5.3. La Mission Assignée À Ce Groupe

La "cellule d'appui aux établissements" a donc été créée ‘pour "mettre en place les plans de formation, dans les établissements entrant en rénovation’ 107." Dès qu'un établissement se porte candidat pour entrer en rénovation, automatiquement la cellule d'appui va dans l'établissement, et prend contact avec le chef d'établissement pour travailler sur le projet. Elle a donc un rôle pivot à jouer dans l'accomplissement de la mission prioritaire affectée aux M.A.F.P.E.N., de lier la formation à la rénovation des collèges. "En théorie," dit l'un des membres de la cellule, ‘"cela paraissait presque simple : il fallait travailler sur le projet d'établissement, identifier les problèmes les plus importants que les gens rencontraient pour mettre en oeuvre ce projet, et étudier avec eux des modalités et des contenus de formation continue susceptibles de les aider à mettre en place ce projet de manière efficace’ 108 ."

Cependant si, à première vue, la mission assignée à la cellule d'appui paraissait relativement simple à remplir, dans la réalité, cela s'est révélé plus compliqué. En effet, la situation se présentait de manière différente, selon les établissements. Au début, les premiers établissements volontaires pour entrer en rénovation, avaient déjà engagé une réflexion sur un projet de rénovation. Dans un nombre très limité d'établissements, il existait un accord entre le chef d'établissement et l'équipe enseignante, autour d'un projet et même, dans quelques cas, la demande de formation continue était déjà assez précise. Mais dans la majorité des établissements, lorsque la cellule d'appui a cherché à mettre en place le plan de formation, elle s'est vite rendu compte que le projet n'était encore qu'à l'état d'embryon. Rappelons que les membres de la cellule avaient déjà eu l'occasion de travailler sur des projets, puisque un certain nombre d'entre eux avaient participé à la mise en place de Zones d'Education Prioritaires, dans leur secteur géographique. Dans beaucoup d'établissements, on a alors constaté que des idées avaient été émises, que ces idées avaient souvent recueilli une large adhésion dans le collège, mais on n'était pas allé jusqu'à réfléchir aux difficultés qu'allait poser leur mise en oeuvre concrète, en terme d'horaires, d'emploi du temps, de répartition des rôles, de choix de nouveaux contenus, etc...

Or, le Rectorat n'avait pas prévu d'aider lui-même les établissements dans leur démarche d'élaboration de ces projets de rénovation. Nous avons dit plus haut que, à Lyon, un principal de collège avait été chargé par le Recteur, de coordonner l'action du rectorat et celle de la M.A.F.P.E.N., auprès des collèges en rénovation, c'est pourquoi la cellule d'appui a travaillé régulièrement avec ce chargé de mission. Mais le rôle de celui-ci était institutionnel, puisqu'il était le représentant du Recteur, c'est-à-dire qu'il était le garant de l'institution ; il devait veiller à ce que les établissements élaborent des projets conformes aux textes et règlements, qu'ils restent dans la légalité, en quelque sorte. ‘"Il allait dans les établissements pour impulser des directions de travail, des thèmes qu'il ne fallait pas perdre de vue. De plus, il devait essayer de faire en sorte que les projets d'établissement restent dans le cadre des règles en vigueur dans l'éducation nationale. Il est vrai qu'à partir du moment où on a introduit la logique du projet d'établissement, on créait nécessairement un conflit dans les établissements, entre la logique verticale, bureaucratique, hiérarchique, et une autre logique, horizontale, de concertation entre les acteurs locaux, et cette logique n'est pas forcément en harmonie avec la première. Alors forcément, cela créait des difficultés et donc, le rôle de M.D. était de permettre à cette nouvelle logique de fonctionner, mais dans le respect du cadre institutionnel. (...) Mais pour tout ce qui était de l'élaboration de projets, de la méthode à mettre en oeuvre, il nous [la cellule] laissait le terrain libre ; (...) il n'intervenait pas sur les contenus pédagogiques’ 109 ."

La cellule avait donc entière liberté pour agir, ce qui veut dire qu'elle avait tout à inventer, ou presque tout. Par conséquent, c'est la M.A.F.P.E.N., et en l'occurrence la cellule d'appui, qui a dû aider les établissements à poursuivre l'élaboration de leurs projets, avant de pouvoir commencer à remplir la mission qui lui avait été confiée, c'est-à-dire la construction des plan de formation. Dès cette première année, la cellule s'est trouvée en présence d'établissements "qui croyaient avoir un projet, mais ils n'en avaient pas vraiment, juste des intentions 110 ". Si bien que la rôle de la cellule d'appui s'est en quelque sorte élargi : avant de pouvoir établir le plan de formation de l'établissement, il lui a fallu aider les équipes à affiner le projet de rénovation, à le rendre opérationnel.

Il s'agissait alors, pour les membres de la cellule, ‘"d'apporter un appui méthodologique aux établissements, dans un positionnement de tiers extérieur, et non de formateur’ 111 ." La situation a rendu obligatoire un élargissement du rôle de la cellule, dont la tâche n'était pas facile, et est d'ailleurs devenue de moins en moins facile, au cours des années suivantes. En effet, les établissements entrant en rénovation ont été de moins en moins souvent volontaires, donc de moins en moins avancés dans l'élaboration du projet, et surtout de moins en moins motivés. Par conséquent, la cellule a dû axer de plus en plus son action sur l'aide au projet, avec des résultats d'ailleurs plus ou moins positifs selon les collèges. ‘"Là, la situation a été beaucoup plus délicate, parce que les principaux, les profs s'en foutaient d'être en rénovation ou pas ; le recteur leur imposait notre venue, alors ils acceptaient ; et puis il se passait des choses très diverses. Parfois, ça débouchait, c'était intéressant ; parfois ça ne débouchait pas du tout’ 112 ."

Pendant les trois années où elle a fonctionné, l'objectif de la cellule était d'obtenir la participation de la totalité du personnel de l'établissement, à l'élaboration du projet, de manière à en faire un projet capable d'obtenir l'adhésion de tout l'établissement. Les membres de la cellule d'appui ont donc souvent été conduits à animer des assemblées générales d'établissement. Ils intervenaient d'ailleurs toujours par deux, dans les établissements‘. "Il y avait beaucoup de problèmes à gérer en même temps,"’ ‘ précise l'un d'eux, ’ ‘"et si on se loupait, cela provoquait des réactions agressives. Mais en même temps, il fallait arriver à décoder ce qui se passait entre les différents groupe d'enseignants ; on avait donc plein de choses à décoder, en même temps qu'on devait animer, et faire en sorte que les choses débouchent’ 113 ." C'est pour animer ces grands groupes ‘que "la cellule est en recherche de méthodes d'animation de grands groupes"’ . (Cellule d'appui, 1984). Etant donnée la diversité des établissements et les différences importantes dans l'avancement des projets, la durée des interventions de la cellule d'appui dans les établissements a donc été très variable.

Notes
107.

ibid.

108.

ibid.

109.

ibid. Nous n'avons pas pu interroger directement Michel Delay, le chargé de mission, celui-ci étant aujourd'hui décédé.

110.

ibid.

111.

Entretien FB, du 03/10/97.

112.

Entretien GS, du 18/05/98.

113.

Entretien GS, du 09/01/98.