a) La naissance d'un syndicalisme chrétien genevois

Dès 1919, sous la conduite des abbés André Savoy (*) et Auguste Pilloud (*) qui enseignaient la doctrine sociale de l'Eglise dans toute la Suisse romande, une soixantaine de jeunes disciples de l'abbé Carry constituèrent une équipe. Epris de justice et de fraternité, ils étaient décidés à opposer au ‘"désordre révolutionnaire un ordre social chrétien823"’, à créer une alternative aux mouvements ouvriers communistes, et à suivre la Lettre pastorale de 1920 sur Le Péril social qui encourageait la création de syndicats chrétiens. Parmi ces jeunes se trouvaient Antoine Pugin (*), Georges et Marius Constantin (*), Léon Guénat, Joseph Pasquier, Ernest Keller, Francis Laurencet (*). En juillet 1921, l'équipe créait le premier syndicat chrétien-social genevois824 des Employés de commerce, banque et bureau, branches alors en pleine expansion. Adossés à une dimension éthique et idéaliste825, les buts poursuivis étaient les suivants : s'appuyer sur l'enseignement de Rerum Novarum, être une école de formation sociale et professionnelle, se constituer en un corps représentatif, offrir un service d'entraide. Avec une note corporatiste : développer non un syndicalisme de classe mais de professions qui permette une réconciliation entre patrons et ouvriers, entre capital et travail.

Notes
823.

Edmond GANTER. Bâtir la maison ... , op. cit., p. 45.

824.

Genève était très en retard sur la Suisse romande qui totalisait déjà 22 syndicats chrétiens. Le premier avait vu le jour en 1916 dans le canton de Fribourg.

825.

"Remettre tout d'abord à l'honneur les vertus les plus nobles que requiert l'accomplissement du travail bien fait. Enlever de l'esprit de l'ouvrier l'idée fausse que le travail est une obligation dé-gradante et humiliante, mais lui en faire comprendre la noblesse et la beauté. Faire du travail une raison d'espérer, parce qu'il est une rançon qui doit nous faire atteindre notre destinée éternelle. Proclamer que loin d'avilir le travailleur, le travail l'élève et le fortifie, le libère et le grandit." (Discours de Joseph MIAZZA, secrétaire de la Fédération des syndicats chrétiens, à l'occasion du 25e anniversaire de cette fédération. Cité dans le Courrier de Genève, 30 septembre 1946).