2. L'INFLUENCE NOUVELLE DES MILIEUX INDÉPENDANTS

Outre cette rupture syndicale, les mutations sociologiques du catholicisme genevois se sont répercutées sur le Parti. En effet, de par sa diminution, la catégorie des agriculteurs a perdu sa forte influence; l'attachement aux traditions du catholicisme genevois, né du Kulturkampf, s'est estompé et la lutte visant à consolider les positions catholiques sur le plan civique est considérée maintenant comme dépassée. De ce fait, le Parti a abandonné la formule de représentation tripartite (agriculteurs, ouvriers et employés, commerçants et professions libérales) qui était appliquée depuis 1926. La classe des indépendants et des professions libérales s'est beaucoup étoffée : avocats, médecins, chefs d'entreprises commencent à y jouer un rôle prépondérant. Les "meneurs" de l'Ecole de l'abbé Savoy ont perdu de leur influence. Une page s'est tournée. Les cadres du Parti ont rajeuni; depuis 1948, des militants âgés de trente ans siègent au Grand Conseil2285. A partir de 1950, le nouveau président, Emile Dupont (*), un dynamique chef d'entreprise, insufflera une teinte "patronale" qui va de plus en plus se faire sentir à l'intérieur du Parti, tant dans son organisation que dans ses décisions. Dans le Comité, les postes-clés - jusqu'ici tenus par des salariés et des agriculteurs - seront de plus en plus confiés à des hommes de professions indépendantes. Face à ce nouveau souffle, certains n'hésitent pas à se réjouir et à déclarer que le Parti a ‘"le vent en poupe. Il s'est retrempé dans un véritable bain de jouvence, d'innombrables équipes, jeunes et actives, fidèles à la tradition, suivent la voie de leurs aînés et préparent la relève. Quelle activité, quel enthousiasme, quelle ferveur2286" ! ’

Notes
2285.

Résultats des sièges obtenus : Parti indépendant chrétien-social : 15 (+ 1); national-démocrate : 18 (+ 2); radical : 25 (- 10); socialiste : 9 (-); du travail (communiste) qui siège pour la 1ère fois : 36.

2286.

Déclaration de Fernand COTTIER à la Fête du Parti, St-Jean, 1952. Cité par David Hiler et Geneviève Perret Bari in Le Parti Démocrate-chrétien à Genève, un siècle d'histoire, 1892-1992, op. cit., p. 109.