Il nous faut maintenant définir quelles sont les représentations de la Chine et des Chinois qui ressortent des Missions catholiques, du point de vue des lecteurs.
Nous avons jusqu'ici cherché à repérer les principaux traits qui caractérisent la Chine au sein des Missions Catholiques 58 .Cependant, il faut bien être conscient qu'entre notre vision, et celle du lecteur du journal, il y a un décalage important. Il n'est pas simplement dû aux quelques décennies qui nous séparent. Nous avons travaillé à partir d'une collection complète, qui s'étend sur une quarantaine d'années. Aucun lecteur des Missions Catholiques ne s'estforgé une image de la Chine avec une telle quantité de documents. La représentation de l'Empire du Milieu se faisait à partir de quelques articles, étalés tout au plus sur un ou deux ans, et sans doute, sans souci de comparaisons ou de retours en arrière, pour mettre en liaison des articles distants de quelques années.
Notre vision sera donc plus variée, et plus riche que celle qu'a pu avoir le lecteur du début du siècle, ou de l'entre-deux guerres. Elle sera en même temps plus critique, mettant à jour des phénomènes de répétition, tant au niveau des thèmes que des illustrations, qui n'ont pu qu'échapper à l'époque, même à l'abonné le plus fidèle.
Dans un premier temps, nous aborderons les aspects géographiques. Cette étude est possible puisque, dès 1924 les Missions Catholiques indiquent la provenance de leurs photographies, en précisant la région ou, le plus souvent, la ville ou la paroisse d'origine du document. Toutes les provinces de Chine figurent dans la liste ainsi constituée. Cependant, il nous faut souligner que le nombre de sites est relativement modeste : 51 seulement, ce qui ne représente qu'à peine plus d'un tiers des lieux qui constituent les archives des O.P.M. 59 .
Si nous nous intéressons à leur fréquence d'apparition, notre vision se précise, mais dans un sens encore plus restrictif. A eux seuls, 6 sites regroupent un tiers des reportages et 10, plus de la moitié. A l'opposé, 24 lieux fournissent moins d'un cinquième des articles illustrés 60 .
En toute logique, nous avons, parmi les sites qui trouvent un large écho dans le journal, les trois plus grandes métropoles chinoises : Pékin, Shanghaï, et Canton. Mais, Ichang 61 , se glisse également au même rang que ces trois agglomérations. Des villes comme Ningpo, Swatow et Sienhsien sont également bien représentées. Nous voyons ainsi apparaître de « grands centres de chrétientés », qui font office de « contrepoids » chrétiens aux grandes métropoles chinoises.
Les thèmes des différents paragraphes de ces deux chapitres (V et VI) ont été élaborés à partir de la classification des photographies des archives des O.P.M. qui a été ensuite appliquée aux illustrations des Missions Catholiques (Voir 2ème partie, Chapitre II).
Il y a 141 sites répertoriés dans les archives des O.P.M (Voir 2ème partie).
Pour un ensemble de 128 reportages illustrés, les fréquences, entre 1924 et 1939, sont les suivantes : Canton, Shanghaï, Pékin, Ichang, la Mongolie, et la Mandchourie 7 fois.
Ningpo apparaît 6 fois.
Swatow, Sienhsien et le Thibet 5 fois.
Ningyuanfou et Iduhsien 4 fois.
Langlong, Tatungfu et Nanning 3 fois.
Haïmen, Tientsin, Hongkong, Tali, Chungking,
Jehol, Yunnanfu, Pakkoi et Suifu 2 fois.
Dans les années 20, Ichang est une ville de moins de 100.000 habitants alors que Shanghaï, Pékin, et Canton ont respectivement des populations de 4.000.000, 900.000, et 700.000 habitants. D' après P. Vidal de la Blache Tome IX de la "géographie universelle". Armand Colin 1927.