Deuxième partie :
Le recentrage autour d’une configuration journalistique plus traditionnelle. La maturation de la presse multimédia

Introduction deuxième partie

La période de maturation de la presse multimédia correspond à une phase de transition entre son aspect initial et sa forme stabilisée. Elle occupe en ce sens une place très importante dans le cycle de constitution d’une presse spécialisée puisqu’il s’agit du moment où les nouveautés de la période précédente sont progressivement reformulées, et où simultanément, vont se mettre en place à l’issue de ce réagencement, les fondations du modèle généraliste finalement dominant de la presse multimédia.

La maturation est donc à entendre dans un double sens. D’une part comme l’acquisition d’une certaine maturité pour les publications originaires de la période “ cyber ”, et en particulier celles du courant “ multimédia et société ” venant clore les débuts de cette presse spécialisée. D’autre part comme le mûrissement des différentes tendances émergentes de la presse multimédia, préparatoire à leur réunion dans une formule spécifique et adéquate.

C’est dans l’optique d’un tel mouvement de transformation de la presse multimédia, souvent lent et parfois contradictoire, qu’il convient d’analyser à la fois l’évolution de sa représentation du domaine, son mode de diversification sur les nouveaux supports électroniques, et son mode de fonctionnement entre interdépendance des acteurs et logique économique.

La représentation du multimédia dans la presse spécialisée, lors de cette période de maturation, diffère de la phase précédente par la multiplication de ses approches et le recentrage de ses sujets. En ce sens, elle dessine par ailleurs la trame de la phase suivante avec la mise en place de deux courants de publications assez marqués.

La cyberculture ou les nombreuses interrogations quant à l’avenir de la société avec les nouvelles technologies ne constituent plus les seules façons d’aborder le multimédia dans la presse. Les angles du traitement journalistique sont désormais variés : au nombre de quatre (angles techniques, pratiques, professionnels, loisirs), ils sont en outre utilisés pour décrire des applications concernant cette fois précisément l’Internet.

Ces magazines se rangent en deux groupes bien distincts : certains ont comme objet principal le surf sur le Web, d’autres s’intéressent aux atouts du réseau informatique mondial pour l’activité économique. Ils reproduisent ainsi la dichotomie traditionnelle dans la presse spécialisée entre approche loisir et approche professionnelle, dont des réminiscences seront encore perceptibles dans le modèle généraliste final de la presse multimédia.

Parallèlement à cette pluralité des approches journalistiques du domaine recentrées sur l’Internet, la presse multimédia se caractérise alors par une unification entre les différents supports de sa diversification.

Les dimensions originales et foisonnantes observées pour les publications CD-Rom et Internet lors de la période précédente ont disparu, au profit d’une plus grande cohérence entre les magazines imprimés et leurs extensions électroniques.

Regroupées autour d’une thématique d’information-connaissance à visée pratique, les dimensions développées sur les nouveaux supports se révèlent fort complémentaire de celles demeurant dans les revues classiques. Ceci dans le cadre d’une articulation réfléchie entre les versions Web, CD-Rom et papier.

Ces réorientations de la presse multimédia découlent d’un mode de fonctionnement médiatique lui aussi fortement modifié par rapport à la période initiale, et qui ne se stabilisera qu’à la phase suivante.

Premièrement, de nouveaux acteurs apparaissent. Les lecteurs-Internautes néophytes sont en effet de plus en plus nombreux. Les publications cherchent à les intéresser en diversifiant les points de vue et les approches, et à les initier de manière continue et régulière à la nouvelle technologie en multipliant les sujets récurrents. Intéressés au premier chef par l’arrivée de ces utilisateurs potentiels, les acteurs du domaine se transforment encore plus fréquemment lors de cette phase en acteurs médiatiques, dans le but de courtiser ces nouveaux venus sur le marché qu’ils cherchent à exploiter.

Par ailleurs, la phase de maturation de la presse multimédia consiste en une adaptation aux impératifs économiques : occultés avec l’idéologie non-marchande dominant la période précédente, ils s’avèrent désormais incontournables. Ainsi la concurrence entre publications, en ce qui concerne leurs approches comme leurs sujets, trouve son explication dans la recherche des segments les plus rentables de la presse multimédia. Le remplacement progressif des utopies d’inspiration cybernétiques par des préoccupations plus matérielles peut également être observé dans les versions électroniques de la presse multimédia. Celles-ci sortent alors du règne de l’amateurisme et du bénévolat et cherchent à leur substituer une formule économiquement viable, voire profitable.