c) L'Eglise et l'armée

Les relations entre l'Eglise, l'armée et la violence sont un sujet qui touche particulièrement le secrétaire du Droit du Peuple. En novembre 1919, la remise de médailles, en présence des autorités ecclésiastiques, aux soldats lausannois mobilisés depuis le 1er août 1914, provoque les sarcasmes de Leyvraz : ‘"Touchante scène. Le prêtre du Christ, sous l'espèce d'un capitaine aumônier, le prêtre du Dieu qui dit : "Tu ne tueras pas" et de son Fils enseignant de tendre sa joue et de pardonner, qui monte dans sa chaire entourée d'engins meurtriers à nu ! On comprend que les théologiens aient supprimé l'enfer. Ils ont écarté d'eux ce spectre terrible. Car si jamais la bouilloire infernale et les tridents des démons furent faits pour quelqu'un, c'est certes bien pour ces calvinistes de col roide et bouffis d'orgueil qui ont faussé la Loi au profit des grands453."’

Le 19 janvier 1920, Leyvraz aborde à nouveau cette question, suite au rapport présenté au Synode de l'Eglise nationale vaudoise en octobre 1919; le journaliste commente un des voeux exprimés par les Conseils d'arrondissement, à savoir d'inviter ‘"la Conférence des Eglises réformées de la Suisse à provoquer de la part des diverses Eglises protestantes une démarche auprès de leurs gouvernements respectifs aux fins d'instituer, de façon permanente, un service civil en faveur des citoyens que leur conscience empêche de servir sous les armes454."’ Leyvraz critique cette proposition parce qu'elle ‘"ne pose pas la question de principe : condamnation ou approbation par l'Eglise in corpore de la guerre, de l'armée, du service militaire. Elle est même plutôt une façon de l'esquiver en laissant cela à l'appréciation de chaque conscience individuelle, évitant ainsi à l'Eglise la responsabilité et l'honneur de se prononcer ouvertement455".’

Notes
453.

"Deux mondes en lutte". Droit du Peuple, 4 novembre 1919.

454.

Cité par LEYVRAZ in "L'Eglise et l'Armée", 19 janvier 1920, op. cit.

455.

René LEYVRAZ. "L'Eglise et l'Armée", 19 janvier 1920, op. cit.