Chapitre 2. Les Lois De 71 Sur La Formation Continue

2.1. L'existant Avant 1971

Jusqu'à la fin des années soixante, on n'observe guère d'avancées sur le problème général de la formation continue en France. Ce sont les lois de 1971 qui vont marquer un tournant significatif en ce domaine. En effet, à la suite du vote de ces lois, on assistera à une "explosion" de la formation continue, jusque-là quelque peu marginale. Avant 1971, les lieux où il se passait quelque chose, dans le domaine de la formation continue, peuvent être situés dans trois grands courants.

Tout d'abord, dans les années soixante, s'est développé dans le monde un courant qu'on pourrait qualifier de "courant humaniste", car il est centré sur l'homme et sa place dans les organisations, dans la perspective adoptée par les psychosociologues américains. Nous aurons l'occasion d'étudier ce courant de manière plus approfondie, puisqu'il sera très présent dans les années soixante-dix, et le début des années quatre-vingts. Un certain nombre d'associations peuvent être rattachées à ce courant ; elles ont, nous le verrons, formé un certain nombre d'enseignants et de formateurs. Parmi ces associations, les plus connues sont l'A.R.I.P., l'I.F.E.P.P., l'A.N.D.S.H.A., et d'autres encore.

Un autre courant, beaucoup plus ancien, a joué un rôle important dans la mise en place de la formation continue ; il s'agit de celui qu'on pourrait qualifier de "courant d'action culturelle", animé par des militants attachés à l'idée d'éducation populaire. On connaît le rôle important des nombreux mouvements d'éducation populaire qui se sont développés dans l'après-guerre. Les uns, comme le Centre de Culture Ouvrière devenu plus tard Culture et Liberté, sont plutôt issus des Jeunesses Ouvrières Chrétiennes ; d'autres, comme Peuple et Culture par exemple, sont politiquement marqués et animés par des laïcs dont beaucoup sont d'anciens Résistants. Parmi les personnes qui vont jouer un rôle actif dans la mise en place de la formation continue dans les années 70 et 80, beaucoup sont passées par ces mouvements.

Enfin, un troisième courant a joué un rôle important dans cette mise en place ; il s'agit des syndicats ouvriers. Cependant, constate Michel Cornaton, (1979, p.41), "‘alors que la formation professionnelle figure depuis longtemps dans les revendications de la classe ouvrière, elle n'apparaît à peu près jamais lors des conflits. Il est symptomatique que, dans les divers ouvrages ayant trait aux luttes sociales ou aux syndicats ouvriers, écrits avant 1970, il n'est le plus souvent rien dit de la formation."’ Cependant, dans le protocole des accords de Grenelle de mai 1968, apparaît clairement la volonté des syndicats et du partronat d'étudier les moyens permettant d'assurer, avec le concours de l'Etat, la formation et le perfectionnement professionnels.