5.3. L'industrie pétrolière au Mexique

Le début des activités pétrolières au Mexique date de la deuxième moitié du XIXème siècle. En 1863, déjà, le prêtre Manuel Gil y Saenz annonçait sa volonté d'exploiter un gisement pétrolier capable de produire jusqu'à 10 bbl/jour. De même, les premières concessions pétrolières datent de 1864, lorsque l'empereur Maximilien accorde 38 concessions à des particuliers.

Cependant, c'est seulement en 1882 que la première découverte commercialement exploitable est réalisée. Ce qui va réveiller l'intérêt des compagnies internationales pour le potentiel pétrolier du Mexique. C'est ainsi qu'en 1885 s'implante dans ce pays une entreprise subsidiaire de la Standard Oil, la Waters Pierce Oil Company.

Au cours des ans, d'autres compagnies s'installeront au Mexique ; surtout après que Porfirio Diaz eut fait approuver, au cours des premières années de ce siècle, une législation minière très libérale, par laquelle les minéraux existant dans le sous-sol appartenaient au propriétaire de la terre.

Avec ces mesures, le gouvernement mexicain voulait attirer des capitaux étrangers pour investir dans le secteur de l'extraction minérale, stratégie adoptée pour développer l'économie nationale. Pour l'industrie pétrolière cela a signifié une augmentation des activités liées à la recherche et à la production.

Ainsi, à partir de 1910 le Mexique devient un exportateur de brut, la production étant passé de 10.000 barils produits en 1901, à 3,9 millions en 1908, 55 millions en 1917 et 193,4 millions en 1921.

A la veille de la première guerre mondiale, le Mexique était déjà le deuxième producteur mondial de pétrole, juste après les États-Unis. De ce fait, le pétrole mexicain a joué un rôle non négligeable dans le ravitaillement des alliés durant le conflit, surtout des Anglais.

Parallèlement à l'accroissement de la production de brut du pays, les conditions politiques allaient changer radicalement. Après 35 années de pouvoir, le régime de Porfirio Diaz prend fin en 1911, donnant lieu à une période très agitée de la vie politique mexicaine et qui se prolongera jusqu'à 1917, date de la Révolution Mexicaine.

En 1917 se met en place un régime politique aux orientations nettement populaires et nationalistes, ce qui sera à l'origine d'une intervention plus active de l'Etat mexicain dans l'industrie pétrolière. Dès 1917 même, la Constitution qui vient d'être promulguée opère un changement fondamental dans la législation pétrolière. Désormais, la propriété du sous-sol revient à l'Etat, lequel peut concéder le droit d'exploitation à des tiers.

Cette nouvelle législation représente un pas décisif vers le contrôle de l'industrie pétrolière par l'Etat mexicain, ce qui sera renforcé par la création en 1925 de la CAPN, organe chargé du contrôle et de la fiscalisation des activités des compagnies pétrolières. Date de 1917 également la mise en place institutionnelle d'un ensemble de droits accordés aux ouvriers, en particulier la journée de huit heures, un jour de repos par semaine et le droit d'organisation syndicale.

Dans l'industrie pétrolière cela va entraîner le développement des activités syndicales et revendicatives des ouvriers ; et ce d'autant plus qu'à partir de 1922 les entreprises du secteur commencent à licencier massivement pour compenser la baisse de la production. En effet, après avoir représenté 25 % de la production mondiale, l'industrie pétrolière mexicaine entre en crise dans les années 20. L'épuisement des gisements les plus anciens, allié au choix des grandes compagnies installées dans le pays (Standard Oil, Shell et Gulf Oil) d'investir dans les nouvelles zones productrices du Venezuela et du Texas, où les législations minières étaient plus libérales qu'au Mexique, font décroître la production pétrolière mexicaine.

Ce n'est que dans les années 30 que la production va gagner un nouvel essor, mais sans jamais atteindre les niveaux de 1921. Au cours de cette période, la position du gouvernement mexicain vis-à-vis des compagnies privées agissant dans le secteur, se caractérise par la volonté d'augmenter les moyens de contrôle sur leurs activités. Ainsi, en même temps que l'Etat incite les ouvriers de la branche à revendiquer des augmentations de salaires et des amélioeations des conditions de travail, il fait passer en 1931 une loi obligeant les entreprises pétrolières à embaucher au moins 90 % de leurs personnels parmi les citoyens mexicains.

De même, en 1934 est créée l'entreprise nationale PETROMEX chargée d'exploiter et de produire du pétrole sur les terrains appartenant à l'Etat. Cependant, les résultats obtenus par cette compagnie ont été très médiocres, surtout en raison du manque de connaissances techniques et de moyens matériels convenables.

En 1934 a lieu également l'élection de Làzaro Càrdenas à la présidence de la République, ce qui va marquer davantage la vie politique mexicaine. De fait, l'administration Càrdenas s'est caractérisée par la volonté de réaliser les objectifs sociaux de la révolution mexicaine. Le développement des procédures de réforme agraire, la création de structures syndicales nationales et la nationalisation des secteurs considérés comme stratégiques, sont exemplaires de quelques-unes de ces réalisations.

Le gouvernement Càrdenas a tenté de créer une coalition politique capable de soutenir politiquement le processus d'industrialisation autonome du pays, donnant aux entreprises mexicaines des conditions privilégiées de compétitivité sur le marché intérieur et rendant difficile l'accès de capitaux et de produits étrangers à l'économie mexicaine. Le tout sur fond de discours nationaliste de mobilisation populaire.

Étaient engagés dans ce projet des secteurs de la bourgeoisie nationale, attirés par l'idée d'établir un système économique protectionniste et nationaliste, et des classes populaires – en particulier les ouvriers urbains et les petits paysans – auxquels le gouvernement promettait une participation plus importante dans la vie politique. Ainsi, le régime politique cardeniste tirait sa légitimité du soutien des mouvements populaires et de l'adoption de mesures économiques bénéfiques au secteur industriel du pays ; ce qui le rapproche des régimes politiques populistes qui commençaient à se développer dans d'autres pays de l'Amérique Latine.

Dans ce climat politique favorable, les ouvriers de l'industrie pétrolière unifient en 1935 leurs différents syndicats au sein d'un syndicat de représentation nationale, le STPRM (Syndicat des travailleurs du Pétrole de la République Mexicaine). Ce syndicat va développer sa pratique en ayant pour objectif d'établir un contrat collectif unique avec toutes les entreprises du secteur.

De cette manière, lors de la première négociation collective du nouveau syndicat avec les compagnies pétrolières, les représentants ouvriers vont demander des améliorations des conditions de travail et des augmentations de salaires ; ainsi que l'unification des différents niveaux salariaux existants dans la branche entre les entreprises pour une même fonction. Face aux résistances du secteur patronal à accepter ces mesures, une grève nationale est lancée, paralysant en peu de temps la plupart des activités pétrolières du pays.

Cette situation, qui menaçait de bloquer l'économie mexicaine, va faire intervenir dans le conflit la justice du travail ; laquelle jugera pertinentes les revendications syndicales et ordonnera leur application immédiate par les entreprises pétrolières.

Le refus des compagnies d'accepter et d'adopter cette décision donna un argument au Président Càrdenas pour décréter, le 18 mars 1938, la nationalisation de l'industrie pétrolière mexicaine.

Cette mesure va mobiliser plusieurs groupes sociaux autour du projet cardeniste, à commencer par les ouvriers du secteur pétrolier qui avant même la nationalisation, exprimaient déjà leur soutien à la prise de contrôle du secteur par l'État. De plus, la nationalisation du secteur pétrolier, mesure fortement populaire, signifie la montée en puissance du nationalisme économique dans la politique mexicaine. D'autant plus que, suite à la nationalisation, le cartel pétrolier international, soutenu par les gouvernements de la Grande-Bretagne et des États-Unis, impose le boycott du pétrole mexicain. Si pour les entreprises internationales du pétrole il s'agissait de dissuader d'autres États producteurs de brut d'instaurer des politiques nationalistes sur le pétrole, du côté du gouvernement mexicain ce boycott fit se renforcer la cohésion autour du gouvernement et le soutien populaire à la décision prise.

A la suite de la nationalisation, trois compagnies nationales ont été créées : une, chargée de l'exploitation et du raffinage (PEMEX), une autre, chargée de la commercialisation des produits pétroliers (Distribuidora de Petroleos Mexicanos) et la dernière, chargée de la coordination de l'ensemble de l'industrie (Administracion General de Petroleo Nacional). Ces trois entreprises ont signé un accord avec le syndicat, par lequel elles se déclaraient dans l'impossibilité de mettre en place les décisions de la cour de justice, mais s'engageaient à les adopter le plus vite possible. A titre provisoire les compagnies concédaient des augmentations salariales de 15 à 20 % au-dessous de celles accordées par la cour de justice, lors du conflit opposant syndicats et entreprises nationales.

L'argument principal des entreprises nationales pour proposer cet accord fut leurs difficultés financières, occasionnées par le boycott établi par les pays auxquels appartenaient les compagnies pétrolières nationalisées (États-Unis et Grande-Bretagne principalement). De plus, le pays n'ayant ni techniciens formés en nombre suffisant pour assurer la continuité opérationnelle des installations, ni un parc industriel capable de fournir des pièces de rechange pour l'industrie pétrolière, le départ des techniciens étrangers et l'interdiction d'importations des équipements avaient fait baisser considérablement la productivité des activités pétrolières au Mexique.

Mais, au delà de ces arguments économiques, d'autres raisons peuvent expliquer l'acceptation de cet accord par les ouvriers. Tout d'abord, la réaction agressive des pays dont les entreprises expropriées étaient originaires a été utilisée par le gouvernement comme un moyen d'affirmation du caractère nationaliste et progressiste de la nationalisation de l'industrie du pétrole. D'autant plus que la possibilité d'une intervention Armée des États-Unis n'était pas complètement écartée (Gayson, 1980).

En outre, les syndicats désiraient accroître leur pouvoir dans les structures des entreprises nationales du pétrole, en créant une situation semblable à celle de la compagnie nationale des chemins de fer dans la direction de laquelle les ouvriers avaient une place importante (González, 1980).

Cependant, très rapidement cette situation d'entente entre syndicats et gouvernement allait se modifier. L'éclatement de la deuxième guerre mondiale en 1939 a signifié pour le Mexique la perte de ses derniers clients, l'Allemagne et ses alliés ; les seuls à ne pas avoir adopté le boycott commercial contre le pétrole mexicain. Cela va entraîner une aggravation de la situation économique des entreprises publiques du pétrole, les empêchant d'honorer les accords passés avec les syndicats.

En même temps, la résistance du gouvernement à accepter la participation des ouvriers à la gestion des entreprises pétrolières et la non application des arrêts de la cour de justice de 1937 vont rendre difficiles les relations entre les compagnies nationales et le syndicat.

La situation va devenir encore plus critique après que le gouvernement eut mis en place un ensemble de mesures visant à améliorer l'état financier du secteur et à donner plus de pouvoir à la direction vis-à-vis des syndicats. Parmi ces mesures, les plus importantes étaient :

Au fur et à mesure que ces changements avaient lieu, la résistance du syndicat devenait plus importante, avec l'organisation de mobilisations, y compris de plusieurs grèves. La solution finale à ces conflits allait être donnée seulement en 1946, quand le gouvernement, se servant de la législation syndicale, réprime les mouvements des ouvriers du pétrole et décrète l'intervention au sein du STPRM.

Cela allait entraîner deux conséquences immédiates, à savoir : 1) l'augmentation du pouvoir de PEMEX dans la réorganisation des relations entre capital et travail dans l'ensemble de l'industrie pétrolière et 2) la prise du pouvoir au sein du STPRM d'une tendance syndicale qui allait se caractériser par une "bureaucratisation syndicale", la corruption et la coopération avec la direction de l'entreprise.

Ainsi, par la suite, les relations entre syndicats et direction à l'intérieur de PEMEX se caractériseront par une sorte de coopération entre direction de l'entreprise et leaders syndicaux, où, en échange de l'absence de mobilisation des ouvriers, le syndicat était récompensé par certains avantages institutionnels et par le maintien d'une situation relativement privilégiée des ouvriers du pétrole par rapport à la moyenne des travailleurs mexicains. Parmi les avantages institutionnels accordés aux syndicats les plus importants figuraient l'obligation de syndicalisation de tous les travailleurs de PEMEX, excepté les travailleurs de confiance, et la perception de commissions lors de la signature de contrats entre PEMEX et d'autres entreprises pour la construction ou l'expansion d'unités de production.

D'une façon générale, ce système de relations industrielles se maintiendra dans l'industrie pétrolière mexicaine jusqu'aux années 80, où d'importants changements se mettront en place pour accompagner l'évolution de la conjoncture mexicaine. Nous y reviendrons.

Parallèlement à ces faits, d'importantes transformations se produisaient dans la structure économique et dans la vie politique du Mexique. Tout d'abord, après la période populiste correspondant à la présidence de Làzaro Càrdenas (1934-1940), le Mexique va connaître une autre direction politique. Le fait est que les résistances des secteurs les plus conservateurs de la société mexicaine aux politiques cardénistes, en particulier la place donnée aux mobilisations populaires, ont abouti à ce que les groupes les plus modérés du parti gouvernemental (PRI) prennent en mains le contrôle politique du pays, en faisant élire Avila Camacho à la présidence de la République en 1940.

Cela aura pour conséquences des changements importants dans la politique mexicaine, parmi lesquels le contrôle des mouvements populaires et l'abandon de l'attitude anti-impérialiste de Càrdenas. En même temps, l'Etat mexicain accroît sa participation dans l'économie, devenant le principal acteur du processus d'industrialisation du pays. Cela signifie qu'après 1940, ce sera plutôt le discours nationaliste de Cardenas qui sera mis en cause, et non le principe même de l'interventionnisme étatique dans l'économie, y compris dans l'industrie pétrolière.

Par ailleurs, au vu du caractère fortement symbolique du pétrole dans la politique et dans la société mexicaine, les gouvernements qui se succéderont après 1940 ne remettront jamais en cause le principe de la nationalisation de l'industrie pétrolière. Cela même après la régularisation des relations du Mexique avec les USA et la Grande-Bretagne, pays les plus fermes dans la condamnation de la politique pétrolière mexicaine. Le gouvernement du Mexique, en acceptant de payer des indemnisations aux entreprises expropriées (cela seulement à partir de 1948), obtient de ces deux pays la reconnaissance de l'irréversibilité, à court terme, de la nationalisation du pétrole.

Toutefois, cela n'a pas empêché que le pétrole mexicain ait été pratiquement banni des échanges pétroliers mondiaux ; ceci en raison du contrôle que les Majors avaient sur le marché mondial du pétrole à cette époque. D'autant plus qu'après la nationalisation la production mexicaine entre en crise, alors même qu'à l'échelle mondiale les exceptionnels gisements pétroliers du Moyen-Orient commencent à être exploités.

Ce sera seulement à partir de la deuxième moitié des années 70 que le Mexique va retourner sur le marché mondial du pétrole, à la suite d'importantes découvertes pétrolières dans la région du Golfe du Mexique.

Ceci explique le fait que pendant la période qui va de la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu'aux années 70, la politique pétrolière mexicaine a été dirigée vers le marché intérieur ; l'offre abondante de produits pétroliers à bon marché étant un des piliers de la stratégie économique de l'Etat mexicain.

Si l'adoption de cette politique a permis pendant un certain temps à l'industrie mexicaine, d'une manière générale, d'augmenter sa compétitivité vis-à-vis de l'industrie d'autres pays, pour la compagnie pétrolière (PEMEX) cela a signifié la perte progressive du pouvoir d'investissements et un ralentissement de la croissance de sa production de brut ; cela au point que, en 1973, le Mexique en devient importateur (Sepulveda, sans date).

En revanche, les difficultés économiques du Mexique, à la suite de la crise économique mondiale consécutive au premier choc pétrolier, vont mettre en évidence la nécessité de changements dans la politique pétrolière du pays. En raison même de la part du pétrole dans la consommation d'énergie du Mexique, 86 % en 1976 selon Grayson(1980), le gouvernement va adopter une politique de capitalisation de son entreprise pétrolière, à travers l'augmentation des prix des produits pétroliers et l'adoption d'importants changements dans l'organisation interne de PEMEX.

Les découvertes de 1976 n'allaient que renforcer cette tendance ; dans la mesure où la compagnie avait besoin de moyens financiers importants pour développer l'exploitation des nouveaux gisements, mais aussi dans la mesure où l'exportation du pétrole devenait une importante source de financement pour le gouvernement, la restructuration interne de PEMEX revenait à l'ordre du jour.

De plus, la coïncidence entre l'augmentation de la production pétrolière mexicaine et le deuxième choc pétrolier, allait faire du pétrole le principal produit d'exportation du Mexique. En ce sens, PEMEX allait devenir le pilier central de la politique de développement du pays, l'excédant pétrolier constituant le principal moyen de financement des dépenses publiques.

Cependant, la baisse des prix internationaux du pétrole dans les années 80 et la crise de la dette extérieure vont faire retomber le pays dans la récession. Cette situation critique va se traduire par une conjoncture économique très difficile et par l'aggravation des problèmes sociaux du pays ; ce qui va amener la classe politique mexicaine à adopter un programme économique d'orientations libérales basé sur les recommandations du FMI.

Ainsi, à partir du gouvernement de Miguel de la Madrid (1982-1988) va se mettre en place une politique économique dont les principales caractéristiques seront :

Ce processus va s'intensifier sous le gouvernement de Carlos Salinas de Gortari à partir de 1988, surtout à travers de sensibles réformes constitutionnelles (privatisations dans des secteurs où l'Etat exerce le monopole et changements dans la législation des droits des travailleurs, jugée trop protectrice). L'Etat mexicain va accentuer sa politique d'ouverture aux investissements extérieurs et de libéralisation de l'économie.

Tout ce processus s'inscrit aussi dans la logique de construction d'un Marché Commun de l'Amérique du Nord (NAFTA), englobant le Mexique , le Canada et les États-Unis. Ce marché naît officiellement en 1995 et engage les trois pays au respect de certaines règles de concurrence ; notamment celles contraires aux régimes de monopoles, étatiques ou autres.

En ce qui concerne l'industrie pétrolière mexicaine ces transformations sont lourdes de conséquences. Tout d'abord, quoique le Mexique ait réussit à imposer que le monopole d'Etat sur le pétrole ne soit pas remis en cause avec les accords du NAFTA, la législation pétrolière est interprétée par le gouvernement de façon de plus en plus flexible. Lors des négociations pour la signature du traité de libre échange, le Secrétaire du Commerce déclare que seuls les secteurs de l'industrie pétrolière attachés à des limitations constitutionnelles (recherche, exploitation, raffinage, stockage et commercialisation de gros) devaient rester en dehors des négociations, ce qui ouvrait la possibilité de participation de capitaux privés dans la pétrochimie de base, par exemple (Diaz, 1992).

Bien que la position du gouvernement ait changé depuis lors, plusieurs analystes considèrent qu'il y a une tendance à la libéralisation du secteur, ce qui pourrait conduire à une participation plus importante des capitaux privés, nationaux ou étrangers, dans l'industrie du pétrole ou même à une privatisation de l'ensemble de la branche (Diaz, 1992), (Couffignal, 1993).

De plus, sur le plan des relations entre PEMEX et ses employés, des changements peuvent être remarqués. La crise de l'industrie pétrolière mondiale des années 80 encourage le gouvernement mexicain à restructurer sa compagnie nationale. Des mesures visant à augmenter la productivité sont alors instaurées ; lesquelles s'inscrivaient dans une logique visant à amplifier les pouvoirs de la direction de l'entreprise par rapport au syndicat sur des sujets liés à l'organisation du travail.

Face à l'opposition des syndicalistes à ce projet, l'Etat va déclencher une action répressive à l'égard de la bureaucratie syndicale qui monopolisait le pouvoir syndical au sein du STPRM depuis les années 60. Cela va entraîner l'emprisonnement pour corruption, en 1989, du principal leader syndical des travailleurs de l'industrie pétrolière et la perte de pouvoir du syndicat dans la vie interne de PEMEX.

Cela laisse le chemin ouvert à ce que l'entreprise, sous l'argument d'une réduction de coûts, licencie 30.000 de ses employés, ainsi que 60.000 travailleurs temporaires, au cours des dernières années. De même, l'entreprise est parvenue à faire inclure environ 25.000 employés dans la catégorie des travailleurs de confiance (Diaz, 1992), les empêchant, par cet acte, d'appartenir au syndicat des travailleurs du pétrole, le STPM.

Tout cela laisse penser que l'avenir de l'industrie pétrolière mexicaine sera beaucoup moins déterminé par le nationalisme et par l'idée que le pétrole représente un facteur d'affirmation de la souveraineté des nations qu'auparavant.

‘Après des décennies de pratiques politiques nationalistes dans le secteur, il semble que <<... les vieilles procédures, l'ancienne organisation du travail, la culture syndicale et de travail, aussi bien que les structures politiques et syndicales qui ont été mises en place au cours des 50 dernières années dans l'industrie pétrolière se trouvent dans un processus de fragmentation accéléré. L'idée d'un recours naturel et d'une industrie base de la souveraineté nationale – avec des responsabilités sociales au-dessus des coûts économiques, avec des circuits familiers pour le recrutement de la force de travail et le renouvellement du leadership syndical, avec l'influence déterminante du syndicat dans la direction de l'industrie et avec la prédominance des critères syndicaux pour l'organisation du travail – ainsi que l'idée d'un syndicat copropriétaire et co-bénéficiaire de l'industrie des hydrocarbures, succombe devant le projet d'obtenir une industrie efficace, rentable et ouverte à des investissements privés, tantôt nationaux tantôt étrangers>> (Diaz, 1992 : 271).’

Toutefois, les résistances des gouvernements mexicains aux exigences des accords du NAFTA de libéralisation du secteur pétrolier (les entreprises pétrochimiques n'ont pas été jusqu'alors – janvier 1997 – privatisées, par exemple), démontrent que la question pétrolière reste encore importante dans la société mexicaine, au moins sur le plan symbolique. Même si les idées dominantes chez les gouvernants mexicains poussent à ce que l'industrie mexicaine du pétrole s'adapte aux nouvelles données internationales, le fait est que cette industrie demeure encore capable d'éveiller des sentiments nationalistes.