Parce qu’elle est recherche en sciences de l'éducation, mais aussi parce que celle-ci est mienne, c’est-à-dire recherche d’un inspecteur de l’éducation nationale, elle est conduite dans le but de produire des effets. En fin de parcours, des modifications sensibles auront été introduites dans les pratiques d’inspection de son auteur. Ces modifications seront observables. Disons alors que cette recherche est conduite en terme d'effectivité ; il ne s’agit ni de décrire une réalité préexistante, ni de prescrire in abstracto des comportements nouveaux ; il s’agit de chercher à comprendre le réel dans le mouvement même de cette compréhension. Des effets seront repérables et repérés grâce à la mise en place d’outils, sous tendus par des postures et des convictions mais aussi passés au crible de l’observation rigoureuse. Cette recherche vise ainsi à une opérationnalisation de l’acte d’inspection qui s'appuie sur une analyse et une réflexion des pratiques, par l’inspecteur. Notre démarche-même peut être considérée comme une véritable formation en alternance. Elle autorise le comportement empirique du novice ou encore celui, appliqué à suivre les règles du spécialiste, tout en leur permettant de devenir des professionnels aux compétences d’experts, dominant les règles au point de pouvoir éventuellement les contourner pour mieux convaincre de leur utilité, des experts qui développent des ‘"capacités cognitives et interprétatives, des capacités d’analyse globale et de diagnostic des situations, selon des critères tactiques, techniques, éthiques, épistémiques"’ 20 favorisant ainsi la prise de recul nécessaire par rapport à leurs situations professionnelles.
Cette recherche s'obligera à proposer des moyens à mettre en oeuvre pour pratiquer une inspection capable d’aider les enseignants du premier degré à mieux enseigner aujourd’hui, c’est-à-dire une inspection attentive aux procédures créatives mises en oeuvre par les enseignants pour aider chacun des élèves, beaucoup plus qu'une inspection qui s'intéresserait aux seuls résultats de ceux-ci aux épreuves scolaires. Elle est donc moins une recherche d'efficacité à tout prix.
Pour tous ces motifs, il sera question, après une étude du passé, prenant appui sur les éclairages des recherches existantes et les résultats déjà obtenus, de proposer des procédures ou fonctionnements possibles, déjà expérimentés, mais dont on ne peut prédire l’efficacité dans une autre circonscription, avec une autre équipe, si on tentait de les reproduire sans tenir compte de la spécificité et de la complexité de celles-ci. ‘"L’apprentissage de la complexité"’ implique sans doute, comme tous les apprentissages de ‘"faire (aussi) la part belle au hasard, (...) meilleure garantie pour s’adapter et évoluer"’ 21. Notre travail ne se propose pas de réinventer des modèles ayant eu cours dans le passé ; il se veut une recherche pour l’exercice du discernement et l’aide à la prise de décision de tous les acteurs qui défendent un intérêt commun, celui du droit à l’apprentissage pour chacun des élèves au statut social reconnu, en dépit de leurs différences et de leurs profils et quels que soient leurs résultats. Enfin, ma recherche devra aussi préciser que l'inspection, pas plus que l'inspecteur ne se réduisent à un seul fonctionnalisme ; elle exigera une réflexion sur la construction identitaire de l’inspecteur, c'est-à-dire sur la quête d'une identité dont nous verrons comment elle doit trouver du sens et devenir opérationnelle et professionnelle, en prenant appui sur des pratiques.
V. LANG, La professionnalisation des enseignants, PUF, Education et formation, Paris. Page 240
Gérard CLERGUE, L’apprentissage de la complexité, Hermès, Paris 1997, page 141.