L’IEN personne-ressource

Nous avons noté avec beaucoup d’intérêt que les réponses des professeurs stagiaires montrent de manière claire qu'ils pensent que si l'IEN a pour principale mission de contrôler la qualité de leur travail, il est aussi une personne-ressource qui aide à se former, conseille et apporte un regard extérieur utile et nécessaire à sa pratique.

Nous formulerionss volontiers deux réflexions concernant cette vision de l'inspecteur par les professeurs stagiaires. Elles correspondraient à ce que nous appellerions, à ce moment et faute d'avoir pu trouver d'autres qualificatifs, soit à une génération fragile, soit à une génération forte, selon l'interprétation que l'on peut faire, à partir de leurs réponses.

Dans le premier cas, celui d'une génération fragile, nous aurions affaire à des enseignants demandeurs d'aide, voire d'assistance, allant même jusqu'à refuser les responsabilités qui leur sont attribuées ; elles leur apparaîtraient comme étant trop lourdes à supporter (et par là même, si l'on pousse ce raisonnement à l'extrême, ils refuseraient aussi le contrôle de l'institution), évoquant le manque de confiance en eux, ou l'impression de n'avoir pas été assez formés.

Dans le deuxième cas, au contraire, nous serions en face d'une génération forte, responsable et autonome ; une génération qui fait fi du statut de l'inspecteur, une génération qui utiliserait les compétences de chacun, en fonction des besoins et nécessités du service, pour avancer et progresser.

Cette dernière représentation nous paraît, bien évidemment, plus positive et porteuse de projets constructifs.

Elle n'en pose pas moins la question de la place que pourrait tenir un Inspecteur de l’Education Nationale, quelle que soit, en fait, l'hypothèse retenue, car toutes les deux ébranlent les barrières hiérarchiques établies depuis la création de ce corps. Mais nous n’avons pas l’intime conviction que ce soit entièrement négatif.

Prenons, par exemple, le rôle de "formateur-évaluateur". Nous noterons que la place de la formation continue n'est pas du tout la même, dans l'un et l'autre cas.

Dans l'hypothèse de la génération fragile, cette réponse de l'institution n'apporte aucune "valeur ajoutée professionnelle", elle n'a pas été demandée et exprimée en terme de besoin par les enseignants156 ; tout au plus peut-elle servir de soupape à des enseignants en difficulté ou "usés"157. On ne se situerait pas, alors, dans un processus de formation permanente dynamique, mais dans un cadre de transmission de connaissances, pour ces enseignants. Un cadre qui risquerait d'être voué à l'échec par l’attitude de passive réception des agents .

Si au contraire, on suppose qu'il s'agit d'une génération forte d'enseignants, telle que nous l’avons décrite, la formation permanente deviendrait effective, s'inscrivant dans un processus dynamique ; la formation continue trouverait alors bien sa place. Les propositions de l'institution pourraient être suivies et enrichies par les enseignants puisqu'elles ne feraient que reprendre l'expression de besoins pouvant émaner des enseignants ou bien repérés par les inspecteurs et s’inscriraient non plus dans une logique de face à face mais bel et bien dans une logique de côte à côte.

Notes
156.

Exprimer des besoins de formation et des besoins en formation ne peut se faire qu'à partir d'un travail d'entretien et d'explicitation conduit par un formateur.

157.

J’utilise ce qualificatif, employé par Madame Elisabeth ZUCMANN, médecin, qui avait intitulé un article pour la revue du Centre Technique National d’Etudes et de Recherches sur le Handicap et les Inadaptations : "de l'usure des équipes pédagogiques et éducatives"