4.2. L'accompagnement Des Équipes

Pour transformer ce climat, les équipes adoptent un fonctionnement tout-à-fait particulier. Elles se réunissent avec l'accompagnateur, une heure toutes les semaines, pour mettre en commun les informations recueillies. De plus, l'accompagnateur procède à des enquêtes sociométriques, pour dégager une photographie des relations affectives dans la classe et dans le collège. Enfin, il procède lui-même à ‘de "petites enquêtes personnelles au cours desquelles chaque élève est invité à écrire sur une feuille anonyme ce qui ne va pas, sur ce qui rend la vie au collège difficile."’ (Piloz, 1985). Une fois ce constat fait, les élèves sont regroupés par petits groupes d'entraide à propos de leur travail scolaire. D'autre part, sont institutés des groupes de discussion qui réunissent quelques élèves à propos du fonctionnement de la classe, un groupe pouvant faire appel à l'un ou l'autre professeur sur un sujet particulier dont il veut discuter avec lui. Enfin les élèves se réunissent également directement avec l'accompagnateur, sans les professeurs, pour aborder certains problèmes relationnels, sous un autre angle.

L'un des "accompagnateurs" estime que cet accompagnement d'équipe remplit quatre fonctions103. La première est de faciliter les relations à l'intérieur du groupe des enseignants, pour créer un climat favorable au travail et instaurer de meilleures relations avec les élèves. La deuxième fonction est d'aider à l'auto-analyse du groupe par lui-même, en lui fournissant des outils, ou en créant des situations où cette analyse va pouvoir se développer, ce qui peut conduire l'équipe à formuler des besoins de formation, auxquels l'accompagnateur devra répondre en trouvant les formateurs convenables. La troisième fonction consiste à aider les enseignants à travailler sur la didactique de leur discipline, dans le but d'améliorer les résultats scolaires. Enfin, la quatrième fonction est d'aider les enseignants à mieux vivre, pas seulement au sein de l'équipe, mais dans l'ensemble de l'établissement, afin d'améliorer le fonctionnement de celui-ci.

Dès cette époque, et alors que ce type de formation constitue une innovation, dans le cadre de l'éducation nationale, les formateurs pointent déjà les principales difficultés rencontrées par les membres des équipes. Tout d'abord, à l'occasion de ce travail, les enseignants découvrent "les mots" des élèves, leur culture, qui est fort différente de la leur, et cela remet en cause leur manière d'appréhender l'enseignement, leur donnant l'impression d'avoir à ‘"renoncer à quelque chose"’. Les membres des équipes rencontrent une autre difficulté, avec les autres enseignants de l'établissement, qui redoutent que l'équipe prenne les décisions à leur place, exerçant ainsi une ‘"certaine forme de terrorisme"’ dans l'établissement. Enfin, une dernière difficulté apparaît, pour les enseignants eux-mêmes, une tendance à se mettre à l'abri dans l'équipe, qui serait un ‘"endroit où on se sent en sécurité"’, alors qu'on attendait d'eux, au contraire, une certaine prise de risque.

Notes
103.

Ce qui suit est une synthèse de l'enregistrement d'une émission de France-Culture, La concertation interdisciplinaire, 1985.