4.6. Le Ministère Savary

Le nouveau ministre, nommé en mai 81, va se donner pour tâche de tenter de dépasser ces divergences. Car, pour lui, ‘"deux objectifs essentiels s'imposaient : faire évoluer le système éducatif dans le sens d'une plus grande démocratie, et améliorer la qualité de ses prestations, permettant ainsi à chacun d'aller au maximum de ses possibilités."’ (Savary, 1985, p.53). Toutes les mesures qu'il va prendre pendant les trois années où il sera ministre, sont dictées par quelques principes qu'il résume lui-même par une phrase :‘ "lutter contre les inégalités." ’(ibid, p.21). Dès son entrée en fonction, il commande une dizaine de "grands rapports", sur les différents problèmes auxquels il compte s'attaquer, et attend que ces rapports aient été publiés et discutés, pour prendre ses décisions. Parmi ces "grands rapports", figure celui sur la formation des personnels de l'Education nationale. Dans une lettre qu'il adresse, le 21 août 1981, à André de Peretti (Peretti, 1982, p.3), il lui demande de présider une commission chargée de rédiger un rapport solide sur ces problèmes, et il précise les tâches de la future commission. On y retrouve une bonne partie des idées exposées précédemment dans les rapports de l'O.C.D.E. :

La commission, composée d'un noyau d'une quinzaine de personnes, élargie à vingt-cinq, se met aussitôt au travail. Elle s'adjoint le concours de seize groupes d'études, sur différents thèmes. L'ensemble regroupe plus de 300 personnes. Le président De Peretti communique au ministre les résultats des travaux de ce groupe, sous la forme d'un rapport de 330 pages, le 22 février 1982. Six mois de travail pour un texte qui, nous allons le voir, traite de manière approfondie, de tous les aspects de la question de la formation des enseignants.

Il n'est pas exagéré de dire, et nous le montrerons tout au long de ce travail, que ce rapport a constitué un travail complet et précis sur le problème de la formation des personnels. En effet, il contient une très grande partie des dispositions prises par les différents ministres, dans les années qui ont suivi. Parmi les nombreuses propositions contenues dans ce rapport, certaines vont être adoptées aussitôt par le ministre, d'autres ne seront reprises que plus tard ; d'autres enfin sont encore aujourd'hui en train de se réaliser, comme la fusion dans un même lieu de la formation initiale et de la formation continue. Une part importante des décisions en matière de formation d'enseignants, prises par les ministres qui se sont succédé depuis cette époque, était contenue dans ce rapport. Outre la mise en place de la formation continue, citons à titre d'exemple, la décision sans doute la plus lourde de conséquences qui a été prises ces dernières années : la création des I.U.F.M. et la formation de tous les enseignants, de la maternelle au baccalauréat, en cinq ans après le baccalauréat.

Notre projet initial était de montrer que "la mise en place des M.A.F.P.E.N. avait contribué à faire évoluer le métier des enseignants du second degré vers une nouvelle professionnalité". Dans cette première partie, nous avons établi un état de ce qui existait en matière de formation continue avant la création des M.A.F.P.E.N. A travers l'étude des différentes institutions concernées par la formation continue des enseignants avant 1982, nous avons montré qu'à l'époque, cette formation continue était conçue, de manière dominante, comme la distribution de compléments de connaissances, essentiellement disciplinaires. Nous allons maintenant poursuivre notre travail dans une deuxième partie, dans laquelle nous étudierons les nouvelles dispositions prises au début des années quatre-vingts, en matière de formation continue des enseignants du second degré, en particulier dans le cadre de la rénovation des collèges. Nous étudierons également la manière dont ces dispositions ont été mises en oeuvre localement. Nous montrerons que ces nouvelles dispositions se sont appuyées sur l'expérience acquise au cours des années antérieures et que nous venons d'étudier, mais qu'elles marquent également une rupture, et introduisent un certain nombre d'innovations.