartenant à l’association professionnelle ACPO, détiennent une responsabilité spécifique en matière de suivi des affaires à connotation raciale et de définition des politiques de lutte contre de tels actes).

1442.

En 1989 à Londres, on relève 6 incidents racistes par jour. Sur la seule période allant de septembre 1990 à février 1991, 136 incidents ont eu lieu dont seulement 23 ont été référés à la police! Ces chiffres devraient, selon le centre de recherche Police Studies Institute, être multipliés par 10, les minorités n’ont en effet souvent pas confiance en la police car elles s’estiment faiblement protégées ou que leur dépôt de plainte pour violence ou attaque raciste demeure le plus souvent sans suite.

1443.

all racial incidents should be fully investigated to obtain as much detection and prevention information as possible“, passage cité par A. Sampson, C. Phillips, Multiple victimisation: Racial attacks on an East London Estate, Home Office Police Department, Paper 36, London, june 1992, p. 13. (Toutes les atteintes à caractères racial doivent être suivies d’enquêtes approfondies pour déceler un tant soit peu des indices et obtenir des informations utiles pour les prévenir).

1444.

The Runnymede Trust, Submission to the Home Affairs Committee- Racially-motivated attacks and harassment, London, 1994, 10 p.

1445.

Ibid., pp 2-3 .

1446.

Ibid. .

1447.

Report of the Commissioner of Police of Metropolis 1996/ 97, Presented to Parliament by the Secretary of State for the Home Department, July 1997, Metropolitan Police, London, p. 28 .

1448.

A. Sampson, C. Phillips, Reducing Repeat Racial Victimisation on an East London Estate, Home Office Police Department, Paper 67, London, july 1995, pp 24-28.

1449.

V. à ce sujet, M. FitzGerald, R. Sibbitt, Ethnic monitoring in police forces : A beginning, A Research and Statistics Directorate Report, Study 173, Home Office Research, London, 1997, 121 p. Le recensement national de la population de 1991 intègre le critère racial ou ethnique. Mais dès les années 1980, les prisons britanniques prennent en considération un tel critère dans leurs statistiques. Cette pratique est établie également au sein de certains services publics notamment ceux dépendant des autorités locales. La Direction de la Recherche et des Statistiques du ministère de l’Intérieur, a, en collaboration étroite avec le Comité des Relations raciales et communautaires de l’association professionnelle ACPO, mis en place récemment un tel système d’information au sein des services de police, Ibid., p. vii.

1450.

The Runnymede Trust, op. cit., p. 1.

1451.

CRE, Corporate Plan 1995-1999, London, mai 1995, 20 p.

1452.

C’est la notion d’ethnicité qui est au fondement de la protection assurée par la loi de 1976. Lord Fraser of Tullybelton, dans l’ arrêt Mandla c. Lee (1983) Law Reports, 2 Appeal Cases 548, rendu par la Chambre des Lords, définit la notion d’ethnicité, et partant le terme groupe racial, en ces termes : “Pour qu’un groupe constitue un groupe ethnique au sens du Race Relations Act 1976, il doit à mon sens se considérer, et être considéré par autrui, comme une communauté qui se distingue par certaines caractéristiques. Certaines de ces caractéristiques sont essentielles ; d’autres ne le sont pas mais qui se trouveront fréquemment et permettront ainsi de distinguer le groupe de la collectivité qui l’entoure. Les critères qui me paraissent essentiels sont les suivants : (1) une longue histoire commune, dont le groupe est conscient qu’elle le distingue d’autres groupes et dont il conserve un vivant souvenir ; (2) une tradition culturelle qui lui est propre, y compris des usages et coutumes familiaux et sociaux, et qui est souvent- mais pas obligatoirement- associée à des pratiques religieuses. Outre ces deux traits essentiels, les caractéristiques ci-après me semblent pertinentes : (3) soit une origine géographique commune, soit une descendance d’un petit nombre d’ancêtres communs ; (4) une langue commune, sans qu’elle soit nécessairement particulière à ce groupe ; (5) une littérature commune particulière au groupe ; (6) une religion commune différente de celle des communautés voisines ou de l’ensemble de la collectivité qui l’entoure ; (7) le fait de former une minorité ou un groupe opprimé ou dominant au sein d’une communauté plus grande- pourraient ainsi être qualifiés de groupes ethniques tant un peuple conquis (les habitants de l’Angleterre juste après conquête normande, par exemple) que leurs conquérants“. Passage cité par Conseil de l’Europe (ECRI), op. cit., mars 1995, p. 429.

1453.

R. v. Entry Clearance Officer ex parte Amin (1983) 2 Appeal Cases 818 House of Lords .

1454.

CRE, Reform of the Race Relations Act 1976, Proposals for change submitted by the Commission for Racial Equality to Rt Hon Jack Straw MP, Secretary of State for the Home Department, on 30 April 1998, London, 40 p. Aux termes de l’article 13 du Traité d’Amsterdam signé en octobre 1997, l’Union a compétence pour légiférer, après ratification et à terme, dans le domaine de la discrimination raciale. La jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européenne va peu à peu influencer la conception anglaise de la notion de discrimination, ce qui nécessite une réforme de la loi de 1976 pour s’approcher des standards en vigueur dans la législation européenne actuelle et à venir (p. 16 et s.).

1455.

CRE, Enforcing the Race Relations Act- A Code of practice for the CRE, London, 1996, 17 p.

1456.

V. Commission for Racial Equality, Racial attacks- A survey in Eight Areas of Britain, London, July 1987, 30 p. La Commission recommande ainsi à la police 1°) priorité policière doit être accordée aux attaques racistes ; 2°) établir une unité policière centrale spécialisée ; (...) 12°) la promotion des agents de police doit se fonder sur des critères professionnels d’implication personnelle et de résultats obtenus dans la lutte contre les attaques racistes ( pp 27-28).

1457.

“Notre objectif, note la CRE, n’est pas l’intégration, ni ce processus flatteur d’assimilation, mais un processus basé sur l’équité ou l’égalité des chances, le respect et la compréhension mutuels, et la reconnaissance de la diversité. Un texte fort, et appelé à trouver une application effective, à savoir la loi sur les Relations raciales, est essentiel pour atteindre ce but“, CRE, Second Review of the Race Relations Act 1976, London, 1992, p. 9.

1458.

En ce sens, V. Commission for Racial Equality, Racial attacks and policing- A blueprint for action, july 1991, London, 7p. V. égal. pour des statistiques récentes, CRE Factsheets, Racial Attacks and Harrassment, London, 1997, 4 p.

1459.

CRE, op. cit., 1992, 88 p.

1460.

The Runnymede Trust, Improving equality law : the options Justice, by B. Hepple and alii, London, non daté, 17 p.

1461.

“We are concerned that neither the Treaty of Rome nor the European Convention makes racial discrimination unlawful. In spite of its weaknesses, our own Race Relations Act is very much stronger than any comparable legislation of our European Parteners. It is essential for good race relations in Britain that members of ethnic minorities who are established here should not be denied equal opportunity when they move to mainland Europe or Ireland. Freedom of movement will mean very little unless it is backed up by freed from racial discrimination“, Ibid., p. 8.

1462.

Lord Diplock déclare ainsi, dans l’arrêt London Borough of Hillingdon v. CRE (1982) A C 775, que “la discrimination raciale n’est pas normalement pratiquée de manière ouverte. Il est possible qu’elle prenne une variété de formes des plus subtiles les unes que les autres. Ces formes ne se laissent pas facilement découvrir“ (Racial discrimination is not normally practised openly. It may take a whole variety of subtle forms that are not easy to uncover), cité par CRE, Second Review of the Race Relations Act 1976- A consultative paper, London, June 1991, p. 7.

1463.

Ibid., p. 19 .