b) S’auto-évaluer pour améliorer ses performances

A la fin de chaque période (septembre à décembre, janvier-février, mars à mai), l’enfant doit remplir une feuille de “bilan” en trois parties: bilan du travail personnel, bilan des leçons et devoirs et bilan des responsabilités 1490 .

  1. Bilan du travail personnel
    1. Je suis capable de prévoir seul mon contrat de travail (oui/non)
    2. Je suis capable de respecter mon contrat (oui/non)
    3. Je suis capable d’organiser mon cahier de TP (oui/non)
    4. Je suis capable de savoir quels exercices je dois faire quand j’ai feu orange ou rouge (oui/non)
    5. Je sais où se trouve le matériel du TP (oui/non)
    6. Je sais ranger les fiches en les glissant dans l’ordre (oui/non)
    7. Je suis capable de respecter les règles de vie et de travail (oui/non)
    8. J’aime bien travailler seul (oui/non)
    9. J’aime bien travailler avec un autre enfant (oui/non)
    10. J’ai besoin de me faire aider par un adulte (oui/non)
    11. J’aide d’autres enfants (oui/non)
    12. Je suis aidé par d’autres enfants (oui/non)
    13. Je consulte mon cahier “Parlons du travail” (méthodologie) quand j’en ai besoin (oui/non)
  1. Bilan des leçons et devoirs
    1. Je sais me servir de mon cahier de textes (oui/non)
    2. J’ai besoin que quelqu’un vérifie ce que j’ai à faire à la maison (oui/non)
    3. Je travaille seul (oui/non)
    4. Je travaille avec une soeur ou un frère (oui/non)
    5. Je travaille avec maman ou papa (oui/non)
    6. Je travaille avec quelqu’un d’autre (centre social, etc...) (oui/non) Si oui, l’enfant doit préciser avec quelle structure il travaille
    7. Je sais apprendre par cœur (oui/non)
    8. Je sais prévoir mon travail à l’avance (oui/non)
    9. Je suis capable de faire tout ce qu’il y a à faire (oui/non)
  1. Bilan des responsabilités
    1. J’ai une responsabilité: l’enfant doit préciser de quelle responsabilité il s’agit
    2. J’aime cette responsabilité (oui/non)
    3. Je sais ce que j’ai à faire (oui/non)
    4. J’ai besoin qu’on me redise ce que j’ai à faire (oui/non)
    5. Je sais expliquer ce que j’ai à faire (oui/non)
    6. Je suis capable de tenir ma responsabilité (oui/non)
    7. Les trois responsabilités pour lesquelles je suis certain d’être capable: l’enfant doit citer trois responsabilités
    8. Le ménage, j’aime (oui / non)
    9. Le ménage, je sais faire (oui / non)

Dans cette manière de procéder, l’institutrice n’est plus la seule juge du comportement scolaire de l’enfant: non seulement elle n’est pas forcément présente, en train de l’observer, lorsque l’élève s’acquitte de sa tâche, lorsqu’il travaille, mais en plus l’enfant doit encore évaluer s’il est capable ou non d’effectuer un travail, une responsabilité, utiliser son cahier de méthodologie, respecter les règles de travail et de vie, trouver le matériel, prévoir le travail, etc... Cette posture demande une attitude réflexive à l’égard de son action d’élève, un recul, un jugement qui n’est plus la seule propriété de l’institutrice et qui permet à l’enfant de rectifier son comportement. En plus du “bilan de travail” hebdomadaire, les élèves doivent aussi remplir une “fiche d’évaluation” 1491 pour chaque période, où ils font leur bilan en français, mathématiques, ils marquent ce qu’ils ont “envie de faire” et où la maîtresse fait ses observations. Cette fiche est signée par l’élève, l’institutrice, la directrice et les parents; elle comprend un tableau comparatif, avec le nombre d’enfants par groupe de niveau pour le français et les mathématiques.

Par ailleurs, il existe dans les classes du matériel didactique édité ou conçu par les instituteurs pour faire du travail auto-évalué 1492 . L’enfant travaille alors de manière “personnalisée” et cette manière de procéder permet, selon les enseignants, de renforcer l’“autonomie” et la “responsabilité” de l’élève 1493 . Mais l’auto-correction n’est qu’une partie de l’auto-évaluation qui vise à approfondir les techniques d’acquisition: “L’auto-évaluation n’est pas seulement une vérification d’exercices à travers des résultats. Elle est, aussi, l’analyse et la mise en relation des actions, des stratégies et de la pensée; elle est la compréhension des étapes ou de la totalité d’un chemin personnel, en permettant d’identifier les réussites, les difficultés et erreurs de ce parcours” 1494 . Autrement dit, on ne demande pas seulement à l’enfant de savoir faire tel exercice, de savoir utiliser telle règle de grammaire ou de mathématiques: savoir expliquer “comment il procède” et comprendre pourquoi il s’est trompé à un exercice fait partie aussi des compétences scolaires dont il doit donner la preuve.

Par ailleurs, l’enfant est amené à évaluer les productions scolaires qui proviennent d’autres élèves de la classe: ainsi, la classe doit très souvent voter afin de choisir un texte, un dessin, une chanson...

  • (4.05.93) L’institutrice demande aux enfants d’écrire des phrases pour le texte “Notre version de Cendrillon”. Elle écrit au tableau plusieurs débuts de phrases 1495 et donne la consigne suivante aux élèves: “Je choisis d’abord un personnage, après une formule, après j’imagine...Mais attention, il faut que ça soit compréhensible, ce que vous écrivez, il faut qu’il y ait du sens”.
    Les enfants cherchent leurs phrases seuls ou à deux (après accord de l’institutrice), puis c’est la “mise en commun” des phrases trouvées par les élèves.
    Un enfant lit: “C’est le fils du président. Si j’étais une marâtre, je mangerais des patates”
    L’institutrice: “Les autres? Qu’est-ce que vous en pensez?...Il faut vous décider...Moi, je trouve que ça n’a pas beaucoup de sens...Ca rime, mais le problème, c’est que ça ne veut pas dire grand chose...C’est pas la consigne”
    Les élèves sont amenés à voter en levant le doigt parmi les phrases jugées correctes par l’enseignante sur le plan grammatical et au niveau du sens.

    L’institutrice place des dessins au tableau, représentant tous les quatre les “soeurs jumelles”, personnages inventés dans le texte remanié de Cendrillon. Elle a demandé à chaque enfant de venir l’un après l’autre mettre une croix sous le dessin qu’il préférait. Puis l’opération a été recommencée pour le prince, les princesses. Le nombre de voix étant égal pour deux dessins du prince, l’institutrice a demandé un vote à main levé, avec un comptage effectué par la trésorière du conseil (même si on n'était pas dans le cadre d'un conseil de classe) Les dessins choisis par vote seront placés dans un livre contenant la version modifiée de Cendrillon de la classe de module 3
  • (17.05.93) Les enfants ont écrit des textes libres et ils les lisent devant la classe. Une fille du bureau note au tableau les prénoms des enfants qui lisent et après, un vote à main levée est effectué. Les enfants votent toujours pour leurs propres textes (sauf la dernière et l’institutrice lui demande pourquoi). Bertrand a eu 8 voix et Lubna 7 voix (Bertrand est le meilleur élève garçon de 2ème année et Lubna la meilleure élève fille de 3ème année). Ce vote semble être l’objet d’une “bagarre” entre les garçons et les filles. Celles-ci s’exclament: “Oh! On a perdu!”

Le vote n’a pas tout à fait le même sens qu’une évaluation scolaire, puisqu’il est le choix effectué par des pairs sur des productions de type “esthétique” où on ne juge pas si c’est exact ou non comme pour des exercices de mathématiques ou de français (seule la maîtresse fait un “tri” préalable, ne retenant que les productions qui ont “respecté la consigne” 1496 ). C’est le groupe des enfants qui attribue la “valeur” au texte ou au dessin, avec un vote “démocratique” basé sur une relation de justice (dans les mêmes conditions que celles du conseil).

Notes
1490.

Pour les réponses oui/non, l'enfant doit expliquer pourquoi.

1491.

On peut la consulter en annexe J9.

1492.

Certains travaux scolaires ne sont pas auto-correctifs, comme par exemple les problèmes en mathématiques (l’élève doit montrer ses résolutions de problèmes à l’instituteur) ou bien les textes et les histoires (qui sont corrigés avec l’enseignant, puis après correction, chaque texte est relevé dans le cahier d’expression écrite et l’enfant peut le présenter au moment du choix des meilleurs textes de la semaine). Pour le travail sur fichiers auto-correctifs, l’instituteur se réserve quand même le droit de demander à un enfant de faire un exercice supplémentaire, non auto-correctif, pour vérifier s’il a bien acquis une notion.

1493.

Pour se noter avec des feux, l’enfant doit utiliser une “grille pour les auto-corrections” (consultable en annexe J5).

1494.

Apprendre ensemble, apprendre en cycles , Ed. ESF, Paris, 1993, p.134.

1495.

Si j’étais...Je me souviens...J’ai oublié...J’aime...Je n’aime pas...J’adore...Je déteste...Autrefois...Maintenant...

1496.

Ce qui rappelle d'une certaine manière le principe de l'analyse des productions picturales dans la configuration Guilloux (voir la partie III,3: "Savoir respecter une consigne")