c) Les travaux manuels

• (15.02.93/I1) L'institutrice a rassemblé les enfants assis sur l'estrade pour leur raconter une histoire. Après avoir fini l'histoire, elle leur explique les activités (en vue de préparer le carnaval) qui vont suivre dans la pièce d'à côté (commune au CP1 et CP2). Les élèves se répartissent en trois ateliers: arlequins, pâte à sel, coin peinture. Les enfants sont beaucoup plus agités que dans la salle de classe. A chaque atelier, ils ont des consignes bien précises à suivre: un dessin à découper ("bien comme il faut, sur les traits")et à colorier avec des couleurs différentes dans les losanges ("sinon, c'est plus un arlequin"); un masque de carnaval à peindre ("Il faut tout remplir sur votre feuille, je veux pas voir de blanc"); un masque à réaliser avec la pâte à sel (en partant de la même "base": un rond avec un nez, une bouche et des yeux). En peinture et en pâte à sel, les enfants doivent s'inspirer des photos ou des dessins sur le thème du carnaval, affichés au mur.
• (8.04.93/I1) Les enfants fabriquent des canards en cartons dans lesquels ils mettront des oeufs de Pâques. L'institutrice a pris un modèle dans la revue "Jeunes Années" (utilisée en animation), qu'elle a photocopié sur du carton souple. Les élèves ont pour consigne de "bien découper sur les traits pleins, sans dépasser et sans découper sur les pointillés": "il faut bien découper, parce que je n'ai qu'un modèle, alors après tant pis pour vous si vous ratez!". Un enfant se trompe et découpe sur les pointillés (qui servent à faire des pliages pour construire le canard). L'institutrice le gronde et lui donne le dernier modèle qui restait. Un autre enfant se trompe également, elle s'énerve et vient scotcher les parties découpées <...> Quand les élèves ont terminé de découper, la maîtresse demande de prendre des ciseaux ou le capuchon d'un stylo pour appuyer sur les pointillés et plier les parties. Elle indique les deux manières de plier le canard, puis demande aux enfants de mettre leur signe à l'intérieur (pour les reconnaître ensuite). Elle dessine le canard au tableau pour montrer aux enfants où ils doivent coller les languettes: "Pour colorier le noeud papillon et les boutons du canard, il faut le faire avant de coller, parce qu'après c'est plus possible!"
• (5.04.93/I2) En travaux manuels, les enfants fabriquent un oeuf de Pâques. L'institutrice a découpé des formes ovales dans du carton, dont les enfants doivent se servir comme modèle pour reproduire l'oeuf: ils obtiennent deux parties identiques qu'ils doivent ensuite colorier sur une face puis coller ensemble. Les élèves partagent chacun des parties en deux, avec un trait vertical au milieu. Ils doivent ensuite colorier de chaque côté, en faisant des traits horizontaux, des traits verticaux, des zigzags, des points...l'essentiel étant qu'ils ne dessinent qu'un type de forme par surface (ils ne peuvent pas mélanger des points et des traits par exemple). La maîtresse insiste pour que le travail soit "propre" (bien découpé) et "colorié comme il faut" . Au fur et à mesure, les enfants viennent montrer leur production à l'institutrice qui donne son avis, par exemple: "Je trouve que c'est pas assez clair...J'aimerais bien un peu plus de jaune!"<...> Quand les enfants ont fini, la maîtresse vient agrafer les deux parties de l'oeuf, puis elle conclut en expliquant aux enfants que c'est leur oeuf de Pâques, qu'ils peuvent l'emporter chez eux pour en faire ce qu'ils veulent
• (24.03.93/I2) L'institutrice distribue des dessins à colorier. Les enfants ont pour consignes de "ne pas dépasser les traits" et de colorier "selon les bonnes couleurs, de celles qu'on voit chez nous: l'arbre avec le tronc marron, l'herbe verte, les oiseaux avec des couleurs d'ici et non pas comme des perroquets". Pendant que les élèves colorient, l'institutrice reprend Daniel: "Pourquoi tu as colorié les racines de l'arbre en bleu? Tu n'étais pas là quand les messieurs sont venus planter l'arbre? <elle fait allusion à un arbre qui a été planté dans la cour>". Parfois, les enfants se lèvent pour montrer à la maîtresse leurs dessins et souvent, elle les encourage.

Ici, comme pour la séance "rondes et danses", la marge d'initiative et de créativité laissée aux enfants est très ténue: ainsi ils ne peuvent pas imaginer les couleurs d'un dessin à colorier, mais ils doivent reproduire fidèlement la réalité telle qu'ils peuvent l'observer dans la nature; lorsqu'ils peignent, on leur demande de "remplir toute la feuille" comme s'il s'agissait d'une norme esthétique "évidente en soi". Les élèves exécutent le même travail, en même temps que d'autres (soit la classe entière, soit par petits groupes), sur la base d'un thème imposé (carnaval, Pâques) avec une succession d'étapes précises. Les institutrices attendent des élèves essentiellement qu'ils sachent reproduire un modèle, exécuter une consigne, respecter des règles et faire preuve de leur habileté manuelle à savoir découper, plier, peindre et colorier "comme il faut" (c'est à dire sans dépasser la feuille).