3.7.3.7. Les Cahiers Pédagogiques Et Le C.R.A.P. 29

C'est en 1945 que paraît le premier numéro des Dossiers pédagogiques pour l'enseignement du second degré, qui deviendront, en 1948, les Cahiers Pédagogiques. "Au Ministère de l'Education Nationale, quelques grands dirigeants, et en particulier le philosophe Gustave Monod, cherchent à mettre en oeuvre des idées de transformation de l'enseignement mûries pendant la résistance, mais déjà esquissées par Jean Zay sous le Front Populaire et remontant même à l'après-guerre 14-18. La commission Langevin-Wallon mettra en musique ces idées de démocratisation de l'enseignement. (...) Monod crée, à la rentrée de 1945, des "classes nouvelles" en sixième, puis progressivement dans tout le premier cycle." C'est pour accompagner cette expérience des "classes nouvelles" que paraissent les premiers Dossiers, à l'initiative de François Goblot, professeur de philosophie à Lyon, qui précise : "Les bulletins de divers mouvements d'éducation nouvelle produisaient sur moi un sentiment d'agacement, et il y avait parfois, dans leurs propos, une pointe aiguë d'autoritatisme. (...) J'ai voulu faire une revue qui ne soit pas l'organe d'une chapelle, une revue à laquelle pouvaient collaborer des adversaires des méthodes dites nouvelles, pour lesquelles nous essayons de faire pour le mieux." Dans le premier numéro, il expose ses idées : "Il convient de changer l'esprit et les méthodes de l'enseignement et, comme il y faudra des années, il est nécessaire de s'y prendre tout de suite." L'article traite des méthodes nouvelles dans l'enseignement du second degré : la connaissance des élèves, le travail en équipe des professeurs, les centres d'intérêt, l'individualisation de l'enseignement, la nécessité d'un renouvellement perpétuel, l'imagination comme qualité maîtresse d'un éducateur.

Les Dossiers paraissent avec l'aide de l'Etat et sont publiés en même temps que le Bulletin de l'Association Nationale des Educateurs des Classes Nouvelles de l'Enseignement Secondaire. Après la disparition des Classes Nouvelles, les Cahiers sont édités par le S.E.V.P.E.N., organisme d'édition de l'Education Nationale, puis, à partir de 1964, par l'I.P.N., devenu plus tard l'I.N.R.D.P. et ensuite I.N.R.P. "Cet appui officiel n'empêchera pas les rédacteurs des Cahiers d'analyser sans concession les réformes ou pseudo-réformes", précise Jacques Georges. C'est à la suite du "Manifeste pour l'éducation nationale", publié par les Cahiers, en 1963, qu'est fondé le C.R.A.P. (Cercle de Recherche et d'Action Pédagogique), dont les Cahiers deviennent l'organe, et qui organise chaque été des Rencontres. "Pour autant," précise Jacques Georges, "s'il devient un nouveau mouvement, le C.R.A.P. ne se présente pas en rival des autres mouvements ; au contraire, les Cahiers publient, à partir de 1965, une série de fiches sur ces mouvements et sur quelques associations." Il est vrai que ce sont souvent les mêmes personnes qui, à la fois, militent dans les mouvements pédagogiques et participent aux travaux du C.R.A.P. Par exemple, à partir de 1968, l'I.C.E.M. et le C.R.A.P. co-éditent les B.T.2 et, lorsque, en 1972, lors de "l'affaire des Cahiers", le ministre Guichard fait dénoncer la convention aux termes de laquelle l'I.N.R.D.P. publiait les Cahiers, c'est l'I.C.E.M. qui se chargera de la publication : les Cahiers survivront difficilement à ce coup. Ils deviendront leur propre éditeur en 1979, et recevront de nouveau l'aide du ministère à partir de 1981. Depuis 1976, la couverture de la revue porte en exergue : "Changer la société pour changer l'école, changer l'école pour changer la société," affichant ainsi clairement les objectifs de l'association.

Les sujets des articles, alliant réflexion de fond et propositions pédagogiques concrètes, situent explicitement les Cahiers comme un outil de formation privilégié pour les enseignants, mettant ainsi en évidence le rôle qu'ils ont joué dans la formation des enseignants depuis plusieurs dizaines d'années. Les Rencontres annuelles ont constitué, et constituent d'ailleurs encore un lieu de formation pour de nombreux enseignants. Bien entendu, lorsque les M.A.F.P.E.N. se mettront en place, un certain nombre de leurs formateurs seront des lecteurs des Cahiers et utiliseront dans leurs formations, des articles extraits de cette revue. Dans ce sens, et même si le mouvement a été, comme les autres mouvements pédagogiques, peu représenté en tant que tel, ses idées ont néanmoins pénétré dans les dispositifs M.A.F.P.E.N.

Notes
29.

source : George, 1992, P.50 À 57.