2. UN AMOUR BLESSÉ

Cette conférence est à marquer d'une pierre blanche. Certes, ce que Naine déclare ce soir-là, le jeune journaliste le sait : ‘"le socialisme ne travaille que dans l'ordre naturel et humain, et il y veut réaliser la justice et la fraternité; quant à l'ordre surnaturel et divin, il l'abandonne aux religions517."’ A la question de l'immortalité de l'âme, de l'au-delà, Naine ne peut que répondre : "Peut-être", "Nous ne savons pas", "Néant". Or, justement, c'est à ce néant que Leyvraz veut s'arracher. Les propos de l'orateur ne parviennent donc ni à l'apaiser, ni à le convaincre. Son amour du socialisme est blessé. Mais il faudrait lire entre les lignes pour trouver trace de cette déception dans le compte rendu qu'il insère le lendemain dans le Droit du Peuple : ‘"La conférence de notre camarade Naine a réuni un joli auditoire hier soir au local de la jeunesse socialiste. Montrer que l'harmonie - harmonie intérieure, harmonie entre les hommes, et harmonie avec la nature - est une loi qui mène le progrès humain, tel était le but de notre camarade. Son exposé, imbu d'un esprit de recherche sincère et modeste, laissera certainement des fruits518."’

Notes
517.

Les Chemins de la Montagne, op. cit., p. 110.

518.

Droit du Peuple, 7 février 1920.