Annexe

Annexe I
L'EGLISE VAUDOISE AU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE

Au cours du XIXe siècle, l'Eglise vaudoise dut affronter de multiples tensions; elle traversa une crise dès 1814 avec l'irruption du Réveil qui attira nombre de jeunes ministres et de fidèles. Lorsqu'en 1823 trois pasteurs nouvellement consacrés signifièrent au Conseil d'Etat leur volonté de quitter l'Eglise nationale, par fidélité à la Parole de Dieu, le Grand Conseil vota en représailles, le 20 mai 1824, une loi interdisant les "conventicules", c'est-à-dire la réunion de ces dissidents désignés sous le terme méprisant de "mômiers". Autre défi adressé à l'Eglise nationale : la Révolution radicale de février 1845 contraignit les pasteurs à adhérer, en tant que fonctionnaires, aux idées des nouveaux dirigeants politiques. Une partie du clergé tenta, sans succès, d'obtenir d'une part, que la nouvelle Constitution vaudoise reconnaisse le principe de la liberté religieuse, déjà égratignée par la loi du 20 mai 1824; et, d'autre part, que soit levée l'interdiction faite aux ministres du culte de participer aux "Oratoires", assemblées cultuelles privées, inspirées du Réveil, et soutenues par certains pasteurs pour faire droit aux besoins spirituels de leurs ouailles. La crise s'envenima encore les 3 et 10 août 1845, lorsque, désirant marquer leur indépendance, plusieurs ecclésiastiques refusèrent de lire en chaire une proclamation émanant du Conseiller d'Etat Henri Druey, parce qu'ils estimaient qu'elle n'avait aucun rapport avec la religion; d'une part, cette proclamation expliquait les principes de la nouvelle Constitution qui devait être prochainement soumise au verdict populaire; d'autre part, elle visait aussi à repousser les accusations de "communisme et d'athéisme" portées contre le nouveau gouvernement. Suite à cet acte de rébellion, l'Etat suspendit alors de leurs fonctions officielles (pour une durée pouvant aller jusqu'à un an) les pasteurs récalcitrants; le clergé vaudois répliqua par une menace de démission collective, si des garanties formelles ne lui étaient pas accordées, menace souscrite par environ cent soixante ecclésiastiques, dont le pasteur Baup, d'Yvorne. Cette contre-révolution du clergé tourna pourtant à l'avantage du gouvernement : Druey, appuyé par la grande majorité du peuple vaudois, adopta des mesures pour assurer le culte public.

Pris en tenailles entre un gouvernement intraitable et des collègues intransigeants, certains pasteurs revinrent alors sur leur démission, afin de ne pas abandonner leurs paroissiens et de maintenir l'existence d'une Eglise protestante qui avait déjà perdu plus de la moitié du clergé en charge. Les autres, comblant le souhait d'un Alexandre Vinet abandonnèrent l'Eglise nationale et sa religion d'Etat, et créèrent alors "l'Eglise libre". La politique radicale répressive eut pour conséquence l'union de dissidents (de tendances pourtant fort diverses) au sein de cette Eglise nouvellement constituée. Dynamique, celle-ci put compter bientôt sur un nombre abondant de pasteurs; elle créa sa propre faculté de théologie. S'appuyant sur certains principes calvinistes, elle associa les "Anciens" aux structures synodales, rédigea une nouvelle Confession de foi et accorda aux congrégations locales une large autonomie.