Dans le département de l'Ain,

une matrice de rapport d'inspection est utilisée par tous les inspecteurs. Elle se présente sous la forme d'une double page format A3, présentée à l'italienne.

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Tous les documents présentés illustrent bien le paradigme techniciste qui veut imposer l'inspecteur en utilisant des outils d'observation et de contrôle. Tous ont certes le mérite d’une exigence de rigueur plus grande, d’une volonté affichée de rompre avec une inspection des personnes, laissant la part trop grande à la subjectivité, à l'implicite, au non-dit et aux inter-dits entachés d'implicite. Ils ont sans doute pour objectif de mettre fin à des pratiques tenaces d’une inspection qui, appuyant ses croyances sur des certitudes somnambuliques, a longtemps cru, mais elle n’a pas été la seule, au salut par la technique, salut qui entretenait la confusion entre l’identité professionnelle naissante et la somme des compétences d’un professionnel.

Nous avons vu que même la présentation des rapports d'inspection est parfois modifiée pour ressembler alors beaucoup plus à un questionnaire à choix multiples122 ou encore à un tableau de remédiations que l'on trouve par exemple sur les notices d'emploi de certains appareils électroménagers.

L’administration centrale sans doute informée des pratiques de recrutement, de la formation et de l’évaluation des cadres des entreprises du secteur privé, sensibilisée à ces pratiques de "management" des personnels, s’est dotée d’un Directeur des Ressources Humaines123 (DRH), affecté directement auprès de chaque recteur d’académie. Ce fonctionnaire doit aider chacun des personnels à être mieux évalué dans ses capacités à enseigner, diriger une équipe ou un établissement, à mieux contrôler les actes professionnels, mieux former à des pratiques pédagogiques et didactiques, et, enfin, il doit aider à utiliser des compétences professionnelles en proposant, le cas échéant, des réorientations.

C’est un travail difficile quel que soit le secteur professionnel. Il devient quadrature du cercle à l’Education Nationale qui peine encore pour se séparer d’un de ses membres ou offrir une réorientation professionnelle avec dignité et respect de la personne, lorsqu’est constatée, chez un agent, une difficulté à répondre avec suffisamment de compétence aux exigences de son métier.

En ce qui concerne l’inspecteur, sa fonction est foncièrement liée à des problèmes qui la débordent mais dont elle dépend. Ce sont ceux qui concernent la finalité de l’école au sein de notre société. Or la crise qui affecte celle-ci et que nous découvrons au fil des controverses d’ordre philosophique et politique qui la divisent, l’intensification des divergences entre les citoyens, obscurcissent la perception des idéaux que doit viser l’institution scolaire et des valeurs à promouvoir en son sein.

Si l’inspecteur a pour responsabilité de garantir que le corps enseignant poursuive les objectifs que la nation lui confie, et si celle-ci doute, ne définit pas suffisamment ses objectifs ou n’en a pas qui parviennent à être unanimement reconnus, ses critères deviennent eux-mêmes très flous. La mission d’un directeur des ressources humaines véritablement utile, n’en est rendue que plus difficile et certainement moins visible.

Notes
122.

Cela n'est pas du goût de tous et j'ai le souvenir d'un inspecteur tuteur de la formation des inspecteurs stagiaires annoncer explicitement qu'il ne remplirait pas de rapport d'inspections s'il n'avait que des cases à cocher.

123.

Nommés dans la foulée du "nouveau contrat pour l’école", de François BAYROU, au début des années 1995, les vingt-huit directeurs des ressources humaines en poste et censés assurer une gestion moins anonyme des personnels et développer une gestion prévisionnelle pour les enseignants ont dans l’ensemble "sauvé les meubles lors des rentrées scolaires, géré des coups ponctuels ” ou “ se sont attelés à la gestion de quelques cas très particuliers". Extrait de La lettre de l’éducation numéro 215 du 24 novembre 1997 : "le flop des directeurs des ressources humaines".