Conclusion deuxième section

Le mode de diversification de la presse multimédia se stabilise lui aussi lors de cette phase, autour d’une réelle complémentarité entre les différents supports des publications.

Les extensions électroniques développent une dimension d’intermédiation entre le lecteur et le domaine de l’Internet, qui prolonge de manière matérielle la médiation des revues imprimées. Cette intermédiation est double : les CD-Roms se transforment à la fois en interface de navigation et en plate-forme pour la création.

Les ingrédients de cette configuration, détaillés dans le tableau 18, étaient en réalité déjà présents dans la période de maturation précédente : mise à disposition de logiciels dans l’approche professionnelle, sélection de sites Web dans l’approche loisirs. Ils ont réagencés et mêlés, en même temps que la visée des revues est devenue généraliste, par le biais de la pratique de création.

Celle-ci est désormais également privilégiée sur les extensions électroniques. Les CD-Roms se muent en effet en plate-forme pour la création, une dimension d’intermédiation qui s’ajoute à celle d’interface de navigation, déjà plus ou moins entrevue dans les publications de la catégorie loisirs antérieure. Des outils informatiques nécessaires à l’édition html côtoient des sites Web “ aspirés ” pour servir de modèles aux créateurs dans le premier cas. Parallèlement, les dernières versions des logiciels de navigation permettent d’aller surfer allègrement au détour des adresses répertoriées hypertextuellement dans le second cas.

Les éléments électroniques de cette double intermédiation possèdent leurs pendants sur l’édition imprimée. Premièrement, les différents instruments informatiques livrés sur le CD-Rom, tant pour la création que pour la navigation, bénéficient d’un accompagnement textuel à but pédagogique dans la version imprimée. Cette fonction didactique, habituelle dans la presse informatique, se superpose à une seconde, proche de la presse audiovisuelle : la description commentée des sites Web répertoriés ou “ aspirés ”. Ainsi, le support papier permet une prise de recul parfaitement complémentaire de l’entrée directe dans le domaine, proposée sur les CD-Roms.

Comme dans le cas de la description médiatique, Netsurf et .net se retrouvent dans un même mode de diversification stabilisé, après avoir emprunté des itinéraires presque opposés. Le tableau 19 montre comment leurs parcours respectifs ont bifurqué avant de converger.

Les deux publications avaient toutefois en commun, lors de leurs cursus initiaux, une même prédilection pour la technique et la pratique. Elle constituait leur principale originalité au sein de la phase de maturation précédente, et s’est révélée par la suite le fondement de leur avancée vers une double intermédiation électronique.

Cet intérêt pour les éléments techno-pratiques a longtemps camouflé l’orientation indécise de l’extension électronique de Netsurf. Tour à tour sur le Web puis sur CD-Rom, celle-ci était également à cheval entre l’orthodoxe fourniture de logiciels de travail de l’approche professionnelle et l’ouverture aux aspects de loisirs datant de ses origines cybernétiques. Ceci jusqu’à ce que, à l’instar de la publication toute entière, elle ne privilégie la pratique généraliste de création Web, se transformant en plate-forme à cet effet. Le pas en dehors du strict monde de l’entreprise aura été ainsi franchi subtilement, laissant la voie ouverte à une démarche en direction des amateurs. Et c’est ainsi que presque naturellement, le “ Netsurf Guide ”, un temps laissé en retrait, est remis en avant dans la version électronique, adoptant rapidement le visage d’une interface de navigation.

Le basculement du CD-Rom de .net dans cette double intermédiation ne s’est pas effectué en deux étapes comme pour Netsurf, mais en une seule. En effet, après avoir opté pour le surf comme activité principale de l’Internet car il s’agit de la pratique la plus divertissante pour ses lecteurs, .net ose directement le grand saut. Elle transforme son CD-Rom d’un trait, simultanément en interface de navigation et en plate-forme pour la création. .net commence par structurer superficiellement son extension électronique en ce sens avant de la remplir d’éléments adéquats, c’est-à-dire de logiciels et de sites utiles dans une perspective à mi-chemin entre loisir et travail.

Le mode de diversification de la presse multimédia est aussi régulier que cohérent, par rapport au modèle généraliste de sa description médiatique.

Cette stabilité s’explique par un mode de fonctionnement journalistique qui lui aussi a trouvé ses marques. Il évolue légèrement, simplement nuancé par les extensions électroniques. Et ce dans le sens d’un fin rapprochement entre les acteurs de la médiatisation, et d’un amoindrissement parcellaire de la logique économique.