Les instructions du 20 juin 1962 ont fixé les règles relatives à l’inventaire, au traitement, au classement et au prêt des documents dans les sections nouvelles et transférées des bibliothèques universitaires, à l’exception des sections de médecine, et en omettant le cas des sections de pharmacie. Elles ont donc implicitement abrogé, pour les sections concernées, les dispositions homologues de l’instruction générale du 4 mai 1878 concernant le service des bibliothèques universitaires.
Les dispositions de 1878 avaient prévu des règles simples pour l’inventaire et le traitement des documents. Ces règles ont été rendues beaucoup plus complexes par les nouvelles instructions. Ainsi, deux nouveaux classements sont venus s’ajouter au classement ancien par format et par ordre d’entrée dans les sections transférées ou ont été établis dans les sections nouvelles. Il y avait en effet un mode de classement pour les ouvrages placés en magasin dès leur arrivée, ou après avoir été retirés des salles de lecture, et un classement pour les monographies en libre accès. Le classement en magasin reposait sur l’ordre d’arrivée à l’intérieur de divisions correspondant à de grandes disciplines. Une seule distinction de format avait été conservée. Ce système se présentait donc comme une formule hybride, rappelant à la fois l’ancien classement par format et par ordre d’entrée, mais fondamentalement différent en raison de la prise en considération du contenu des documents. Cette prise en considération nécessitait donc avant l’enregistrement l’identification de la catégorie, symbolisée par une ou plusieurs lettres de l’alphabet, dans lequel un document devait être intégré. De ce fait, l’enregistrement cessait d’être une opération simple, ne faisant appel qu’à des qualifications élémentaires, et nécessitait la capacité d’apprécier correctement la discipline à laquelle appartenait un document. Ces difficultés pouvaient bien entendu être renforcées pour les documents appartenant à des domaines peu familiers ou (et) en langue étrangère. Le processus d’enregistrement n’a pas été simplifié, bien au contraire, dans les bibliothèques où l’on a distingué un enregistrement « comptable » immédiat, qui ne tenait pas compte du sujet des documents et dont les numéros étaient reportés sur les factures, et un enregistrement « bibliothéconomique » répondant aux règles posées par les instructions du 20 juin 1962. 430
A cet accroissement de la complexité de l’inventaire répondait une complexité supérieure de l’indexation. Celle-ci en effet devait désormais être réalisée selon un double système, sous la forme de vedettes matière comme c’était déjà le cas depuis 1952, et sous la forme d’indices de la classification décimale universelle. Cette classification servait en outre, à l’aide d’un indice simplifié, à déterminer la cote des monographies placées en libre accès dans les salles de lecture. Le nombre des documents en libre accès devait être fortement augmenté. Ce double système d’indexation et de cotation entraînait à son tour la tenue de catalogues supplémentaires : un catalogue systématique, classé selon les indices de la classification décimale universelle et pourvu d’un index alphabétique, et un catalogue topographique interne pour permettre le récolement annuel des monographies en libre accès. La distinction entre deux niveaux et différentes salles conduisait en outre à prévoir, à côté des catalogues généraux des documents de la section, des catalogues particuliers par niveau ou (et) par salles. Dans l’ensemble, les opérations de traitement avaient été considérablement alourdies, et le nombre de fichiers à alimenter s’était notablement accru. Il devenait indispensable d’utiliser des procédés permettant la reproduction en grand nombre de fiches de catalogue, mais aussi de disposer d’un personnel nombreux de dactylographes.
Sur le plan technique, différents systèmes furent utilisés pour la reproduction des fiches de base : machines à écrire automatiques, qui reproduisaient en autant d’exemplaires que nécessaire le texte d’une notice catalographique préalablement enregistré sur une bande perforée ; photocopieuses adaptées pour le tirage sur plaques de bristol qui devaient ensuite être découpées ; impression offset dans la plupart des cas. Si les deux premiers procédés pouvaient être placés dans chacune des sections, l’investissement nécessaire pour utiliser l’impression offset conduisit généralement à regrouper cette opération dans un atelier commun à l’ensemble de la bibliothèque universitaire. Dans ce cas, la fabrication des fiches de catalogue suivait un circuit compliqué. La notice catalographique était d’abord établie de façon manuscrite à partir du document et contrôlée, puis transférée sur une plaque spéciale pour l’impression offset. Ces opérations se déroulaient à l’intérieur d’une section ou d’un secteur, selon le degré de déconcentration adopté. La dactylographe prenait soin de grouper sur la même plaque des notices qui devaient être tirées dans le même nombre d’exemplaires. Ce nombre d’exemplaires était indiqué à l’atelier auquel les plaques étaient transmises après relecture. L’atelier effectuait le tirage et le découpage et renvoyait à la section les jeux de fiches. Ceux-ci étaient alors collationnés et complétés par les mentions nécessaires au classement dans les différents fichiers : auteurs secondaires, vedettes matière, indices de classification ou cote, sans oublier au verso de la fiche principale le rappel de l’ensemble de ces points d’accès. Les fiches pouvaient ensuite être réparties dans des fichiers d’attente en vue de leur classement dans les différents catalogues auxquels elles étaient destinées.
Ces opérations complexes d’aller et retour nécessitaient de nombreuses vérifications, qui ne permettaient pas d’éviter entièrement les erreurs. Il est frappant de constater qu’alors que l’on était sensible au fait qu’un investissement matériel coûteux comme un duplicateur offset devait, pour être rentabilisé, fonctionner pour l’ensemble des sections de la bibliothèque universitaire, on ne considérait jamais que des économies d’échelle auraient pu être obtenues et des difficultés de transmission évitées en regroupant des opérations techniques comme le catalogage et en les situant à proximité des ateliers. En poursuivant ce raisonnement, il aurait aussi été possible d’en venir à la conclusion que les documents auraient tout aussi bien pu être commandés et réceptionnés en un seul point, puis distribués avec leurs fiches après avoir été traités.
Ce double enregistrement a été préconisé, notamment, par J. Sansen, « De la proposition d’achat à la communication » dans Les Bibliothèques dans l’université, problèmes d’aujourd’hui et de demain, op. cit., p. 122-123.