Sanctions et devoirs à la maison : deux exemples significatifs des changements survenus

Les deux exemples suivants montrent bien comment, jadis, les problèmes étaient différemment posés, de telle sorte que nous n’avions pas besoin d’en appeler à la déontologie.

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e premier concerne les sanctions et, en particulier, le port du bonnet d’âne17. Certaines images et gravures, témoignages du passé, nous montrent des mauvais élèves, nez au mur ou dans un coin de la classe, victimes de ce genre de sévices et affublés d’un bonnet d’âne, dont le sens était et demeure encore connu de tous. Les maîtres d’école étaient autorisés (et même encouragés) à utiliser cet instrument, érigé en véritable institution. Les parents ne s’en plaignaient pas auprès de l’enseignant, pas plus auprès du directeur, et encore moins auprès de l’inspecteur. Quand bien même l’auraient-ils fait que ce dernier aurait exhibé les résultats du mauvais élève comme preuve irréfutable ayant conduit le maître à agir ainsi. Aujourd’hui, les sévices moraux et les châtiments corporels sont prohibés et doivent être sévèrement sanctionnés, même si les parents sont divisés et leurs attentes contradictoires.

Le second concerne les devoirs à la maison. Auparavant, l’institution scolaire considérait comme indiscutable l’efficacité des devoirs à la maison ; les bons maîtres d’école donnaient des devoirs. Aujourd’hui, bien qu’un arrêté du 23 novembre 1956 les ait supprimés18, bien que nous sachions que les devoirs à la maison, les recherches demandées aux élèves ne peuvent pas être conduites de la même manière, ni avec la même espérance de résultat selon que la famille dispose ou non d’un dictionnaire, d’une encyclopédie voire d’un ordinateur multimédia connecté au réseau internet, certains enseignants poursuivent cette pratique, presque toujours sous la pression forte de certains parents, avec parfois l’accord tacite de leur inspecteur, et en tous les cas sans que l’institution réagisse toujours fermement. Quand cependant certains parents s’en inquiètent et qu’un Inspecteur d’Académie est saisi, les effets de son intervention sont le plus souvent insignifiants, et les devoirs "non obligatoires" perdurent19.

Parce qu’il sera le fruit d’une interpellation, oeuvre co-élaborée d’une pensée professionnelle collective, un code de déontologie aiderait sans doute davantage au questionnement et éclairerait là où les seuls textes réglementaires ont échoué. Ces derniers ont trop souvent tendance à contraindre sans imposer réellement, avant même d’avoir pris le temps de convaincre.

Notes
17.

VY (peinture), Le bonnet d’âne, col. Viollet, Histoire d’école, F. DUPUY, La Farandole, 1982, page 38.

18.

la circulaire d’application du 24 décembre 1956 a confirmé ce texte.

19.

Il arrive heureusement que d’aucuns réagissent au point de voir protester un comité de parents indignés, obligeant l’inspecteur d’académie à une réponse. “ Votre lettre du 25 septembre dernier a retenu toute mon attention. Je vous confirme que les devoirs à la maison ont été supprimés par l’arrêté du 23 novembre 1956. La circulaire d’application datée du 24 décembre 1956, confirme bien les termes de ce texte ; elle est à cet égard dépourvue d’ambiguïté. C’est donc à juste titre que Monsieur l’Inspecteur de l’Education Nationale a rappelé les dispositions en vigueur et demandé aux maîtres de sa circonscription de les mettre en application. Les différents apprentissages et leur évaluation - que constituent en particulier “ les devoirs ” - doivent être effectués pendant le temps scolaire. Ils ne sauraient être confiés aux familles qui se trouvent, à cet égard, dans des situations très diverses (conditions matérielles, travail des parents, etc.). Il va de soi que ces consignes, dont la validité n’a jamais été remise en cause, n’empêchent pas les parents qui estiment devoir faire travailler leurs enfants après l’école, de le faire, à leur initiative. Veuillez agréer... ” Cette lettre fut rédigée par l’inspecteur d’académie du Rhône, en 1993.