première Partie : Genèse

Chapitre 1. L'émergence Du Besoin De Formation

1.1. Deux Systèmes D'enseignement Parallèles

Constatons tout d'abord qu'il existe en France, dans le domaine de la formation des maîtres, des différences notables entre l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire. Rappelons que l'histoire de ces deux ordres d'enseignement n'est pas la même. En effet, si on excepte l'enseignement technique qui a toujours eu un statut particulier, on peut dire qu'il existait en France deux systèmes parallèles qui, après être restés très séparés l'un de l'autre pendant des dizaines d'années, se sont peu à peu unifiés, mais avec beaucoup de lenteur. On peut considérer qu'ils n'ont véritablement été fondus en un seul qu'à la création des I.U.F.M., qui instaurait le recrutement des enseignants de la maternelle au baccalauréat, au même niveau de formation universitaire. Cette unification est donc très récente. Auparavant, les deux systèmes étaient distincts l'un de l'autre.

Le premier système était constitué par les écoles primaires, qui débouchaient sur les écoles primaires supérieures, délivrant leur propre diplôme : le brevet supérieur. Au bout de la chaîne, la formation des maîtres de cette filière était assurée dans les écoles normales, dans lesquelles on entrait, à l'origine, après le brevet supérieur. Il n'y avait aucun lien ni avec les lycées, ni avec les universités. On sait combien ce premier système a marqué très fortement l'enseignement primaire. Quant au deuxième système, il était constitué des lycées qui, jusqu'à une époque relativement récente, scolarisaient les élèves de la maternelle jusqu'au baccalauréat, et qui débouchaient tout naturellement sur l'université, dans laquelle étaient formés les enseignants du secondaire.

Ces deux systèmes sont donc restés très séparés l'un de l'autre et ne se sont unifiés que très progressivement. Cette unification s'est faite, on peut le constater aujourd'hui, par l'absorption progressive du système "primaire-écoles normales", par le système "lycées-universités", cette absorbtion étant symbolisée par la disparition du métier d'"instituteur" et son remplacement par celui de "professeur d'école". L'élimination progressive du premier système n'a pas permis aux valeurs qui l'animaient, de pénétrer vraiment dans le deuxième système. En particulier, il y avait dans le premier système toute une tradition de réflexion "pédagogique", que l'on ne retrouve pas aussi forte dans le système "lycées-universités". Un bon nombre d'universitaires affichent, encore aujourd'hui, une aversion pour la pédagogie, objet de leurs sarcasmes, et qu'ils estiment nécessaire seulement pour masquer l'insuffisance de formation universitaire. Jusqu'à la création des I.U.F.M., la formation "pédagogique" des professeurs certifiés et agrégés, c'est-à-dire de la majorité des enseignants du secondaire, était dispensée au cours de l'année qu'ils passaient au C.P.R. ; elle était donc assurée par les corps d'inspection. Comme nous l'avons déjà dit, pour la majorité des inspecteurs, il allait de soi que des études universitaires poussées, devaient constituer l'essentiel de la formation d'un enseignant du secondaire.