La particularité du recrutement policier anglais est qu’il s’effectue à la base : tout policier de rang supérieur a, au cours du déroulement de sa carrière, exercé la fonction de constable, l’équivalent français de gardien de la paix.
De bas en haut de la hiérarchie policière anglaise, le principe d’égalité dans le recrutement et la promotion semblent jusque là régner. Ce schéma égalitaire s’est quelque peu infléchi depuis les incidents survenus au cours des années 1980 dans les “inner-cities“, événements qui n’ont pas été sans poser et ainsi réactiver la question d’un recrutement ethnique.
Le rapport Scarman de 1981 avait recommandé l’ouverture des corps de police aux minorités ethniques afin de réduire la perte de légitimité des forces de l’ordre auprès de ce public1663. Cette ouverture possible est juridiquement permise par le statut particulier du constable .
Le constable n’est ni un fonctionnaire de l’Etat ni un agent des autorités locales mais en principe un serviteur fidèle et particulier de la Couronne. En droit anglais, on entend par fonctionnaire, selon les termes d’un Rapport de 1931 de la Commission royale sur la Fonction publique, “tout serviteur de la Couronne autre que titulaire d’un poste de nature politique ou judiciaire, employé dans une capacité civile, et dont la rémunération est versée totalement et directement sur les fonds votés par le Parlement“1664. Cette définition anglaise du fonctionnaire, écrit un auteur, “exclut notamment la police, l’enseignement public, les forces armées, les collectivités locales mais comprend les services extérieurs des ministères organisés en bureaux régionaux“1665.
Le statut autonome de constable permet une souplesse des règles de recrutement des personnes en raison de leur sexe et / ou race pour les besoins du service. Ce d’autant plus qu’il existe une législation sévère de lutte contre toute forme de discrimination, notamment en raison de l’ethnie, de la race, et dans une moindre mesure du sexe, pour l’accès aux corps de police. Ce principe de non-discrimination se pose ici avec une certaine acuité lorsque l’on sait que l’entrée dans la police anglaise est ouverte aux hommes et femmes qui sont sujets britanniques ou citoyens du Commonwealth.
Cependant, l’application récente du principe de l’égalité des chances au sein des services de police conduit à la reconnaissance officielle de la nécessité d’un recrutement policier fondée sur l’ethnie ou la race des candidats. Au principe de non-discrimination répond à l’inverse une volonté affirmée d’une égalité des chances des minorités à pouvoir accéder aux différents corps de police. C’est alors que s’institue un recrutement policier de type ethnique au sein des services de police.
Ce souci est certes déjà inscrit dans le rapport de 1967 du corps d’inspection HMIC, et dans le rapport parlementaire de 1972 sur les relations entre les races et l’immigration, mais le rapport Scarman rend plus visible et urgent, grâce ou à cause des émeutes de Brixton selon des auteurs anglais, cette ouverture de la police au recrutement ethnique, V. Report of Her Majesty’s Chief Inspector of Constabulary for the year 1967, London: Her Majesty’s Stationery Office, June 1968, p. 65. et Select Committee on Race Relations and Immigration, Police- Immigrant Relations, Session 1971-72, Volume I, HC 471- I.
Report of the Royal Commission on the Civil Service, 1929-1931, Cmnd, 3909, London, HMSO cité par A. Morgan “La formation des fonctionnaires au Royaume-Uni “, in G. Ignasse (dir.), Fonction publique et formation continue en Europe, L’Harmattan, Coll. Administration-aménagement du territoire, Paris, p. 31.
Ibid.