2.2.5. Qu'est-Ce Qu'un "formateur M.A.F.P.E.N." ?

Nous avons vu qu'il y avait une certaine diversité parmi les formateurs. De plus, certains avaient suivi des formations de formateurs, d'autres non. Malgré cette diversité, en septembre 82, ils allaient tous devenir "formateurs M.A.F.P.E.N." Avait-on prévu quelque chose pour tenter de donner une unité à ce groupe qui, en raison de la diversité des provenances, n'avait pas d'identité propre ? Par exemple, avait-on prévu une formation pour ces formateurs ? Nous avons déjà dit qu'en 1982, à aucun moment cela n'a été réclamé, ni même envisagé par les Chefs de M.A.F.P.E.N. Le premier chef de la M.A.F.P.E.N. de Grenoble dit lui-même : ‘"On savait que des choses étaient en place et donnaient satisfaction ; c'est pourquoi on n'est pas allé enquêter sur les formateurs, et qu'on n'a pas du tout envisagé de formation de formateurs, au début’ 63 ." A la rentrée 82, on n'a pas cherché à savoir si les formateurs recrutés avaient reçu une formation de formateurs et donc, s'il convenait d'en fournir une à ceux qui n'en avaient pas reçue. Il semble bien qu'on ne se soit pas posé la question.

Comment pourrait-on interpréter cette attitude ? Rappelons que les Chefs de M.A.F.P.E.N. étaient tous des universitaires ; ils ont donc tout naturellement pensé la formation continue des enseignants, comme une suite logique de la formation initiale que les enseignants avaient reçue à l'université, c'est-à-dire qu'ils l'ont conçue sur le modèle de l'enseignement aux étudiants. Tout était à inventer, ou à peu près tout, la liberté pour le faire était donnée, mais, dans un premier temps, et parce qu'il y avait urgence, on s'est tourné vers ce qu'on savait faire déjà. Il faut dire que, à l'époque, les écrits sur la formation continue des enseignants étaient relativement rares, et n'avaient certainement pas atteint l'ensemble des universitaires. Ces écrits émanaient, pour beaucoup, de psychosociologues qui avaient une certaine expérience dans ce domaine, puisqu'ils avaient eu l'occasion de former des enseignants, dans le cadre d'associations, comme l'A.R.I.P., l'I.F.E.P.P., l'A.N.D.S.H.A., ou d'autres encore. Ils étaient probablement les seuls à faire nettement la distinction entre "formation" et "enseignement", reconnaissant ainsi une spécificité à la formation des enseignants. Ainsi, dans l'un des rares ouvrages de l'époque, traitant de la formation continue des enseignants, on pouvait lire : "Cette dernière n'y est pas entendue comme un simple "recyclage" pédagogique, ni comme une acquisition complémentaire de connaissances ou de techniques dont l'enseignant aurait besoin pour être à jour, mais elle est prise dans sa dimension psychosociologique et institutionnelle ; en ce sens la formation s'oppose à l'information, ou du moins s'en distingue, en ce que la formation centre son action sur les agents du savoir , (sujets et institutions éducatives), tandis que l'information porte d'abord sur les objets du savoir ." (Honoré, 1981, p.13). Mais ce type de réflexion était donc limité à un petit nombre de formateurs qui avaient été en contact avec des psychosociologues. Les autres, la grande majorité des formateurs recrutés en 1982, n'ont pas été invités à réfléchir à la spécificité de la formation qu'ils allaient avoir à assurer, avant de commencer à le faire. Cependant, si, dans les M.A.F.P.E.N. naissantes, on n'a pas envisagé cette question en 1982, en revanche, le ministère, lui, a prévu une formation spécifiques des formateurs M.A.F.P.E.N., connue sous le nom de "modules I.N.R.P." C'est cette première formation de formateurs que nous allons étudier maintenant.

Notes
63.

Entretien JB, du 23/03/96.