2.5 La place de l’éthique dans la formation des inspecteurs de l’éducation nationale

Nous sommes parti en quête, au travers du plan de formation des futurs inspecteurs de l'éducation nationale, de la place et de l'intitulé des modules réservés à l'éthique et à la déontologie en étudiant plus particulièrement, dans celui de l'année 1997/1998, tout ce qui concerne l'inspection des personnels. La présentation qui suit permet d'observer que le troisième paradigme que nous proposons et considérons comme indispensable aux IEN, sans être absent de leur formation, ne tient pas une place considérable, quantitativement du moins, sauf à comprendre la proposition :"les questions d'éthique et de déontologie seront abordées au long des travaux" comme une volonté affichée de placer cette question au centre du plan de formation, tout comme la loi d'orientation de 1989 place l'élève, avec le succès que l’on connaît, au centre du système éducatif.

Les résultats des entretiens conduits auprès de stagiaires, s'ils n'infirment pas cette hypothèse, ne permettent pas non plus de la valider. Voici ce que propose le plan de formation.

La formation est conçue à partir d'un répertoire des compétences à mettre en oeuvre par les inspecteurs de l'éducation nationale sur le terrain. Ce répertoire dont nous ne reprendrons dans le corps de notre thèse que quelques exemples est reproduit dans son intégralité en annexe. Il s'articule autour de 4 axes qui concernent :

  1. le contrôle et l'évaluation,
    Les inspecteurs stagiaires ont, par exemple, à construire un protocole d’évaluation adapté (...), collecter, organiser et traiter les informations utiles au contrôle et/ou à l’évaluation, (...) conduire un entretien pour aboutir à des objectifs (...) et obtenir l’adhésion à des modalités permettant d’atteindre ces objectifs, apprécier l’aptitude professionnelle d’une personne au regard des exigences d’une fonction.

  2. la formation des personnels,
    Dans ce secteur, il est question d’identifier des besoins , de construire un dispositif , proposer des stratégies de réponses, animer le travail d’un groupe d’adultes, repérer et promouvoir des pratiques , diffuser les données de la recherche susceptibles de faire évoluer les pratiques.

  3. l'expertise administrative et pédagogique au service du pilotage de la politique éducative dans la circonscription,
    Elle implique de la part des inspecteurs stagiaires de constituer un tableau de bord permettant de capitaliser et d’actualiser l’information (...), définir des axes prioritaires , structurer le travail des membres de l’équipe de circonscription, organiser le fonctionnement du service des personnels, réguler la gestion des écoles effectuée par les directeurs, organiser le fonctionnement de la commission de circonscription.

  4. la contribution au fonctionnement de l'institution et à l'animation de réseaux de relations.
    Ici, l’inspecteur doit instruire des enquêtes et formuler des propositions ou avis motivés pour préparer les décisions de l’inspecteur d’académie, collaborer avec les partenaires institutionnels, établir et réguler des relations de collaboration avec les partenaires extérieurs, conduire les démarches de médiations appropriées pour faire comprendre et respecter les orientations et décisions de politique éducative.

Il y a là, c’est certain, matière à se former et les paradigmes fondateurs trouvent leur place, au travers des actions citées. Si pour chacune d’elles, on reconnaît la nécessité d’une instrumentalisation, le besoin de connaître l’existence et le fonctionnement de certaines techniques et outils (les entretiens, des grilles d’observation, des tableaux de bord, des protocoles, ...) qui font directement référence au paradigme techniciste, le paradigme charismatique est aussi présent, en filigrane. Il sera nécessaire pour mener à bien des démarches de médiation, faire comprendre les orientations de politique éducative, réguler des relations entre les partenaires ou obtenir l’adhésion. Le troisième paradigme ne semble pas exclu ; le plan de formation précise en effet que les questions d’éthique et de déontologie seront abordées au long des travaux.

Nous constatons que le poids d’une formation instrumentalisée et d’ordre technique est très lourd (entraînement à la rédaction de rapports, questionnaires préalables, grilles de notation, élaboration d’outils pour la pratique (scénarios-types, guides d’observation et d’analyse), en déséquilibre sans doute avec la faiblesse d’une formation au développement humain ou personnel susceptible d’aider les jeunes inspecteurs à rester libres, en toute circonstance, pour respecter la liberté des enseignants. Nous encouragerions volontiers la mise en place de modules de formation pour aider à hiérarchiser les différentes missions et actions des inspecteurs, des modules qui permettent de distinguer les actions particulières, qui aident à se situer entre deux pôles : le premier consistant à obéir aux lois et règlements et le second à refuser les abus de pouvoir. Cette formation autoriserait de préférer, comme Antigone le fit, la loi non écrite quand la liberté d’autrui est mise en cause. C’est bien la pratique qui fait évoluer les lois et règlements et nous écririons volontiers que c’est la désobéissance mesurée qui le permet, quand ceux-ci sont inappropriés et sources de nuisances.

Nous terminons cette partie en affirmant qu’une pratique professionnelle s’inscrivant dans l’éthique et respectueuse des libertés conjointes se doit, pour exister, de réunir au moins quatre conditions nécessaires :

Quelques actions qui s’inscrivent délibérément dans la quête de l’alliance, laissant de côté le pacte et offrant sa place à l’éthique et à la déontologie font l’objet des prochains paragraphes.