Chapitre 3. Les Conflits, Signes D'une Diversification Des Conceptions De La Formation

3.1. Des Conflits Violents

Nous avons eu plusieurs fois l'occasion d'évoquer ces conflits. A première vue, on pourrait penser qu'il s'agit de conflits entre plusieurs formateurs briguant le même poste. Cela ne nous semble pas être la seule analyse possible puisqu'on sait qu'à l'époque, la quantité de crédits affectés à la formation continue était importante. L'avis général des personnes que nous avons interrogées est qu'il y avait de la place pour tout le monde. En revanche, certains avancent qu'il s'agissait de conflits "d'écoles". Nous avons vu que, au début, un certain nombre de formations se sont mises en place rapidement, avec des personnes volontaires ayant proposé leurs services. Ensuite, plusieurs injonctions ministérielles, l'arrivée de personnes apportant un regard différent sur la formation continue, etc..., ont obligé les responsables à s'interroger sur la direction dans laquelle il convenait d'orienter l'évolution de cette formation. C'est à partir de ce moment-là que les conflits ont commencé à se développer : chacune des "tendances" défendait fermement son point de vue et, au lieu d'une coopération, s'installait un rapport de force. Chacun "campait sur ses positions", en essayant "d'emporter le morceau", dit aujourd'hui l'un des protagonistes161. Ceux qui cherchaient à se tenir en marge des conflits et recherchaient un terrain d'entente et de coopération, étaient peu nombreux. Ce qui évidemment apparaît très peu à travers les documents écrits, mais est évoqué par tous les acteurs de l'époque, c'est la violence des débats entre les différentes tendances. "C'était très passionnel, on voulait la mort de l'autre", dira l'un des acteurs162.

Peut-on essayer de comprendre, au bout de quinze ans, ces attitudes quelque peu rigides ? Pour la plupart des acteurs, la situation était nouvelle, il fallait innover, prendre des risques, et on n'était pas assuré d'être dans le bon chemin. Mais n'est-ce pas précisément quand on doute de ce qu'on fait, qu'on s'accroche avec le plus de force aux choses auxquelles on croit ? Il nous semble que ces attitudes rigides traduisent une difficulté à prendre du recul par rapport aux dispositifs mis en place. Manque de recul d'ailleurs bien compréhensible, face à une tâche nouvelle d'une telle ampleur, d'autant plus qu'on était encore loin, à l'époque, d'être familiarisé et même, dans certains cas, d'avoir construit, les référents scientifiques qui auraient pu faciliter cette prise de recul.

Nous l'avons vu, les uns défendaient l'absolue nécessité de la Pédagogie générale ; d'autres cherchaient à conduire les équipes de recherche de terrain vers davantage de rigueur scientifique ; d'autres encore misaient sur l'aide à l'élaboration de projets de rénovation dans les établissements ; etc... Ces conflits ont donc opposé les différentes conceptions de la formation que nous avons décrites précédemment. Tentons une analyse de certains de ces conflits, en commençant par celui qui s'est déclaré dès la création des M.A.F.P.E.N.

Notes
161.

Entretien EV, du 12/12/97.

162.

ibid.