Chapitre 2. Des Établissements Où Ont Eu Lieu Des Actions M.A.F.P.E.N.

2.1. Le Collège François Truffaut, À Rive De Gier

2.1.1. L'élaboration D'un Projet De Rénovation

En fonction des personnes qui ont bien voulu répondre à nos questions, ainsi que des documents que nous avons pu retrouver, nous avons eu la possibilité d'étudier deux collèges où ont eu lieu des actions de la M.A.F.P.E.N. pendant la période allant de 1982 à 1986-87. Le premier est le collège François Truffaut, à Rives de Gier, dans le département de la Loire. Il a fait partie de la première "vague" des collèges en rénovation. Nous avons vu que, pendant l'année scolaire 83-84, avait été lancée l'opération Rénovation des collèges, que les Recteurs devaient mettre en oeuvre. Le principal du collège raconte : ‘"Il y a eu une réunion par département, pour nous mettre au courant de cette intention ministérielle de rénover les collèges. (...) Ce n'était pas forcément en lien avec le projet Legrand ; on pouvait s'inspirer du projet Legrand, ou faire autre chose. On devait présenter à la hiérarchie, un projet de rénovation - on ne disait pas encore projet d'établissement - et on était validé ou pas’ 208 ." Or le principal savait que le personnel était interpellé par l'échec scolaire qu'il constatait, conseil de classe après conseil de classe. Il lui semble donc que la situation ‘était "mûre pour mettre quelque chose en place"’ . Des discussions conduisent à envisager un fonctionnement en ‘"groupes de niveau, avec des changements trimestriels possibles."’ Cette idée va servir de base au projet de rénovation de l'établissement.

L'établissement se porte donc candidat auprès du Rectorat pour entrer en rénovation. Or nous avons vu que, dès lors qu'un collège avait posé sa candidature, la cellule d'appui aux établissements en rénovation intervenait automatiquement‘. "La cellule d'appui a donc d'abord aidé l'établissement à élaborer son projet’ ‘, dit un membre de la cellule d'appui’ ‘. (...) La première fois qu'on est arrivé dans l'établissement, on s'est rendu compte, avec le chef d'établissement, qu'il n'y avait pas vraiment de projet’ 209 ." Pour cela, elle a organisé des assemblées générales de tout le personnel, au cours desquelles ont été repérés les grands axes du projet, dont l'objectif général était bien entendu l'amélioration de la réussite scolaire des élèves. Voyons quels étaient ces axes.

Le projet, prévu pour fonctionner à partir de la rentrée 1984, part du constat que ‘"les rythmes d'acquisition varient suivant les élèves et les disciplines’ 210 ." Il fait donc l'hypothèse qu'en respectant mieux le rythme d'acquisition des connaissances des élèves, on réduira l'échec scolaire. Le premier axe du projet est basé sur cette hypothèse. Il concerne les maths, les lettres, l'anglais et l'histoire-géographie. Il consiste à découper l'ensemble des programmes de sixièmes et cinquième en cinq U.V. (Unités de valeurs), d'une durée d'un trimestre chacune. Sur les deux années de sixième et de cinquième, il restera donc une marge de un trimestre. A la fin de chaque trimestre, on décide si l'élève peut passer à l'U.V. suivante ou s'il doit recommencer, utilisant pour cela le trimestre restant. Cette possibilité est donc offerte une seule fois sur les deux années. Si elle n'a pas été utilisée, le trimestre restant sera occupé par une U.V. d'approfondissement. Il résulte de cette organisation qu'à un moment donné, les différents groupes d'élèves n'en sont pas tous au même point dans le programme. Dans cette organisation, les classes de sixième et de cinquième ne sont plus distinctes, mais forment véritablement un cycle en deux ans. Cette possibilité existait dans les textes, sous la dénomination de cycle d'observation, mais n'avait généralement pas de réalité sur le terrain.

Le deuxième axe du projet concerne également les sixièmes et cinquièmes. Il consiste à réduire les séquences de cours à cinquante minutes, au lieu de cinquante-cinq, la durée d'un cours pouvant être de une, une et demi ou deux séquences. On récupère ainsi du temps, qui sera restitué sous la forme d'une "demi-journée blanche", trois fois par mois. Le contenu de ces demi-journées est variable ; cela peut être ‘"soutien, approfondissement ; activités culturelles (conférences, sorties pédagogiques); travaux autonomes (C.D.I.) ; travaux de groupes ou encore travaux interdisciplinaires."’ (ibid, p.1)

Le troisième axe du projet concerne l'ensemble de l'établissement, puisqu'il concerne tous les professeurs. Il s'agit de l'organisation de concertations, le temps nécessaire à ces concertations étant pris sur le temps récupéré par le passage aux séquences de cinquante minutes. On instaure d'une part une ‘"concertation hebdomadaire par discipline"’, pour assurer le suivi des U.V. et organiser le contrôle continu, et d'autre part une ‘"concertation mensuelle et interdisciplinaire"’ , pour le suivi du projet et l'organisation des demi-journées blanches. Enfin, le dernier axe du projet concerne les classes de quatrième et de troisième, pour lesquelles une partie du temps des cours de Dessin, Musique, E.M.T. et E.P.S. est gérée par un système d'options.

On voit qu'il s'agit d'un projet ambitieux par la complexité de l'organisation qu'il suppose. Il s'inspire largement des propositions contenues dans le rapport Legrand, même s'il ne les reprend pas point par point. En effet, on retrouve d'une part l'idée de groupe de niveau-matière et, d'autre part, celle de la gestion souple du temps. C'est donc un projet de grande ampleur, puisqu'il implique un changement complet dans l'organisation du fonctionnement du collège.

Notes
208.

Entretien XR, du 04/03/98.

209.

Entretien GS, du 18/05/98.

210.

Cf annexe n°6 : Collège (1984)