La section 17 de la loi de 1975 contre la discrimination sexuelle (Sex Discrimination Act 1975 ) est relative au recrutement des femmes dans la police1666. Cette section prohibe toute discrimination fondée sur le sexe des candidats. Il est assez significatif de relever que l’office de constable, pris ici au sens général du terme1667, est saisi à travers la notion d’emploi offert soit par le responsable ou l’autorité de police locale1668, qui jouent tous deux le rôle d’employeurs. La compétence juridictionnelle revient alors aux industrial tribunals, c’est-à-dire l’équivalent des tribunaux français qui veillent au respect du Code du travail (Conseils des prud’hommes)1669.
Ce recrutement policier décentralisé, aux modalités et aux règles assez souples, tend à faciliter la prise en considération légitime du sexe pour exclure les femmes de certains emplois. Le législateur accorde à ce titre aux organes locaux, en tant qu’employeurs, le pouvoir de déterminer les modalités de recrutement au regard des besoins particuliers de la zone de police considérée. C’est ainsi que la distinction entre les sexes est admise dans certains cas limitativement énumérés1670. En dehors de ces exceptions, le principe de non-discrimination en raison du sexe demeure et il se trouve défini à la ss. (3) de la loi.
Plus généralement, en droit anglais, “il y a discrimination contre une femme, écrit un auteur, si elle est traitée moins favorablement que ne serait traité un homme soit parce que les conditions d’exercice d’un travail sont telles que proportionnellement, le nombre de femmes susceptibles de l’accomplir est plus faible, même si ces conditions concernent l’homme et la femme, soit parce que cette condition, qu’elle ne peut remplir, lui est préjudiciable, car elle ne peut s’y conformer“1671.
Il est essentiel, à ce niveau, de faire observer qu’aux termes de la loi de 1975 toute mise en place d’un système de quotas selon le sexe est illégale. La loi de 1975, si elle interdit toute discrimination, n’autorise en effet pas pour autant des actions positives en faveur des femmes, à l’exception notable toutefois du domaine de la formation. La police, est, aux termes de la loi de 1975, une institution administrative qui doit jouer un rôle de premier plan dans la promotion à l’emploi des femmes, et ce notamment à travers des mesures de lutte contre toute forme de recrutement discriminatoire à l’égard de celles-ci.
Les dispositions de la loi trouvent toutefois mal à s’appliquer. L’accès des femmes demeure à un niveau assez faible1672. Le respect du principe de non-discrimination sexuelle paraît en pratique assez délicat à mettre en oeuvre1673. Ce principe n’interdit pas à la police métropolitaine de fixer un niveau de recrutement féminin à atteindre1674. La femme policier n’en connaît pas moins aussi un certain ostracisme au sein de l’institution, voire parfois, est victime de comportement discriminatoire de la part des collègues policiers1675.
Dans son rapport annuel de 1997, l’Autorité des plaintes contre la police relève ainsi trois affaires de harcèlement et de discrimination subies par des femmes policiers par leurs collègues masculins, dont deux se sont traduites par une procédure devant les tribunaux du travail (Industrial tribunals). “Ces trois affaires, observe l’Autorité, ont été considérées par les forces et autorités de police, comme des matières n’entrant pas dans la catégorie de plaintes et se situent par conséquent en dehors du champ de compétence de l’Autorité. Nous estimons au contraire, écrivent les auteurs du rapport, que ces requêtes connaissent un nouveau développement et posent un certain défi à l’Autorité ; nous croyons que le public est naturellement concerné, ce qui justifie notre décision d’enquêter sur ces affaires. Nous sommes parfaitement conscients en effet de l’impact sur le public du fonctionnement des services de police causé par la publicité qui est faite des cas de harcèlement à caractère sexuel ou racial subis par certains officiers de police“1676. La pratique relevée par l’Autorité des plaintes voire le corps national d’inspection HMIC permet ainsi de relativiser le respect de la législation de lutte contre la discrimination sexuelle au sein des corps de police.
Une construction législative et un constat assez identiques peuvent être observés dans la lutte contre toute forme de discrimination raciale dans l’accès aux différents corps de police.
Cette section est intitulée de manière significative “Police“. V. Halsbury’s statutes, “ Civil rights and liberties“, Vol. 6, London Butterworths, 4 th., 1992, p. 772.
Pour la définition du terme “office of constable”, V. la s. 7 de la loi précitée.
“ For the purposes of this Part, the holding of the office of constable shall be treated as employment- (a) by the chief officer of police as respects any act done by him in relation to a constable or that office ; (b) by the police authority as respects any act done by them in relation to a constable or that office“. (Au regard des dispositions prévues dans cette partie, le sens attribué aux termes “office de constable“ est celui d’un recrutement dans un emploi et dans ce corps, opéré tant a) par le responsable de police dans l’exercice de ses compétences qui sont en relation avec un tel emploi, que, b) par l’autorité de police locale dans tous ses actes relatifs à l’emploi de constable ou s’inscrivant dans ce cadre d’emploi) Ibid.
L’équivalent français sont le Conseil des prud’hommes ainsi que les chambres sociales des cours en appel qui veillent au respect du Code du travail.
La s. 2 de la loi de 1975 énonce : “Regulations made under section 33, 34 or 35 of the Police Act 1964 shall not treat men or women differently except- (a) - as to requirements relating to height, uniform or equipement, or allowances in lieu of uniform or equipement, or (b) - so far as special treatment is accorded to women in connection with pregnancy or childbirth, or (c) - in relation to pensions to or in respect of special constables or police cadets“. (Les règlements prévus aux sections 33, 34 et 35 de la loi de 1964 sur la Police visent à interdire toute différence de traitement entre hommes et femmes à l’exception toutefois, a) des dispositions relatives à la taille et à l’uniforme et à l’équipement, aux allocations pour frais de port de l’uniforme et d’équipement, b) un traitement spécial est également accordé aux femmes en état de grossesse et suite à une naissance d’enfant, c) enfin en matière de pensions concernant les policiers bénévoles et les jeunes recrues) ibid.
D. Noguerol, op. cit., p. 34.
En 1914 apparaissent les premières femmes volontaires engagées dans la police, en 1939 elles sont 200, pour atteindre en 1992 le nombre de 15 000 soit 11, 8 % de l’effectif policier d’Angleterre et de Pays de Galles et de Londres ; la seule police de Londres comprenant 13 % de femmes. Les femmes sont aujourd’hui représentées à tous les niveaux hiérarchiques qui va du Police constable (pour l’essentiel) à Deputy Chief Constable (Susan Davies est la première femme nommée à ce poste en 1994, V. The Guardian du 11 mars 1994, p. 3). Pour une comparaison avec la France, V. E. Dene, “A comparison of the history of the entry of women into policing in France and England and Wales“, The Police Journal, vol. LXV, n° 3, july- sept., 1992, pp 236- 242. Récemment, le corps d’inspection, dans son rapport annuel 1995-1996, note que le pourcentage de femmes policiers recrutées s’élève à 11 % en 1989 passant à 14,5 % en 1996 ; Report of Her Majesty’s Chief Inspector of Constabulary - Annual report 1995/ 1996, op. cit., p. 104 . Pour la police métropolitaine, durant la période 1996/ 1997, 692 officiers ont été recrutés, 19 % de femmes et 7 % de minorités ethniques ; V. Report of the Commissioner of Police of the Metropolis 1996/97, op. cit., p. 49 .
Le “sexisme” dans la police anglaise, qui joue par ailleurs pour les deux sexes, semble cependant vigoureusement combattu. V. Affaire Ms Scott and Mr. Davies rendu par l ‘industrial tribunal de Leeds, The Guardian du 17 sept. 1994. Pour une analyse plus approfondie, V. N. Fielding and J. Fielding, “A comparative minority : Female recruits to a british constabulary force“, Policing and Society, 1992, vol. 2, pp 205- 218.
A report of a collaborative exercice between the Metropolitan Police and the Equal Opportunities Commission, London, 1989-1990, p. 17 .
La spécificité de la situation de la femme policier anglais revient souvent à la lecture des revues de police éditant les décisions de justice rendues en matière de discrimination sexuelle au sens large. V. par ex. la plainte de PC Kay Kellaway au sein de la Thames Valley Police, victime d’agression sexuelle par un collègue et la pression des officiers supérieurs pour étouffer l’affaire, in Police review, 26 september 1997, p. 14. Pour un cas de harcèlement sexuel, V. Police review, 14 november 1997, p. 6
The 1996/97 Annual Report of the Police Complaints Authority, op. cit., p. 49.