3.2. Le Conflit Entre Les Universitaires Et Les Corps D'inspection

Nous l'avons déjà évoqué, puisqu'il a en quelque sorte été généré par la volonté du ministère d'introduire les universitaires dans la formation des enseignants. Cette prééminence accordée aux universitaires ne pouvait s'établir qu'au détriment des corps d'inspection, qui étaient jusque là les seuls à "régner" sur la formation des enseignants. Or la contestation de cette hégémonie se développait de plus en plus. Nous avons vu que cette contestation était très vive au S.G.E.N.-C.F.D.T., par exemple, où on considérait que le rôle premier d'un inspecteur étant d'inspecter, il ne pouvait pas à la fois former les enseignants, pour ensuite les inspecter, ce qui reviendrait à juger en quelque sorte son propre travail. Il semble donc difficile, voire même impossible et peu souhaitable de cumuler la fonction de formateur avec celle d'évaluateur.

Mais l'habitude était installée et les corps d'inspection ont ressenti les nouvelles dispositions comme la privation d'une prérogative à laquelle ils tenaient. Le premier chef de mission dit163 qu'il y avait tension entre les I.P.R. et les universitaires, en terme de compétences ; car les I.P.R. ne voyaient pas l'intérêt de cette formation, puisqu'ils considéraient qu'ils la faisaient déjà eux-mêmes. Il s'agissait donc pour les corps d'inspection de "défendre leur territoire 164 ."

Au niveau local, le conflit s'est traduit, nous l'avons dit, par des batailles pour les présidences des différentes commissions de la M.A.F.P.E.N., dont un certain nombre sont restées aux mains des I.P.R. Or, les I.P.R., de par leur appartenance disciplinaire, envisageaient difficilement l'aspect interdisciplinaire. Ils considéraient la formation comme leur domaine réservé. ‘"Il y avait des conflits avec les corps d'inspection en particulier. Il y avait des commissions qui ont été traversées par des drames, quoi’ 165 ," dit l'un des collaborateurs de l'époque.

On voit donc que s'opposent ici, et sans doute pas seulement à Lyon, deux conceptions de la formation, l'une essentiellement axée sur la discipline et envisageant la formation de manière individuelle. En effet, ni le travail d'équipe, ni la dynamique de l'établissement, ne sont pris en compte par les I.P.R., lorsqu'ils viennent inspecter les enseignants dans leur classe ; aujourd'hui encore l'évaluation des enseignants se fait de manière individuelle, montrant l'insistance de chaque Inspection pédagogique à défendre sa propre discipline.

Notes
163.

Entretien JB, du 17/02/94.

164.

Entretien RG, du 29/06/94.

165.

Entretien RG, du 29/06/94.