CHAPITRE IV : LE REDEMPTEUR
DU DIX-HUITIEME SIECLE

Ce mythe, qui consiste essentiellement en une idéalisation du moraliste aux dépens, souvent, de ses contemporains, rend compte du jugement que la postérité porte sur la philosophie des Lumières par les liens qu’elle établit entre Vauvenargues et deux figures emblématiques du dix-septième et du dix-huitième siècles, Pascal et Voltaire. Cette double comparaison a plusieurs intérêts : elle porte sur deux polémistes qui sont considérés comme des plus engagés de leur époque, et qui défendent des positions contraires ; elle attribue à Vauvenargues deux influences contradictoires qui renvoient à l’ambiguïté de certaines de ses idées métaphysiques ; elle l’intègre dans le dialogue entre Voltaire et Pascal et donne ainsi un caractère polémique à l’amitié qui l’unit à Voltaire. Nous nous intéresserons d’abord au présent de l’auteur en étudiant les liens qui unissent Vauvenargues et Voltaire au regard de la postérité ; l’étude de cette relation permet à la critique de dénoncer en Voltaire ce qu’elle condamne du dix-huitième siècle philosophique. L’analyse de l’influence de Pascal sur Vauvenargues lui permet, au contraire, d’exprimer ce qu’elle attend d’un philosophe. Enfin, dans une perspective plus large, la postérité situe Vauvenargues par rapport à des doctrines philosophiques générales qui caractérisent et caricaturent le dix-septième et le dix-huitième siècles afin de mettre en valeur les aspects de son oeuvre dans lesquels elle se reconnaît.