i. Le Système De La Librairie

À une époque où la liberté de la presse n’est pas encore acquise, le monde de l’édition reste marqué par l’usage de la censure : pour être officiellement autorisé, un texte doit en effet recevoir au préalable l’aval d’un censeur. Jean-Paul Belin rappelle ainsi que « l’obligation de censure fut maintenue pendant tout l’ancien régime. Tous les censeurs étaient tenus de soumettre leurs manuscrits entiers à un censeur royal et d’obtenir, d’après son rapport, des lettres de privilège pour les ouvrages un peu importants, et une permission du lieutenant de police pour ceux dont la valeur ne dépassait pas deux feuilles en caractères cicéro604 ». Les pamphlets étant des textes “ inavouables ”, couramment décriés, et juridiquement condamnables605, il est évident que leurs auteurs ne s’aventurent guère à les soumettre à la censure, et se soucient fort peu d’obtenir une permission officielle. Est-ce à dire pour autant que ces publications s’effectuent dans la plus complète clandestinité ? L’examen des documents relatifs à la police de la Librairie pourrait bien nous inciter à nuancer quelque peu ce jugement. Par ailleurs, ce statut de (relative) clandestinité amène les auteurs de pamphlets à demeurer dans un (non moins relatif) anonymat, ou à revêtir différents masques, dont il s’agit d’examiner la signification.

Notes
604.

 J.-P. Belin, Le Commerce des livres prohibés, p. 17.

605.

 Sur cette question, voir notre deuxième partie, chap. 1, § 1.1.